«Nous sommes attachés à nos relations avec l’Union européenne, mais nous
devons diversifier nos relations en direction des USA et de l’Asie, affirme le
président de l’UTICA. Convaincu que parce que les Américains ont d’autres
centres d’intérêt, il ne faut pas s’imaginer qu’ils vont venir vers nous. C’est
à nous, qui sommes demandeurs, d’aller les chercher».
Sur la table, en particulier depuis la création de la Tunisian American Chamber
of Commerce (TACC), en 1989, la question des relations économiques et
commerciales de la Tunisie avec les Etats-Unis est plus que jamais d’actualité.
Les Tunisiens veulent faire du business avec les Américains, cela est évident.
Pour un pays dont l’économie est fortement dépendante des exportations, vouloir
s’ouvrir un nouveau marché constitue une lapalissade.
Les relations économiques tuniso-américaines n’en sont pas au degré zéro.
Quelques dizaines d’entreprises américaines sont implantées en Tunisie. Quelques
sociétés tunisiennes exportent déjà sur le marché américain et une au moins est
en train d’étudier la possibilité d’une implantation.
Les importations tunisiennes des Etats-Unis ont triplé à plus de 502 millions de
dollars entre 2002 et 2008. Ses exportations ont quant à elles été multipliées
par six à 644 millions $ durant la même période. Toutefois, les échanges
réalisés par la Tunisie avec les USA ne représentent que 3% de son commerce.
«Il n’y a pas de tradition d’échanges avec les Etats-Unis», constate Nazeh Ben
Ammar, président de la TACC en ouverture du déjeuner-débat organisé mercredi 23
juin pour faire réfléchir M. Hédi Djilani, président de l’UTICA, M. Gordon Gray,
ambassadeur américain à Tunis, et un parterre d’hommes d’affaires, avocats,
journalistes et universitaires sur les opportunités qu’offrait le marché
américain. «Les USA constituent une manne pour les exportateurs, importateurs et
investisseurs tunisiens», assure le président de la TACC. Mais des opportunités
qui ne sont pas encore saisies.
«Les Etats-Unis constituent pour nous un challenge très important», confirme le
président de l’UTICA. Car même si les deux pays «ont des relations stratégiques
vieilles de plus de deux siècles –nécessaires pour le développement de relations
économiques», la Tunisie souffre d’une image qui la dépeint comme un pays «dans
le giron de l’Europe».
Certes, «géographiquement cela est vrai», observe M. Djilani. «Nous sommes
attachés à cette partie du monde, mais nous devons diversifier nos relations en
direction des USA et de l’Asie». Le patron des patrons ne se fait pas
d’illusions à ce sujet : «L’Amérique ne remplacera jamais l’Europe. L’Union
européenne restera toujours un partenaire important, mais il faudra diluer cette
importance», recommande M. Djilani.
Mais les Etats-Unis sont «un marché particulier, différent de l’Union européenne
et unique. Il s’attache aux prix, n’est pas fidèle et peut changer de
fournisseur sans état d’âme», analyse l’invité du déjeuner-débat de la TACC. En
outre, «on ne peut pas gagner le pari de l’exportation en direction du marché
américain sans un effort sur la qualité et les prix».
Alors, à qui la faute si pour l’instant les contacts entre businessmen et
entreprises des deux pays sont très peu nombreux ? Un peu aux deux parties,
selon le président de l’UTICA.
D’un côté, «les USA ne sont pas dans le spectre des hommes d’affaires
tunisiens». De l’autre, «lorsqu’on s’adresse à une entreprise américaine, elle
oriente vers son bureau ou sa filiale en Europe». Ce que conteste, Hédi Djiilani.
«La maîtrise de la langue anglaise ne posant plus de problème en Tunisie, on ne
peut plus nous dire qu’on ne peut exporter directement des Etats-Unis vers le
marché tunisien car il faut franciser la documentation, soutient le président de
l’UTICA. D’autant que les Etats-Unis ont pour plus d’une raison intérêt à
s’intéresser à la Tunisie et au Maghreb. Une des plus importantes tient au fait
que toute entreprise américaine en Tunisie peut bénéficier de ses accords avec
les autres pays de la région.
Outre l’artisanat, le président de l’UTICA pense que notre pays est intéressant
pour les entreprises américaines du secteur de l’agroalimentaire et en
particulier celles spécialisées dans la confection des plats cuisinés –une
activité qui «se développe» en Tunisie. Pour elles, la Tunisie peut devenir «une
base arrière en direction du marché européen».
Toutefois, «parce que les Américains ont d’autres centres d’intérêt, il ne faut
pas s’imaginer qu’ils vont venir vers nous. C’est à nous, qui sommes demandeurs,
d’aller les chercher», insiste
Hédi Djilani. Et ils devront désormais le faire
dans un contexte différent de celui qui semblait se dessiner il y a deux ans :
un Free Trade Agreement (FTA) qui n’est plus aujourd’hui à l’ordre du jour car
le Congrès américain a mis fin au mandat donné au chef de la mission pour en
négocier l’établissement avec certains pays, dont la Tunisie. «L’idée est plutôt
aujourd’hui d’œuvrer au développement de la coopération et des investissements»
dans le cadre de textes déjà en vigueur, souligne l’ambassadeur Gordon Gray.