La défiance entre banques oblige les banques centrales à rester mobilisées

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ésident de la BCE, Jean-Claude Trichet, le 8 juin 2010 à Luxembourg (Photo : Georges Gobet)

[12/06/2010 13:52:31] PARIS (AFP) Les tensions qui grippent depuis des semaines en Europe le financement des banques entre elles font planer une menace sur le crédit, voire sur la solidité du système financier, et contraignent les banques centrales à rester en alerte.

Le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet a admis jeudi que le marché interbancaire, sur lequel les banques se prêtent les unes aux autres, “ne fonctionne pas normalement, c’est clair”.

De sources concordantes, le phénomène concerne moins les grandes banques européennes que certaines banques de taille moyenne, notamment en Espagne.

A l’origine de ce mouvement de défiance, il y a plusieurs facteurs, et notamment les inquiétudes liées à l’opacité des comptes de ces établissements.

M. Trichet a récemment indiqué que les résultats de nouveaux tests de résistance (stress tests) menés sur les grandes banques européennes seraient bientôt communiqués aux ministres des Finances de l’Union.

Ces tests sont censés rendre compte de la capacité de résistance des établissements à des conditions économiques et financières extrêmes.

“Il y a probablement dans le système, notamment en Espagne, des banques qui se trouvent en situation de ne pas passer ces tests, estime Pierre Flabbée, analyste de Kepler Capital Markets.

Plusieurs gouverneurs de banques centrales en Europe sont favorables à la publication des résultats des tests, mais les oppositions sont très fortes, comme en Espagne.

“Le problème, c’est que si vous annoncez cela, vous les condamnez si vous n’avez pas immédiatement de plan de soutien”, résume M. Flabbée.

Sous pression, beaucoup d’établissements espagnols de taille moyenne, principalement des caisses d’épargne, se sont lancés dans de grandes manoeuvres de rapprochement.

D’autres éléments expliquent la nervosité du monde bancaire, notamment les volumes importants d’obligations d’Etats européens du sud (Grèce, Espagne, Italie et Portugal) que les banques détiennent en portefeuille.

L’agence de notation Moody’s a cependant contribué à calmer le marché vendredi en jugeant que les banques européennes avaient un niveau de fonds propres suffisant pour assumer des pertes éventuelles sur leurs créances publiques et privées en Grèce, au Portugal, en Espagne et en Irlande.

Cet accès de nervosité a incité la BCE à maintenir certaines des mesures de soutien exceptionnel aux banques prises lors de la crise. Les banques peuvent lui emprunter autant qu’elles le souhaitent ce qui leur garantie un accès au crédit quelles que soient les conditions de marché.

La BCE a déjà interrompu ses prêts illimités à un an et six mois. Elle comptait en faire de même pour les prêts à trois mois, mais a annoncé jeudi trois nouvelles opérations pour rassurer les marchés.

“Des banques s’inquiètent : mon Dieu, comment va-t-on faire pour vivre sans la BCE?”, observe une source bancaire sous couvert d’anonymat.

Les sommes déposées par les banques auprès de la BCE atteignent des records : 365 milliards d’euros, contre 138 milliards le 13 mai.

Pour autant, personne ne se risque à faire de comparaison avec la situation telle qu’elle était au lendemain de la chute de Lehman Brothers, avec un système bancaire au bord de l’implosion.

“La situation n’est pas aussi critique”, juge M. Flabbée.

“L’atmosphère va rester morose, mais pour peu qu’il n’y ait pas de nouveau choc, je ne vois pas de danger et on peut imaginer un retour de la confiance à la rentrée”, estime M. Peter Chatwell, stratégiste de Crédit Agricole-CIB.