Divergences à l’Assemblée sur l’ampleur des mesures de régulation financière

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à l’Assemblée (Photo : Fred Dufour)

[10/06/2010 17:09:25] PARIS (AFP) L’Assemblée devait terminer jeudi soir l’examen du projet de loi de régulation bancaire et financière, censé traduire les engagements du G20, et qui prévoit d’encadrer une pratique très spéculative, alors que de nombreux députés veulent aller “plus loin” en l’interdisant.

“Pour la première fois, le projet de loi prévoit en France un cadre de régulation pour les ventes à découvert”, a déclaré la ministre de l’Economie Christine Lagarde.

La vente à découvert, qu’Angela Merkel et Nicolas Sarkozy veulent interdire, est une technique boursière qui permet à des opérateurs de marché de vendre des titres qu’ils ne possèdent pas encore, avec l’espoir de les racheter à un moindre prix. La vente à découvert dite “à nu” consiste à vendre un titre, avec un règlement différé, sans même l’emprunter.

“L’Autorité des marchés financiers (AMF) pourra dorénavant interdire les ventes à découvert en cas de circonstances exceptionnelles”, a souligné Christine Lagarde.

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ésident PS de la commission des Finances, Jérôme Cahuzac, le 16 octobre 2002 à Paris (Photo : Eric Feferberg)

“Je vous propose d’aller plus loin”, a lancé le président PS de la commission des Finances, Jérôme Cahuzac. “Je proposerai à notre Assemblée d’interdire la vente à terme et à découvert pour des titres de dette française et les produits d’assurance qui y sont attachés”, a-t-il poursuivi, en précisant que l’Allemagne venait de prendre une décision similaire.

L’amendement de M. Cahuzac a reçu la veille l’avis favorable de la commission des Finances, de même qu’un amendement quasi-identique de la députée UMP (villepiniste) Marie-Anne Montchamp.

Le débat devait avoir lieu dans l’hémicycle en début de soirée. Mme Lagarde devrait s’en tenir à sa position initiale, une interdiction en cas de circonstances exceptionnelles: “Je veux que nous puissions avancer en ordre européen. Je serai hostile à toute opération cavalier seul”, a-t-elle indiqué à l’AFP. “C’est le sens de la lettre Sarkozy-Merkel”.

Censé traduire en droit français des mesures de régulation après la crise, sur fond de procès Kerviel, le texte prévoit aussi de surveiller les agences de notation, qui évaluent la dette des Etats et des entreprises.

L’Autorité des marchés financiers sera chargée de les enregistrer et de les surveiller. Est aussi créé “un régime de responsabilité adapté pour les notations émises par ces agences”.

“L’AMF ne disposera que d’un seul équivalent temps plein par an pour réguler les agences de notation. On comprend qu’il n’y aura pas de régulation”, a déploré Jérôme Cahuzac, ajoutant que les agences -150 selon lui en plus des trois grandes- “ne seront soumises à aucune règle commune”.

Se déclarant “choquée”, Mme Lagarde est exceptionnellement sortie de ses gonds: “Je ne voudrais pas que l?on fasse prendre à l?ensemble de la représentation nationale des vessies pour des lanternes”.

Création d'”un conseil de régulation financière et du risque systémique”, renforcement des pouvoirs de l’AMF, nouvelle autorité du contrôle prudentiel…: toutes ces mesures n’ont pas trouvé grâce aux yeux de la gauche.

“Les Etats-Unis avancent, l’Europe réfléchit et la France attend”, a résumé Pierre-Alain Muet (PS).

“Les Etats-Unis ont deux textes en cours d?examen, l?un à la Chambre des représentants, l?autre au Sénat”, a répondu Mme Lagarde. “Il va donc se passer des semaines sinon des mois avant qu?un texte soit définitivement adopté”.

“Vous semblez l?espérer !”, lui a lancé un député PS, François Loncle. De nouveau piquée au vif, Mme Lagarde lui a demandé sèchement “de bien vouloir retirer ses propos”.