L’Allemagne en campagne pour défendre sa politique économique avant le G20

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ère allemande Angela Merkel, le 22 juin 2010 à Berlin (Photo : Barbara Sax)

[24/06/2010 15:12:03] BERLIN (AFP) Accusée aux Etats-Unis de ne pas en faire assez pour soutenir la croissance mondiale, l’Allemagne a déclenché un tir de barrage jeudi pour défendre sa politique de rigueur à la veille du sommet du G20.

La chancelière Angela Merkel s’est adressée directement aux Américains, dans les colonnes du quotidien économique Wall Street Journal. Son ministre des Finances Wolfgang Schäuble signe une lettre dans le Financial Times.

Mme Merkel a dit jeudi, juste avant de s’envoler pour le Canada, s’attendre à “des débats fructueux mais aussi des controverses” sur la question des finances publiques.

“Nous, les Européens et en particulier en Allemagne, sommes d’avis que réduire les déficits est indispensable (…) pour une croissance durable à laquelle nous voulons tous parvenir”, a-t-elle ajouté lors d’une brève allocution à Berlin.

C’est cette priorité accordée aux considérations budgétaires que les Etats-Unis reprochent à la première économie européenne, la seule à leurs yeux qui pourrait se permettre des mesures de relance, parce qu’elle est moins endettée que la France ou la Grande-Bretagne par exemple.

Par la voix de son secrétaire d’Etat aux Finances Timothy Geithner en visite à Berlin, puis de son président Barack Obama dans un courrier aux membres du G20, Washington a exprimé sa claire préférence pour une politique de soutien à la conjoncture plutôt que l’orthodoxie budgétaire à l’allemande.

L’investisseur George Soros, basé aux Etats-Unis, est allé encore plus loin dans un discours mercredi à Berlin. “La politique économique allemande est une menace pour l’Europe”, a-t-il jugé, n’hésitant pas à prédire la fin de l’euro et “un danger pour la démocratie” pour cause d’excès allemand de vertu.

Des critiques qui “ignorent les réalités en Europe”, commente la Commerzbank dans une note, car pour les Européens “les limites de la politique de soutien à la conjoncture sont atteintes”.

L’Allemagne veut économiser plus de 80 milliards d’euros d’ici 2014. Le Royaume-Uni, l’Espagne ou encore l’Italie aussi ont annoncé des cures d’austérité. Mais c’est bien à Berlin que s’adresse la critique de Washington parce que l’Allemagne aurait les moyens, plus que les autres, de choisir une autre voie.

Sa dette représente quelque 73% de son Produit intérieur brut (PIB), contre 83% pour les Etats-Unis ou 116% pour l’Italie pare exemple.

De plus, Berlin a reconnu que le déficit budgétaire structurel serait cette année d’environ 15 milliards d’euros inférieur aux prévisions.

Mais pour l’Allemagne, toute dette est une dette de trop. Parce que, explique la chancelière aux lecteurs américains, “le citoyen est plus disposé à dépenser de l’argent s’il sait qu’il peut compter sur sa retraite, son assurance santé”.

En outre “il ne saurait être question d’un coup de frein brutal (au soutien de la croissance)”, argumente son ministre M. Schäuble, les mesures de rigueur annoncées pour 2011 ne représentant que 0,5% du PIB allemand.

Au-delà du débat sur la gestion budgétaire, les critiques soulèvent la question de la puissance exportatrice allemande.

Comme la ministre française de l’Economie avant lui, M. Obama s’inquiète de “la demande des ménages faible et de la dépendance aux exportations de pays qui ont déjà de larges excédents commerciaux”, visant clairement le vice-champion du monde des exportations, à la consommation chroniquement déprimée.

A cet argumentaire Mme Merkel oppose sa réponse classique: “les succès allemands à l’export reflètent la compétitivité et la force d’innovation des entreprises allemandes”.