Birmanie : Total et Chevron accusés d’aider l’ambition nucléaire de la junte

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à la presse les installations d’un gazoduc à Nat-En-Tong, à la frontière entre la Birmanie et la Thaïlande, le 28 novembre 2003 (Photo : Pascale Trouillaud)

[05/07/2010 12:35:18] PARIS (AFP) Une ONG américaine, EarthRigthts International, a accusé lundi les compagnies pétrolières présentes en Birmanie, dont la française Total et l’américaine Chevron, d’alimenter par les revenus du gaz les ambitions nucléaires de la junte et de se rendre complices de crimes.

Pour EarthRigthts International (ERI), de 1998 à 2009, les revenus du champ gazier de Yadana s’élèvent à plus de 9 milliards de dollars, dont plus de la moitié a été attribuée à la junte au pouvoir, “soutenant un régime qui a commis depuis des décennies de nombreuses atteintes aux droits de l’homme et finançant un programme clandestin d’acquisition de l’arme nucléaire”.

Le champ gazier de Yadana (“trésor” en birman), situé dans le sud de la Birmanie, est détenu à 31% par Total, 28% par Chevron, 25% par la compagnie thaïlandaise PTTEP et 15% par l’entreprise birmane MOGE.

Sur les 4,599 milliards de dollars encaissés par la junte, “915 millions l’ont été en nature sous forme de gaz naturel à usage local, le reste ayant été versé en liquide”, a souligné ERI dans un rapport publié à Paris.

ERI affirme que ces revenus gaziers représentent un moyen de pression internationale pour empêcher la junte, soupçonnée de vouloir acquérir l’arme atomique, de développer ces ambitions nucléaires. L’ONG suggère “des restrictions de l’accès du régime aux marchés internationaux des capitaux et le gel des avoirs concernés”.

“Compte tenu des preuves apportées des ambitions nucléaires de la Birmanie, de son commerce illégal d’armes avec la Corée du Nord (…), la communauté internationale doit se concentrer sur ce qui constitue le nerf de la guerre pour les généraux birmans, leurs revenus gaziers”, affirme ERI.

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ésentation du champ gazier de Yadana en Birmanie où sont présents Total et Chevron

L’ONG a aussi renouvelé ses accusations contre Total et Chevron qui encourent, selon elle, “un risque bien réel de voir leur responsabilité pénale engagée” dans leurs pays respectifs à propos d’assassinats ciblés commis par des militaires assurant la sécurité des installations gazières. Elle pointe aussi du doigt le recours au travail forcé des populations.

EarthRigthts International “ne milite pas pour un départ de Total, Chevron ou PTTEP de la Birmanie, mais pour que justice soit rendue aux victimes des violations des droits de l’homme et pour que les revenus issus des ressources naturelles birmanes soient partagées de manière responsable et bénéficient au peuple birman”, souligne l’ONG.

L’ONG, qui affirme que Total a refusé de la recevoir, met aussi en cause la banque française BNP Paribas.

“D’après des informations datant de 2003, la banque française BNP Paribas est impliquée dans le projet: à travers BNP Paribas Jersey trust, basé dans les îles anglo-normandes, qui est utilisé comme agent payeur par Total. Et de hauts responsables de la junte birmane possèdent des comptes à la branche de Singapour de BNP Paribas”, a assuré un responsable d’ERI, Matthew Smith, au cours d’une conférence de presse, à Paris.

EarthRights International est une organisation américaine qui s’intéresse depuis 1994 aux violations des droits de l’homme en relation avec des projets gaziers en Birmanie.

Le pays est dirigé par des militaires depuis 1962. La junte a promis avant la fin de l’année des élections législatives, qui seraient les premières depuis celles remportées haut la main en 1990 par la Ligue nationale pour la démocratie (LND) de l’opposante Aung San Suu Kyi, toujours assignée à résidence.