Tunisie : Nécessité de pousser davantage l’intégration avec les pays MENA

Les observateurs de l’économie tunisienne sont unanimes : «la Tunisie n’exploite
pas assez tous les bénéfices d’une intégration plus poussée dans son
environnement régional et continental». L’intégration, voire l’accès à de
nouveaux marchés, est retenue, ici, comme un puissant levier de progrès
technique, d’accroissement de la productivité et de développement des
exportations. La Tunisie, à travers son intégration à l’espace Euromed, depuis
1995, en a, pourtant, récolté des fruits.

mena-1.jpgSon Accord d’association avec l’Union européenne (UE) -et son corollaire,
l’ouverture du marché local à la concurrence- a mis la pression sur les
entreprises tunisiennes et les a amenées, pour survivre, à se mettre à niveau, à
innover, et surtout, à améliorer leur productivité.

En prime, la Tunisie a intégré, dans les délais (janvier 2008), la zone de
libre-échange Euromed pour les produits manufacturés. L’économie tunisienne peut
en récolter davantage de profits pour peu qu’elle décide de conquérir les
marchés de la région du Moyen-Orient-Afrique du Nord (MENA) et de l’Afrique
Sub-saharienne.

D’après les projections de développement dans le monde, l’Afrique est identifiée
comme l’un des marchés à fort potentiel de développement pour l’année 2010.

Selon la Banque africaine pour le développement (BAD), le besoin annuel
d’investissement dans l’infrastructure sur le continent africain se situe entre
80 et 100 milliards de dollars.

Plusieurs facteurs encourageants militent en faveur de toute initiative que
prendront les entreprises tunisiennes en vue de pénétrer ces marchés.

Parmi ces facteurs figurent la disponibilité en Tunisie d’un important secteur
off shore exportateur, l’orientation vers l’ouverture du compte capital
(convertibilité totale porteuse d’opportunités pour l’internationalisation des
entreprises tunisiennes) et la croissance, ces dix dernières années, des
exportations tunisiennes vers l’Afrique et les pays du MENA à un rythme
supérieur à celui des exportations vers l’Europe.

Quelques chiffres : les exportations tunisiennes vers les pays d’Afrique
subsaharienne sont passées de 169 MDT en 2005, à 408,5 MDT en 2009. Quant aux
importations, elles sont passées, au cours de la même période, de 88 MDT à 105,5
MDT. La Tunisie exporte, principalement, sur l’Afrique, des produits
agroalimentaires, textiles et mécaniques et électriques.

Autre facteur non moins important : la volonté des pouvoirs publics tunisiens
d’aller de l’avant sur cette voie et de conquérir ces marchés.

Intervenant au cours d’un récent séminaire sur «le rôle des accords bilatéraux
et multilatéraux dans le

développement des exportations
»,
Kamel Morjane, ministre des Affaires étrangères, a réaffirmé «le souci de la
Tunisie de diversifier ses partenaires économiques et de renforcer son
intégration dans les espaces d’appartenance régionale et internationale».

Pour les bailleurs de fonds partenaires de la Tunisie, le principal défi que les
entreprises tunisiennes se doivent de relever dans leur quête de nouveaux
marchés est non seulement de pénétrer les nouveaux marchés en dehors de l’UE
mais de s’y implanter durablement.

La Banque mondiale
propose une stratégie de pénétration en cinq points (Rapport
: Vers une croissance tirée par l’innovation, janvier2010).

Il s’agit, en premier lieu, de réduire les barrières non tarifaires (entrave
très forte à l’intégration de la région MENA). «La Tunisie, forte d’un des
tissus économiques les plus diversifiés et compétitifs de la région, est
potentiellement le plus grand gagnant d’une réduction régionale des barrières»,
note la Banque.

L’autre piste à explorer consiste en la mise en place d’un système de
financement du commerce avec les pays de la région MENA et de l’Afrique
subsaharienne. «Ceci implique, aux yeux de la Banque, une ouverture de
succursales bancaires ou joint-ventures financières avec ces régions ainsi que
l’adaptation de la réglementation en matière de caution et de change».

Autre proposition de la Banque : la conclusion d’accords de libre-échange avec
des entités régionales en Afrique subsaharienne telles que l’Union Economique
Ouest africaine (UEMOA
– ,
un marché de 72 millions d’habitants) et le Marché commun d’Afrique orientale et
australe (COMESA, un marché de 350 millions d’habitants). De tels accords
permettraient de stabiliser les conditions du commerce pour les opérateurs
économiques.

Les deux derniers points concernent les liaisons de transport maritime et
aérien. L’institution de Brettons Wood suggère la conclusion d’accords
Open Sky
avec les pays de la Ligue des Etats arabes car elle estime que l’accord avec
l’UE ne suffit pas à lui seul de rentabiliser cette libéralisation du ciel
tunisien. Elle suggère, également, de coordonner avec les groupements régionaux
ciblés la mise en place de liaisons maritimes directes. L’absence de liaison
maritime directe avec l’Algérie, le Maroc et les pays d’Afrique subsaharienne
constitue un handicap sérieux pour le développement du commerce régional.