Dimanche 20 juin 2010, les ministres de l’Energie de Tunisie, d’Algérie et du Maroc ont signé la “Déclaration d’Alger” dans laquelle ils (ré)affirment leur volonté de mettre à profit «les possibilités offertes par la coopération bilatérale et multilatérale entre leurs pays respectifs et l’Union européenne afin de mener à bien les réformes et de développer leurs secteurs énergétiques nationaux». Cette déclaration, fruit de la première réunion du Conseil ministériel du projet d’intégration progressive des marchés de l’électricité de ces trois pays dans le marché intérieur de l’électricité de l’Union européenne, a vu les ministres maghrébins engagés à poursuivre «les actions visant l’harmonisation des cadres législatifs et réglementaires, et des conditions techniques et économiques pour la création d’un marché viable de l’électricité dans et entre les trois pays du Maghreb et son intégration à celui de l’Union européenne». Dans ce sens, ils ont appelé les autorités de régulation à «présenter un projet de méthodologie commune pour la tarification transfrontalière et d’accès aux infrastructures de transmission de l’électricité, en référence aux principes utilisés dans l’UE».
Le plan d’action à moyen terme (2010-2015) adopté met l’accent sur la nécessité de faciliter le financement des infrastructures énergétiques et sur l’importance du développement des énergies nouvelles et renouvelables, la promotion de l’efficacité énergétique et la préservation de l’environnement. Il s’inscrit dans le cadre de l’exécution du protocole de Rome signé en 2003 par les trois pays maghrébins et la Commission européenne, visant à mettre en place une base pour un marché intégré de l’électricité.
Projet Desertec
M. Oettinger, commissaire européen, rapportait lors d’une conférence de presse : «Le partenariat dans le domaine du pétrole et du gaz va être complété par une nouvelle dimension : les énergies renouvelables. Les pays du Maghreb vont produire de l’énergie solaire. L’électricité produite par ces moyens sera non seulement utilisée dans le Maghreb, mais également en Europe. Hier, nous avons parlé d’un projet-pilote très concret. On doit réaliser un nombre important d’infrastructures (des centrales solaires) du Maroc jusqu’au Moyen-Orient, d’un côté, et, de l’autre, du Portugal à la Grèce. Pour créer cet espace, il faut créer des infrastructures très modernes, très puissantes. C’est un défi au niveau politique, au niveau économique».
Clairement politique, d’ailleurs, la ministre marocaine de l’Energie a prôné une plus grande liberté d’accès des pays maghrébins producteurs d’électricité solaire au marché de l’UE, soulignant ainsi que le partenariat euro-méditerranéen dans le domaine de l’électricité exigeait de l’UE un plus grand effort dans les transferts de technologie et une plus grande ouverture de ses marchés aux produits du Sud. Rappelons pour exemple que le groupe algérien Sonelgaz s’était fait interdire, en 2009, l’entrée sur le marché espagnol en tant que producteur d’électricité et agent commercial.
En termes économiques, le ministre de l’Energie et de l’industrie tunisien, M. Afif Chelbi, a souligné qu’il était nécessaire de clarifier les modalités d’achat de ces énergies renouvelables.
Pour le commissaire européen, le projet ‘Desertec’ à 400 milliards d’euros, qui vient en connivence du marché électrique intégré, est un projet privé d’intérêt public : «initié par de grandes sociétés européennes spécialisées en électricité (allemandes, françaises, espagnoles et italiennes), il sera complété par une participation des pouvoirs publics (de l’UE) pour arriver à sa réalisation technique et financière». Mais «tout reste encore à faire, de la planification jusqu’au financement»
Perspectives maghrébines
Bien avant de réfléchir à la mise en œuvre de ce projet ambitieux, est-il nécessaire de rappeler qu’à ce jour, les interconnexions électriques maghrébines représentent seulement 1% des capacités de production globales du Maghreb ? Qu’en sera-t-il donc du différentiel des prix de l’énergie dans ces 3 pays, en cas de marché intégré ? L’harmonisation de la tarification dans les échanges commerciaux d’électricité maghrébins tirera-t-elle les prix nationaux vers le haut comme redouté ?
– Tous les articles sur
Energies renouvelables