Phoques : l’embargo européen suspendu en justice, le Canada crie victoire

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ôte de la Pointe-aux-Loups, au Canada, le 29 mars 2008 (Photo : David Boily)

[19/08/2010 22:03:49] MONTREAL (AFP) Les chasseurs de phoque canadiens criaient victoire jeudi, affirmant avoir obtenu de la Cour européenne de justice la suspension de l’embargo de l’UE sur les produits dérivés du mammifère marin, dont l’entrée en vigueur est prévue vendredi.

Mais l’embargo entrera bien en vigueur vendredi, a affirmé une porte-parole de la Commission européenne, Maria Kokkonen.

L’embargo de l’UE, décidé en juillet 2009 sous la pression de défenseurs des animaux, dont Brigitte Bardot, qui dénonçaient la “cruauté” des chasseurs, avait été contesté auprès de la plus haute juridiction européenne par une organisation d’Inuits, Inuit Tapiriit Kanatami (ITK), et une quinzaine d’autres plaignants. L’ITK a mis la décision de la Cour sur son site internet.

La décision de la cour européenne précise qu’elle s’applique aux plaignants: “l’application des conditions limitant la mise sur le marché des produits dérivés du phoque (…) est suspendue, en ce qui concerne les plaignants, jusqu’à l’adoption d’un ordre mettant fin à la présente procédure de référé”.

La plupart des plaignants représentent les Inuits, un peuple autochtone des régions arctiques, mais certains sont des sociétés de commercialisation de produits dérivés du phoque, tel le Groupe canadien de mise en marché du phoque, l’Institut de la Fourrure du Canada, ou le groupe norvégien GC Rieber Skinn AS. Une association basée au Groenland, la Conférence circumpolaire inuit (ICC), en fait également partie.

Le gouvernement canadien, qui a toujours soutenu les chasseurs et combattu l’embargo, s’est réjoui de la décision de la Cour.

“C’est un développement positif. Les cours européennes ont conclu que les Inuits avaient le droit d’être entendus et le statu quo sera maintenu jusqu’à ce qu’on leur accorde cette audience”, a dit la ministre des Pêches, Gail Shea, lors d’un point de presse à Saint-Jean de Terre-Neuve.

De son côté, l’Etat canadien continuera son combat à l’OMC contre l’embargo. Il demandera à l’Organisation mondiale du commerce de mettre en place un groupe spécial pour régler le différend, les premières consultations tenues en décembre dernier n’ayant pas abouti, a précisé la ministre.

Quant aux Inuits, ils paraissent décidés à repartir à l’attaque. “A nos yeux, l’embargo sur le phoque est à la fois illégal et immoral”, a déclaré Mary Simon, présidente d’ITK, dans un communiqué.

La décision de la Cour “prouve clairement que celle-ci est bien consciente du sérieux et de la nature morale des objections fondamentales” contre “cette loi très injuste”, a-t-elle ajouté, avant d’espérer que “le Parlement européen jugera approprié de faire ce qui est juste et de retirer cette loi”.

En fait, l’embargo européen contient une clause autorisant la vente “à des fins non lucratives” des produits provenant de la chasse traditionnelle pratiquée par les communautés inuits.

Mais pour les autochtones, ce n’est qu’un leurre, les acheteurs européens n’entrant pas dans des distinctions délicates et ne voulant pas risquer d’aller à l’encontre d’une décision de l’UE.

En 2009, la chasse a rapporté aux chasseurs canadiens environ 10 millions de dollars, selon les chiffres du gouvernement, dont 25% venant de leurs ventes en Europe. Et l’année 2010 a été très mauvaise, en raison de l’absence exceptionnelle de la glace dans le golfe du Saint-Laurent.