Le logo de Boeing (Photo : Larry W. Smith) |
[15/09/2010 08:57:35] GENEVE (AFP) L’OMC rend mercredi un verdict préliminaire crucial sur des décennies d’aides américaines à Boeing, jugées illégales par Bruxelles et son géant Airbus, qui a déjà crié victoire dans cette deuxième manche de la guerre qui oppose le duopole de l’aviation mondiale.
Le jugement confidentiel de l’Organisation mondiale du commerce sur la plainte européenne déposée en 2004 est très attendu après le premier verdict du gendarme du commerce mondial qui a condamné le 30 juin certaines aides européennes à l’avionneur Airbus (EADS).
“La remise de ce rapport devrait permettre de rééquilibrer la situation”, explique une source diplomatique proche de l’OMC.
Bruxelles s’était offusqué du retard pris sur le dossier Boeing par l’organe de règlement des différends de l’organisation alors que celui-ci avait reçu quasiment simultanément le 6 octobre 2004 les deux plaintes de la Commission et de Washington s’accusant mutuellement de subventionner illégalement leurs avionneurs.
L’UE comme Airbus estiment que ce retard n’a que trop laissé dominer l’idée qu’ils sont les grands perdants du dossier le plus lourd jamais porté devant l’OMC. Et comptent bien sur une revanche mercredi.
Pour autant, le verdict préliminaire, qui ne sera livré qu’aux parties concernées, ne devrait pas apporter de réponse uniforme à la plainte européenne portant sur une vingtaine de programmes d’aides à Boeing.
“Ce sera vraisemblablement un résultat assez mitigé et assez compliqué”, prévient la source diplomatique.
Au-delà de la série d’exonérations fiscales et sociales dont Boeing a pu bénéficier, la question clé du jugement portera pour les experts sur les modalités des aides versées par la Nasa et le Pentagone à l’avionneur américain, via des programmes de recherche et développement.
Pour l’UE, il ne fait pas de doute que ces aides (évaluées à 24 milliards de dollars) constituent des subventions américaines déguisées en contrats spatiaux et d’armement.
Si ces aides sont épinglées par l’OMC, “ce sera une brèche” significative qui pourra faire “jurisprudence” notamment pour les pays émergents dont les fabricants commencent à faire entendre leur voix sur la scène internationale, selon la même source. Au final, “cela voudra dire que contrairement à ce qu’ils disent, les Américains subventionnent leur avionneur”.
Pour le prouver, l’OMC devra démontrer qu’il y a eu subventions et préjudice, et surtout un rapport de cause à effet.
L’ORD a déjà procédé ainsi pour expliquer en 1.000 pages le 30 juin que plusieurs aides de l’UE à Airbus constituaient des subventions prohibées par les règles.
L’organe avait dans le même temps avalisé le principe, essentiel pour l’UE, des aides au lancement accordées à Airbus, permettant de ne pas remettre en cause le programme de l’A350 devant rivaliser avec le Boeing 787.
Ce jugement mixte avait alors permis aux deux avionneurs de clamer leur victoire et, dans la foulée, de faire tous deux appel.
Avant même le nouveau verdict, Airbus a déjà lancé l’offensive lundi, se disant convaincu de remporter sans équivoque la nouvelle manche.
“Nous nous attendons à ce que l’OMC confirme mercredi que Boeing a reçu des milliards de dollars de subventions illégales”, a expliqué une porte-parole du constructeur européen Maggie Bergsma.
Si c’était le cas, les experts s’accordent à penser que les deux avionneurs renvoyés dos à dos n’auront plus qu’à renégocier une trêve.
“Ce sera le chemin le plus direct vers une négociation pour enterrer enfin cette affaire”, explique un analyste.