AIG refuse de brader AIA, mettant en péril son rachat par Prudential

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éricain AIG (Photo : Stan Honda)

[01/06/2010 16:38:40] LONDRES (AFP) Le plus grand rachat de l’histoire de l’assurance a reçu mardi un coup vraisemblablement fatal, l’assureur américain AIG ayant refusé d’abaisser le prix de vente colossal de sa filiale asiatique AIA, comme le lui réclamait Prudential, sous la pression de ses actionnaires.

L’assureur américain AIG a adressé une fin de non-recevoir à l’assureur britannique, qui lui avait demandé de réduire à 30,375 milliards de dollars le prix de vente d’AIA. Soit un rabais de 14% par rapport aux 35,5 milliards de dollars convenus initialement (près de 29 milliards d’euros au cours actuel).

AIG “va s’en tenir aux conditions initiales de l’accord précédemment annoncé avec Prudential”, et “n’envisagera pas de modifier ces conditions”, a fait savoir l’assureur américain, dans un communiqué publié dans la nuit.

AIG a sans doute pris le risque de faire échouer la transaction sur l’insistance du gouvernement américain, qui détient 80% de son capital et devait recevoir le plus gros de la vente. Ce dernier peut en effet toujours espérer se refaire en relançant le projet d’introduction en Bourse d’AIA.

Prudential s’est contenté dans l’immédiat de prendre note de ce refus, et a indiqué qu’il allait examiner la situation.

Le rachat d’AIA, annoncé il y a trois mois, est censé faire de Prudential le leader international de l’assurance vie en Asie, lui donnant les clés d’une région à l’énorme potentiel de croissance.

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à Hong Kong, le 18 septembre 2008 (Photo : Mike Clarke)

Mais cette acquisition transformatrice, négociée par le directeur général de la vénérable “Pru”, le franco-ivoirien Tidjane Thiam, a suscité dès son annonce des doutes et des inquiétudes parmi les investisseurs, qui ont grandi au fil des semaines.

Sous la pression grandissante de ses actionnaires, Prudential a été contraint en fin de semaine dernière d’entamer des discussions avec AIG, pour tenter de revoir à la baisse le prix de la transaction.

Face au refus du groupe américain, Prudential a désormais le choix entre tirer un trait sur toute l’opération, ou bien tenter tout de même de convaincre ses actionnaires d’accepter le rachat au prix initial, lors d’une assemblée générale extraordinaire prévue le 7 juin, ce qui semble avoir très peu de chances de réussir.

Le rachat devra en effet recueillir au moins 75% des voix pour être approuvé. Or plusieurs grands actionnaires du groupe ont fait part ouvertement ou officieusement de leur opposition à cette méga-acquisition.

Robin Geffen, patron du fonds d’investissement Neptune, qui a monté une fronde contre le projet de rachat, dit avoir déjà rallié à sa cause 20% des actionnaires.

A la Bourse de Londres, les investisseurs se sont montrés soulagés par l’échec probable du rachat, sans même attendre la décision de Prudential. Le cours de l’assureur a grimpé de 6,28% à 575,5 pence, signant la plus forte hausse dans un marché en recul de 0,49%.

De l’avis général, M. Thiam va se retrouver sur la sellette en cas d’abandon de l’acquisition d’AIA. En tant que principal architecte de ce projet, il risque en effet d’être accusé par les actionnaires d’avoir eu les yeux plus gros que le ventre.

“En rejetant la demande de Prudential de réduire le prix d’AIA, il semble bien qu’AIG ait décidé, accidentellement ou pas, de ne pas se lancer à la rescousse de la carrière de Tidjane Thiam”, dont les jours semblent désormais comptés, a observé Howard Wheeldon, du cabinet BGC Partners.

L’abandon du rachat d’AIA pourrait aussi ouvrir la voix à un démantèlement de l’assureur britannique ou à un recentrage sur ses seules activités britanniques, une stratégie défendue par certains investisseurs, car elle pourrait leur permettre d’empocher d’importantes plus-values.