Saab : le phénix renait de ses cendres

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ège de l’entreprise à Trollhättan, en Suède, le 2 octobre 2008 (Photo : Olivier Morin)

[10/06/2010 17:10:12] TROLLHÄTTAN (Suède) (AFP) Il y a encore trois mois, les lumières des néons étaient éteintes, un silence de mort régnait dans le gigantesque hangar et le compteur des voitures construites affichait un désespérant zéro.

Aujourd’hui, après avoir échappé de justesse à la fermeture, la vie est revenue dans l’usine Saab de Trollhättan, dans le sud-ouest de la Suède, et les interminables chaînes de montages où s’activent les employés crachent inlassablement les berlines Saab 9-5, le premier nouveau modèle lancé par la marque au griffon depuis 2002.

“Cet hiver, nous ne pouvions plus produire quoi que ce soit, nous ne faisions que préparer la fermeture de l’entreprise”, rappelle Jan-Aake Jonsson, le patron de Saab, devant une large baie vitrée qui donne sur les ateliers.

“Maintenant, il y a une importante pénurie de voitures et il faut reconstituer les stocks”, dit-il. Derrière lui, les derniers employés finissent leur journée de travail tandis que le compteur rouge de la production quotidienne affiche “228”.

Après avoir repris la production fin mars, Saab s’apprête à augmenter de nouveau les cadences fin juin -passant de 28 voitures à 39 voitures par heure- ce qui nécessitera 200 nouvelles embauches, après une première vague de recrutements au printemps.

Voilà seulement quatre semaines que Magnus Ekman, 28 ans, a reçu un coup de téléphone de Saab lui proposant de revenir à l’usine.

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écembre 2009 à Trollhättan, en Suède (Photo : Adam Ihse)

“J’étais tellement content, tellement soulagé”, explique en vissant un boulon ce blond aux cheveux longs et aux oreilles percées, après un an de chômage et de petits boulots dans les industries de la région et jusqu’en Norvège.

Vendu environ 400 millions d’euros fin février au petit constructeur néerlandais Spyker et à son PDG au visage poupin Victor Muller, Saab entame depuis une nouvelle ère sous le signe de l’indépendance, après 20 ans dans l’orbite de General Motors durant lesquels il a périclité.

Au terme d’un interminable feuilleton pour la vendre, passant de l’échec d’un rachat par son compatriote Koenigsegg jusqu’à l’annonce de sa fermeture par GM, la marque au griffon, après des années de pertes, s’est vu offrir une dernière chance.

“Il y a vraiment un sentiment de revanche, nous voulons montrer qu’on peut le faire”, explique Anette Hellgren, qui dirige chez Saab le syndicat Unionen. “C’est assez unique qu’une entreprise survive à près d’un an de restructuration et de liquidation”, dit-elle.

“Nous avons vraiment envie d’y croire”, tranche Petra Störch, 37 ans dont 12 chez Saab, abandonnant un instant la chaîne de montage où elle supervise l’installation des boîtes de vitesses sur les Saab 9-3 et 9-5 qui défilent lentement sur le tapis roulant.

“C’était tellement pénible de voir tous les collègues être licenciés. Et ce n’était pas seulement nous, mais toute la ville qui souffrait, avec tous les fournisseurs”, explique la chef d’équipe aux couettes brunes, dont la mère a également travaillé ici 35 ans.

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à cheveux Saab lors d’un rassemblement de soutien au constructeur, le 17 janvier 2010 à Trollhättan, en Suède (Photo : Pontus Lundahl)

“Si Saab avait fermé, la ville aurait perdu une bonne moitié de ses habitants”, dit-elle.

Partout à Trollhättan, “Saab city” de 45.000 habitants, le soulagement domine d’avoir pu conserver le poumon économique de la région. Signe tangible: les prix des maisons ont recommencé à grimper.

A part Saab et ses quelque 3.500 employés, la ville ne peut guère compter que sur ses sites de tournage pour le cinéma et sur une usine du groupe Volvo.

Quand on leur demande ce qu’ils auraient fait si Saab avait mis la clé sous la porte, les employés soupirent en se grattant la tête. “Déménager”, répond l’une. “Un peu de mécanique”, veut croire Jan, 36 ans de Saab.

“Habiter à Trollhättan et ne pas travailler pour Saab, ça aurait juste été bizarre”, résume Katarina Erhardsson, 20 ans de maison.