Il faut accorder l’autonomie aux universités «car on ne peut pas gérer l’enseignement supérieur à partir du bureau du ministère de tutelle, estime l’universitaire Abderrazak Zouari.
Le système éducatif tunisien, en général, et universitaire, en particulier, est malade. Abderrazak Zouari en est convaincu et en a fait la démonstration lors de l’atelier «enseignement supérieur : financement, gouvernance et gestion», dans le cadre du Forum 2010 de l’ATUGE qui, le 30 juin dernier, a traité d’un sujet brulant : «Education, employabilité : comment nous préparer aux enjeux de demain ?».
«Le système universitaire est centralisé. C’est le ministère qui décide de tout. C’est un système cloisonné», assène d’entré de jeu cet enseignant universitaire, économiste et ancien directeur de l’Ecole supérieure du commerce de Tunis.
Gérée encore «comme lorsqu’il n’avait que 20.000 étudiants», le système universitaire «a amélioré ses ratios internes –mais pas ses performances externes- en jouant sur le système d’examen et de notation», observe l’universitaire.
L’université tunisienne a connu, depuis 20 ans, une série de réformes qui «se sont superposées» et ont été «appliquées avec le même système de gouvernance», analyse Abderrazak Zouari.
La dernière réforme en date est celle consistant à instaurer le système LMD (Licence Master Doctorat) et qui souffre, elle aussi, d’après M. Zouari, d’une anomalie. «On a instauré le système LMD et on a maintenu les départements thématiques», note le conférencier. Qui estime que «nous sommes aujourd’hui devant des lignes de fracture qui devront être résolues. Ces lignes passent entre l’administration centrale et celle de l’établissement, entre la première et les enseignants qui ne participent pas à l’élaboration des réformes, etc.».
Pour sortir de cette situation, Abderrazak Zouari formule cinq propositions.
– Premièrement, «il faut créer une instance de réflexion sur le système éducatif tunisien».
– Deuxièmement, «il faut se poser la question sur la capacité de la Tunisie à donner de l’emploi».
– Troisièmement, accorder l’autonomie aux universités «car on ne peut pas gérer l’enseignement supérieur à partir du bureau du ministère de tutelle. Le ministère agrée les diplômes, mais il faut laisser les universités les créer «pour susciter la concurrence» entre elles.
– Quatrièmement, il faut introduire l’évaluation et l’auto-évaluation –c’est pour cela que l’octroi de l’autonomie aux universités est une nécessité-, car «la qualité ce n’est pas seulement celle des programmes, mais également des personnels et des équipements».
Enfin, Abderrazk Zouari –pour qui ce secteur «n’a pas été accepté de bon gré par l’administration»-, «il faut penser l’enseignement supérieur privé comme un enseignement citoyen».
Constatant un vide dans les universités tunisiennes, Moez Joudi, patron du cabinet de formation Formapro –et universitaire tunisien vivant en France- appelle à «la mise en place d’un système de gouvernance avec des procédures et des mécanismes claires». Car en faisant ainsi, «le système tunisien deviendra plus performant et cessera d’être une fabriques de chômeurs».