La révision du système de change en Tunisie est retenue comme un préalable
majeur à la convertibilité totale du dinar (ouverture des comptes de capitaux).
Des groupes de travail réfléchissent, actuellement, sur la question au sein de
la Banque centrale (BCT) avec une assistance technique du FMI. L’objectif est de
conférer au système la souplesse requise et de mettre fin au régime de taux de
change fixe perçu comme incompatible et improductif avec l’ouverture des comptes
de capitaux.
Dans les années 90, les autorités monétaires tunisiennes avaient cherché à
aligner le taux de change effectif réel (TCER) sur les fondamentaux de
l’économie, à le stabiliser par des ajustements réguliers du taux nominal et à
ancrer cette politique sur leur objectif de moyen terme, en l’occurrence un taux
de change flottant.
Cette relative flexibilité du régime de change s’est traduite par une
dépréciation tendancielle du TCER, dépréciation alimentée par une détérioration
des termes de l’échange et par l’ouverture de l’économie sur l’extérieur.
Cette dépréciation a eu pour mérite de doper les exportations et de renforcer la
compétitivité des produits tunisiens à l’export.
Depuis l’an 2000, les autorités monétaires ont opté pour un flottement
«encadré», voire dirigé. C’est une étape intermédiaire qui devrait déboucher sur
l’objectif de régime de change flottant, de convertibilité totale du dinar et de
mobilité parfaite du capital.
Le résultat a été une dépréciation cumulée du dinar de 22% entre 2000 et 2008,
un recul de l’interventionnisme de la BCT.
L’euro, une des principales devises d’endettement d’investissement, s’échangeait
en 2001 à 1,2 dinar et, aujourd’hui, contre 1,840 dinar.
Une première échéance a été fixée pour la réalisation de cet objectif vers 2010
mais elle a été repoussée à 2014 en raison de
la crise financière et économique
mondiale. Signe de l’intérêt que le gouvernement tunisien porte à cette réforme,
elle est inscrite parmi les projets à réaliser dans le cadre du programme
présidentiel (2009-2014).
Cette réforme de la politique de change est, par ailleurs, fortement soutenue
par les deux bailleurs de fonds du pays : en l’occurrence la Banque mondiale et
le Fonds monétaire international (FMI).
Pour la Banque mondiale, «l’expérience a montré que les pays qui ont des régimes
de taux de change plus souples sont mieux outillés pour s’adapter aux chocs et
crises que les pays ayant des régimes de taux de change rigide».
Elle estime que «les coûts des ajustements aux chocs des termes de l’échange
sont considérablement plus élevés lorsque le taux de change est fixe (ou lorsque
le flottement de la monnaie est fortement dirigé) que lorsqu’il est flottant».
Pour le FMI, autre partenaire impliqué dans cette réforme, la flexibilité de
change est «un package» qui suppose la mise en place, en partenariat avec la BCT,
d’une logistique appropriée (banques de données, veilles, formation de
ressources humaines) et la réalisation concomitante et progressive de trois
objectifs. La libéralisation du compte capital, le flottement du dinar et le
passage au ciblage de l’inflation.
En attendant, particuliers et chefs d’entreprise continueront à bénéficier de
«la convertibilité courante à la tunisienne», instituée depuis le 27 décembre
1992. Celle-ci consistait en une ouverture partielle et simultanée de la balance
commerciale des paiements et de la balance commerciale. Une telle voie n’avait
encore jamais été explorée auparavant, et ne figurait dans aucun modèle
théorique.
Effectivement, si on se réfère aux statuts du FMI,
la convertibilité courante du
dinar tunisien n’est ni limitée ni totale. Elle se place à mi-chemin entre ces
deux paliers : elle constitue une étape dans la mesure où elle est courante et
concerne les affaires courantes définies par le Fonds comme étant «les paiements
qui n’ont pas pour objet les transferts de capitaux».
Il s’agit des transactions liées au commerce extérieur : import-export,
assistance technique, frais de voyages, représentations commerciales.
Toutefois, les mesures décidées vont au-delà de simples opérations courantes et
touchent à une partie des opérations en capital. Il s’agit notamment du
transfert illimité et libre non seulement des investissements mais également du
capital et des plus-values sur capital au titre des investisseurs étrangers.
Autre opération en capital, l’autorisation donnée aux exportateurs tunisiens
d’investir à l’étranger dans des opérations liées à leurs activités.
A la faveur de la
convertibilité courante du dinar, le simple tunisien peut
disposer, sans aucune autorisation préalable, de devises nécessaires à ses
besoins, que ce soit pour commander à l’étranger un livre et toute autre
publication, pour solliciter une expertise ou toute autre assistance technique
étrangère sophistiquée.
Les chefs d’entreprises peuvent, quant à eux, voyager dans de meilleures
conditions (augmentation continue des frais de voyage), importer en toute
liberté des biens d’équipement et investir à l’étranger et s’endetter dans les
limites bien déterminées.