La Bourse allemande croit à un sursis pour les réacteurs nucléaires

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éaire du géant allemand de l’énergie RWE, le 9 août 2010 à Hamm, ouest de l’Allemagne. (Photo : Patrik Stollarz)

[30/08/2010 09:55:30] BERLIN (AFP) Les actions des géants allemands de l’énergie EON et RWE ont rebondi lundi à l’ouverture de la Bourse de Francfort, après que la chancelière Angela Merkel a fait miroiter la perspective d’un allongement de 10 à 15 ans de la durée de vie de leurs réacteurs nucléaires.

Vers 08H30 GMT à Francfort, EON prenait 0,87% à 22,52 euros et RWE 0,71% à 52,78 euros, parmi les plus fortes hausses d’un indice vedette Dax en stagnation.

Les cours réagissaient à une déclaration dimanche de la chancelière conservatrice Angela Merkel, qui s’est prononcée pour une prolongation de 10 à 15 ans de la durée de vie des réacteurs nucléaires du pays, au-delà de la date de fermeture prévue en 2022.

Une telle prolongation est “techniquement raisonnable”, a affirmé la chancelière.

Jusqu’ici, il était prévu que les 17 réacteurs allemands en activité ferment l’un après l’autre, le dernier devant s’éteindre en 2022, selon un calendrier fixé par les prédécesseurs sociaux-démocrates et Verts de Mme Merkel.

La chancelière et ses alliés libéraux, arrivés au pouvoir l’an dernier, avaient alors annoncé qu’ils réviseraient ce calendrier, mais sans donner jusqu’ici d’indication chiffrée.

La déclaration du week-end est donc “une bonne nouvelle pour les entreprises, dans la mesure où elle lève en partie les incertitudes”, explique à l’AFP Theo Kitz, analyste de la société Merck Finck.

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à haute-tension, le 9 aôut 2010, près de la centrale nucléaire de Hamm (ouest de l’Allemagne) (Photo : Patrik Stollarz)

“Mais en partie seulement, car Mme Merkel est restée prudente dans ses déclarations, c’est pourquoi les actions ne s’envolent pas”, a-t-il ajouté.

La chancelière marche en effet sur des oeufs dans le dossier de l’énergie nucléaire.

Toute la difficulté pour elle consiste à imposer un allongement de la durée de vie des réacteurs en évitant de faire voter la chambre haute du Parlement allemand, le Bundesrat, où la droite n’a plus la majorité.

Si le gouvernement tente une telle manoeuvre, “nous irons devant la Cour constitutionnelle”, a d’ores et déjà menacé le chef de l’opposition social-démocrate, Sigmar Gabriel, lundi à la radio.

Selon les juristes, la chancelière ne pourra se passer du Bundesrat qu’à condition d’annoncer un allongement modéré, ne dépassant pas dix ans.

Lequel serait toutefois déjà synonyme de juteux bénéfices pour les quatre géants de l’énergie en Allemagne, qui contrôlent tous les réacteurs: EON, RWE, EnBW, dont le français EDF est grand actionnaire, et Vattenfall.

Ils pourraient engranger des bénéfices supplémentaires compris entre 21 et 73 milliards d’euros pour un allongement de 8 ans, selon les estimations rassemblées par le journal Frankfurter Allgemeine Zeitung.

Cette manne ne devrait toutefois pas rester intacte: le gouvernement allemand va imposer une taxe sur le combustible nucléaire devant lui rapporter 2,3 milliards d’euros par an dès l’an prochain, au grand dam des multinationales du secteur.

Et Mme Merkel a déjà indiqué qu’il fallait réfléchir à une contribution supplémentaire de ces mêmes entreprises au développement des énergies renouvelables, sur la base du volontariat.

“Disons qu’il s’agira certainement d’investissements volontaires sur commande”, décrypte M. Kitz en souriant.

En plus de régler les questions juridiques et économiques, Mme Merkel devra mener la bataille de l’opinion publique, durablement traumatisée par la catastrophe de Tchernobyl.

Selon un sondage rendu public vendredi, 56% des Allemands refusent que la durée de vie des réacteurs du pays soit prolongée. Et les Verts ont appelé à une grande manifestation anti-nucléaire mercredi à Berlin.