La difficile équation du rachat du Monde : effacer les dettes, garantir l’indépendance

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çade du siège du quotidien Le Monde, le 27 décembre 2007 à Paris (Photo : Francois Guillot)

[03/06/2010 16:46:05] PARIS (AFP) La reprise du Monde, pour laquelle quatre candidats sont en piste, passe par une recapitalisation massive indispensable à la survie d’un groupe fortement endetté et dont la rédaction est particulièrement attachée à son indépendance.

Eric Fottorino, président du directoire du groupe (Le Monde, Courrier international, Télérama, La Vie…) a expliqué jeudi aux lecteurs du quotidien les raisons de cette recapitalisation et l’impérieuse nécessité de préserver l’indépendance du journal.

Dans un éditorial, il a souligné que “l’opération devra se concrétiser par le choix d’ici à la mi-juin d’un nouveau partenaire qui, seul ou associé à d’autres investisseurs, prendra une majorité dans le capital”.

Il a rappelé en outre que depuis près de soixante ans les journalistes étaient les “actionnaires de référence” du journal, reconnaissant que ce changement marquerait un “tournant historique pour Le Monde”.

Les repreneurs potentiels déclarés sont: Claude Perdriel, propriétaire du groupe Nouvel Observateur, l’Espagnol Prisa (déjà actionnaire du Monde) et un trio composé de l’homme d’affaires Pierre Bergé, du banquier d’affaires et propriétaire des Inrockuptibles Matthieu Pigasse et du président fondateur de Free, Xavier Niel, auxquels s’ajoute un quatrième candidat étranger qui pourrait être l’Italien Editoriale L’Espresso qui a confirmé étudier le dossier.

Outre les importants besoins financiers que le repreneur devra assumer, d’autres critères doivent être pris en compte. “Obtenir la garantie que le nouvel actionnaire n’interviendra ni de près, ni de loin dans les contenus de nos titres, dans une période où l’échéance présidentielle de 2012 occupe déjà les esprits”, écrit encore M. Fottorino.

L’offre du trio Bergé-Niel-Pigasse peut paraître à cet égard rassurante: “Nous ne sommes au service de personne. Nous entendons servir Le Monde et non nous en servir”, ont-ils écrit à Louis Schweitzer, président du conseil de surveillance du Monde. “Le projet, quant à lui, est bâti autour d’un mot: l’indépendance”, écrivent-ils.

Pour un des autres candidats au rachat, le respect de cette indépendance est quasi-sacré. “Les principes seront écrits noir sur blanc et ils sont simples: un, la gestion relève des seuls actionnaires et du management; deux, l’autorité rédactionnelle dépend des seuls journalistes”, a récemment déclaré Denis Olivennes, président du directoire du Nouvel Observateur.

Sur l’aspect politique, M. Olivennes ne cache pas l’esprit du projet Perdriel qui est “de constituer un groupe de presse de centre gauche, puissant, indépendant de tous les pouvoirs: le gouvernement, les partis, le CAC 40, la banque…”. Il s’agira aussi pour les titres du groupe “de mieux protéger leur liberté éditoriale”, a-t-il affirmé.

Côté financier, les besoins sont massifs: l’endettement du groupe se décompose en 69 millions d’euros d’obligations remboursables en actions (ORA) et 25 millions à rembourser rapidement (un emprunt bancaire gagé sur Télérama). Le Monde “doit trouver très rapidement les moyens nécessaires à sa pérennité, aujourd’hui nous nous engageons pour lui apporter le soutien dont il a besoin”, ont écrit MM. Bergé, Niel et Pigasse au Conseil de surveillance du groupe.

Chez Claude Perdriel, même si on affiche des moyens financiers conséquents, avec plus de 100 millions de fonds propres, la réflexion est de mise. Selon le quotidien La Tribune, le patron de l’Obs serait devenu hésitant et pourrait du coup chercher un ou plusieurs alliés pour finaliser une proposition.