Le ministre du Tourisme a inauguré, jeudi 20 mai 2010, la nouvelle édition
du MIT, Marché Méditerranéen du Tourisme, au moment où professionnels et
autorités, sans compter tous ceux qui vivent du tourisme en Tunisie, et ils
sont nombreux, se posent mille et une question sur l’avenir d’un secteur
dont la place est irremplaçable dans les équilibres économiques et sociaux
du pays.
Nous étions tous petits, en 1969, quand les premiers LandRovers remplis de
têtes blondes ont commencé à faire leur apparition timidement dans nos
villages du sud. Nous avons eu le temps, depuis, de grandir et de voir des
cars et des cars déverser des flots de touristes dans les souks, les oasis
et surtout sur les plages de nos côtes…
Le développement de l’infrastructure a suivi et nul ne peut aujourd’hui
mettre en doute l’apport de ce secteur au développement non seulement
économique mais également civilisationnel de la Tunisie, redevenue une
destination de rencontres et d’échanges mutuellement enrichissant.
Cependant, il faut bien se rendre à l’évidence et déclarer solennellement la
fin de notre produit phare, le
tourisme balnéaire, parce qu’il n’est tout
simplement plus rentable en 2010 comme il l’a longtemps été, nous poussant à
dormir sur nos lauriers quand d’autres destinations s’échinaient à inventer
le tourisme du XXIème siècle.
Le malheur c’est que ce discours est sur toutes les lèvres, et même dans la
littérature florissante de l’ONTT et son langage marketing… Oui !
Officiellement on veut changer de produit, oui ! Tout aussi officiellement
on développe les tourismes alternatifs, écologique, de montagne, saharien,
culturel, intérieur et tutti quanti…
Mais réellement on est aussi obligé de courir les marchés anciens et
nouveaux à la recherche du moindre client qui payerai ne serait-ce que 200
euros pour un séjour d’une semaine dans un palace à moitié vide. Un client
qui, le soir venu, n’oublie pas de marquer de son nom sa bouteille d’eau
minérale pour le lendemain matin. Un client qui ne dépense pas lors de son
séjour le prix d’un café dans un de nos cafés du côté d’Ennasr …
Tous les intéressés par le sort du tourisme pointent du doigt les
défaillances des hôteliers qui ne font aucun effort de commercialisation et
d’innovation de leur produit, se contentant des actions de promotion de l’Etat
à travers l’ONTT, ou courant les marchés à la recherche d’une location de
leurs unités hôtelières même à des prix ridicules …
Les hôteliers, de leur côté, jettent leurs anathèmes sur les agences de
voyage et les tours-opérators, sur la formation défaillante du personnel,
sur les coûts de l’emploi, sur les banques et même sur les humeurs des
bourses européennes !!
On est aujourd’hui dans la situation de la famille qui s’étripe autour de
son malade pour savoir qu’est-ce qu’il a et qu’est-ce qui le ferait guérir
sans penser à appeler ni le médecin ni même l’ambulance du SAMU !
Il n’y a pas de stratégie qui puisse changer la donne de notre tourisme en
un clin d’œil, comme il n’y a pas de possibilité véritable de faire demain
matin table rase de plus de 40 ans de tourisme balnéaire. Mais il est tout
aussi urgent de développer une nouvelle stratégie de produit, de vente, de
prix et d’image. Cette nouvelle stratégie, une fois arrêtée, requiert du
temps, de l’argent et des hommes. Elle requiert beaucoup de temps, beaucoup
d’argent et surtout beaucoup d’hommes en amont et en aval du produit
touristique pour reconstruire une image dont les traits sont
considérablement riches et variés. Une image digne de la Tunisie avec ses
3.000 ans d’histoire, de civilisation et de richesses. Une image qui serait
vendable à des nouveaux consommateurs qui ne sont pas ceux de la fin des 30
glorieuses de l’Occident, mais à des nouvelles générations qui peuvent
visiter la Tunisie à travers le moteur de recherche de la toile en regardant
un film dans leur salon…