Déficits : Bruxelles veut suspendre les aides agricoles des pays laxistes

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économiques et monétaires Olli Rehn lors d’une conférence de presse à Busan le 5 juin 2010 (Photo : Kim Jae-Hwan)

[29/06/2010 19:02:37] BRUXELLES (AFP) La Commission européenne va proposer mercredi de nouvelles sanctions financières contre les Etats de l’UE trop laxistes sur le plan budgétaire, incluant la suspension de subventions aux agriculteurs, aux pêcheurs et aux régions, selon une source proche du dossier.

Le document préparé par le commissaire aux Affaires économiques et monétaires Olli Rehn se veut une contribution aux efforts en cours en Europe, depuis l’éclatement de la crise de la dette, pour améliorer la gouvernance économique et renforcer la discipline budgétaire commune.

L’idée est d’avoir “une palette plus large de sanctions”, de les utiliser de manière préventive et de “démarrer plus tôt” que jusqu’à présent, selon un projet de document encore susceptible de modifications obtenu par l’AFP.

Actuellement, le Pacte de stabilité européen, qui limite en principe à 3% du PIB le déficit public annuel des Etats, est jugé largement inefficace. Il prévoit certes des amendes dans la zone euro, mais à un stade tellement ultime que cette sanction n’a jamais été décidée.

A l’avenir, la Commission suggère que des Etats trop dépensiers soient contraints à un stade assez précoce à une épargne forcée temporaire, via le dépôt de certaines sommes sur un compte rémunéré bloqué.

Les Etats trop laxistes pourraient en outre se voir priver de subventions de l’UE dans le secteur agricole, de la pêche et des aides aux régions défavorisées (Fonds de cohésion), selon le projet de la Commission.

Dans un premier temps, ils seraient mis en garde avec une suspension de paiements à venir dans le cadre de programmes courant sur plusieurs années. Une manière de leur donner une chance de corriger le tir.

Mais s’ils ne font rien pour ramener leurs déficits dans les clous du Pacte, “cela impliquerait l’annulation des engagements budgétaires et la perte définitive des paiements”, souligne le texte.

Pour ne pas pénaliser toutefois les destinataires finaux des aides européennes, tels les agriculteurs, “les Etats devraient continuer à verser les subventions” sur leurs propres deniers, “sans être remboursés par le budget de l’UE” comme c’est le cas actuellement.

La Commission, comme elle l’avait déjà annoncé, veut aussi pouvoir examiner de manière précoce les projets de budget nationaux, au printemps de chaque année. Elle souhaite aussi renforcer la surveillance de la dette des Etats, en les punissant de la même manière que pour leurs déficits annuels.

Ces propositions doivent alimenter des travaux en cours, menés par les ministres européens des Finances sous la houlette du président de l’UE Herman Van Rompuy et censés aboutir à des propositions concrètes en octobre.

Berlin et Paris sont favorables à une autre idée de sanction, la suspension des droits de vote dans l’UE pour les pays trop laxistes. Mais elle ne fait pas l’unanimité. La Commission n’en fait pas mention car il s’agit d’une mesure nécessitant un changement du traité européen, et donc de longue haleine.

Reste aussi à déterminer qui déciderait des éventuelles nouvelles sanctions. Actuellement, ce sont les Etats qui décident ou non de se pénaliser.

La Banque centrale européenne (BCE) plaide elle pour l’instauration à l’avenir d’une “quasi-automaticité” des sanctions en cas de dérapages trop importants, une innovation soutenue par la Belgique qui assume à partir de jeudi la présidence tournante de l’UE.

“Si l’on veut donner une certaine automaticité au processus, il ne serait pas anormal que la Commission ait une capacité d’action pour certaines sanctions. A défaut, on ne modifiera pas les comportements”, a souligné un haut responsable gouvernemental belge sous couvert de l’anonymat.