Du bonheur, du ravissement, de la satisfaction, des joies mais également des larmes, et pas mal de déceptions. Des émotions mitigées mais bienfaisantes suscitées par la finale de la compétition Sife qui a eu lieu jeudi 1er juillet 2010, une première en Tunisie.
L’équipe gagnante est celle de l’Institut supérieur des Beaux-arts de Tunis (ISBAT) pour son projet “Eco-design”. Pour ces jeunes, ce n’est pas le projet, c’est plutôt «une philosophie de vie». Grâce à des matériaux de récupération, ils créent des objets de décoration, des meubles presque pour rien, et dans le même temps, ils forment des jeunes chômeurs vivant dans des situations précaires à vivre du travail de leurs mains.
Ceux qui n’ont pas gagné, les “perdants” . Mais le sont-ils réellement ? «Vous ne perdrez jamais dès le moment où vous croyez aux possibilités d’une vie meilleure», a estimé Jonas Atingui, responsable du programme SIFE en Afrique. Car ces étudiants, qui se sont démenés pour réaliser des projets qu’ils ont imaginés, conçus, montés et modestement financés en recourant au sponsoring et parfois en puisant même dans leurs poches, ne peuvent être perçus comme des perdants…Oui ceux qui ont reçu «l’extrême onction» partiront à Los Angeles et participeront à la compétition internationale, mais est-ce à dire que les autres sont moins méritants ?
En fait, tous ceux qui se sont intégrés dans le programme Sife en sont sortis grandis, n’en déplaise aux mauvais perdants, ceux qui ne sont pas habitués aux concours et encore moins aux compétitions. En somme, les mauvais joueurs. Et il ne s’agit pas là d’encenser le programme en lui-même, mais plutôt de rappeler, à ceux qui ont fait rapidement de l’oublier, que grâce à ce programme, des étudiants qui n’avaient aucun lien avec leurs réalités sociale, entrepreneuriale, économique et environnementale ont redécouvert les vertus de la créativité, de l’innovation, de la générosité, de l’altruisme et celle de l’entrepreneuriat responsable et citoyen.
Ils ont pu se distinguer par leur habilité à mettre dans la pratique des principes et des critères qui ne leurs étaient pas très familiers voire ce qu’ils étaient capables de faire. Comment pouvaient-ils, eux jeunes étudiants aux moyens limités, œuvrer à changer les choses et même les personnes? Ce qui n’est pas une tâche facile. Et voir les jeunes de l’Ecole des Sciences et Techniques de Tunis (ESSTT), soucieux de transparence et d’éthique dans les affaires, s’engager à former les commerçants de la rue d’Athènes ou de Hammam Lif aux bonnes pratiques dans la gestion des petites structures entrepreneuriales, représente incontestablement une victoire pour le programme.
«L’enjeu est important, a déclaré, à l’occasion, Hédi Djilani, président de l’UTICA. Des milliers de jeunes diplômés attendent leur premier emploi, des programmes comme Sife qui développent l’entrepreneuriat au sein de l’université et œuvrent à résorber le chômage ne peuvent que servir la cause du pays; ils ont une dimension communautaire indéniable».
«We can make the change» (nous pouvons changer les choses), c’est la devise de toutes les équipes SIFE et les présents à la finale de la compétition nationale, qu’ils soient de simples invités ou membres du jury, ils ont pu mesurer à leur juste valeur l’enthousiasme et l’amour avec lesquels elles se sont toutes engagées dans la mise en place et la réalisation de leurs projets.
Que le meilleur gagne
Un bain de jouvence, c’est le sentiment qu’on avait à se voir entourés d’autant de jeunes porteurs d’idées et de projets. «Vous êtes le meilleur de la Tunisie et le meilleur de la Tunisie, c’est vous», a déclaré Rifaat Chaâbouni, secrétaire d’Etat à la Recherche scientifique en s’adressant aux étudiants présents. Ceux-là même qui se sont distingués par leur intelligence, leur sagesse et toute la sincérité et la passion de leur âge pour aller au bout de leurs projets bravant la fatigue, parfois la résistance de leurs vis-à-vis directs et les moyens matériels limités.
Ceux qui ont attendu que deux équipes de 52 juges, évaluent, jaugent et jugent leurs projets, les interrogent et les questionnent, essayant de répondre, des fois maladroitement et d’autres avec assurance et force conviction.
Que le meilleur gagne, a déclaré haut et fort Slim Ben Ammar, président du Centre des jeunes dirigeants (CJD) dans l’allocution qu’il a prononcée à la clôture de la compétition en insistant sur la foi du CJD dans l’université «cœur de ses priorités». «C’est dans ce dessein que nous abritons depuis 2009 au CJD le Programme SIFE, qui constitue une initiative mondiale pour la promotion de l’esprit entrepreneurial au sein de l’université», en ajoutant que «le programme SIFE vise à permettre aux étudiants de mettre en œuvre des projets concrets à caractère communautaire, des projets où ils prêtent main forte à ceux et à celles pour qui la vie n’est pas tous les jours ce qu’elle devrait être. L’objectif étant d’accompagner ces personnes ou ces entreprises à travers le puissant levier de l’innovation et de l’
Entreprenariat».
Nous sommes tous entrepreneurs du projet SIFE, précisera par la suite le président du CJD qui a rappelé que l’entrepreneuriat est le fruit d’une interaction entre l’individu et son milieu.
SIFE œuvre à sculpter le caractère des futurs entrepreneurs, il les encourage à adopter des valeurs telles croire en ce en quoi on s’investit et on investit, il les incite à mener des projets qui ont une âme et des dimensions humaines et citoyennes. Ces valeurs font partie de notre culture, elles ne nous sont pas étrangères. Il fallait tout juste que quelqu’un ou quelque chose déclenche le processus. Aujourd’hui, c’est fait et c’est mené d’une main de maître grâce, en grande partie, à la coordinatrice de Sife Tunisie, Khaoula Boussemma.
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