Messier se voit en patron désintéressé, pas en coureur de parachute doré

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à Paris (Photo : Bertrand Langlois)

[03/06/2010 18:29:43] PARIS (AFP) Juin 2002: Jean-Marie Messier prend la “décision la plus difficile de sa vie” et démissionne de Vivendi Universal. A cet instant, il est un homme “paumé”, peu préoccupé de négocier un futur parachute doré qui lui vaut des poursuites pour abus de biens sociaux, a-t-il plaidé jeudi devant le tribunal correctionnel.

Cette période qui aboutit à son départ forcé du groupe phare du CAC 40, Jean-Marie Messier s’en souvient “minute, par minute”.

Au deuxième jour de sa comparution devant la 11ème chambre du TGI de Paris pour plusieurs délits pénaux et boursiers, l’ancien PDG en a livré un récit détaillé.

Son but: démontrer qu’il ne fut ni initiateur, ni véritable acteur de la négociation du parachute doré de 20,5 millions d’euros qui lui fut octroyé, sans accord du conseil d’administration de Vivendi, alors qu’il laissait un groupe en pleine crise de trésorerie.

Cet accord avait suscité la colère des actionnaires et une vive controverse en France. “J2M” avait fini par renoncer à ses indemnités de départ en décembre 2003.

Il a d’ailleurs rappelé au tribunal n’avoir, au final, “pas touché un euro” après son éviction du groupe.

Jean-Marie Messier n’en est pas moins poursuivi pour abus de biens sociaux: les juges d’instruction estiment que cette promesse d’indemnité a causé à Vivendi un préjudice financier car l’entreprise a dû immobiliser 25 millions de dollars avant que la situation ne se dénoue.

Pour cette infraction, M. Messier encourt cinq années de prison et 375.000 euros d’amende.

Mais l’ancien champion du capitalisme français veut croire que le tribunal sera convaincu par la “bonne foi” qu’il arbore depuis l’ouverture du procès.

S’agissant de son parachute doré, il estime n’avoir rien demandé à personne, ou presque.

M. Messier rappelle au tribunal avoir “explicitement refusé que (son) contrat de travail contienne des dispositions relatives à (ses) conditions de départ”.

C’était l’époque où dans son livre “J6M.com”, paru en 2000, le patron au faite de sa gloire s’engageait à ne “jamais négocier de golden parachute”.

Aussi, lorsque les administrateurs de VU exigent son départ, deux ans plus tard, pour redonner confiance aux marchés, Messier assure ne pas prendre l’initiative de demander des indemnités. Ce sont des administrateurs du groupe qui lui promettent de le “traiter honorablement”, raconte-t-il.

Un “Termination Agreement”, qui prévoit le montant de ses indemnités, est conclu le 1er juillet 2002.

A écouter Jean-Marie Messier, il s’agissait presque du cadet de ses soucis: “j’ai signé dans la nuit du 30 juin au 1er juillet ma démission irrévocable, indépendamment de ce qui allait advenir, sans aucune garantie” de toucher quoi que soit, martèle-t-il à plusieurs reprises.

Et cette démission, il l’a signée, “les yeux fermés”, parce qu’il en allait de l’intérêt du groupe.

A partir de ce moment, “je n’ai plus de pouvoir, plus d’initiative, je ne suis plus rien”, fait valoir encore M. Messier, suggérant qu’il aurait été bien en peine de réclamer quoi que ce soit à Vivendi.

Il le fera cependant le 3 juillet: inquiet que “l’agreement” ne soit pas soumis au conseil d’administration du groupe, il écrit à deux de ses membres qu’il a besoin de ces 20,5 millions “pour vivre”.

“Ce n’est pas la lettre d’un patron mais d’un homme paumé, perdu”, explique-t-il au tribunal.

Sans témoin, sans accusation -le parquet ayant requis un non-lieu dans ce dossier-, l’audience se résume souvent à un dialogue entre le président et le principal prévenu, rarement contredit.

M. Messier s’expliquera à partir de vendredi sur les accusations de communication trompeuse.