Le Japon intervient pour affaiblir le yen, Naoto Kan se montre volontaire

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épond aux questions de la presse à Tokyo le 14 septembre 2010 (Photo : Kazuhiro Nogi)

[15/09/2010 10:34:15] TOKYO (AFP) Le Japon est intervenu mercredi sur le marché des changes pour la première fois depuis six ans afin d’affaiblir le yen qui a flambé ces dernières semaines, une manière pour le Premier ministre Naoto Kan de montrer sa détermination au lendemain de sa confirmation à son poste.

Le ministre des Finances, Yoshihiko Noda, a expliqué lors d’une conférence de presse que l’envolée récente du yen, valeur refuge, provoquait “une déstabilisation de l’économie et des finances” du Japon, une situation “intolérable” pour les autorités.

Le yen a fortement progressé ces dernières semaines et atteint son plus haut niveau en 15 ans face au billet vert et en 9 ans vis-à-vis de l’euro. La devise japonaise fait l’objet d’achats massifs, en partie spéculatifs, compte tenu des incertitudes liées à la conjoncture occidentale.

Immédiatement après cette intervention, le yen a chuté, permettant au dollar de repasser au-dessus de la barre des 85 yens et l’euro de dépasser les 110 yens, tandis que la Bourse de Tokyo finissait en forte hausse.

“Nous continuerons de suivre le mouvement du marché et agirons résolument, y compris via d’autres interventions, si nécessaire”, a prévenu M. Noda.

Haussant le ton depuis quelques jours, les autorités japonaises avaient laissé entendre qu’elles interviendraient le moment venu pour enrayer l’ascension de la devise nationale, phénomène qui handicape les groupes exportateurs nippons et fragilise le tissu industriel de l’archipel.

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électronique indiquant les cours de la bourse à Tokyo le 15 septembre 2010 (Photo : Kazuhiro Nogi)

Elles sont passées à l’action juste après la réélection, mardi, de Naoto Kan à la présidence du Parti démocrate du Japon (PDJ, centre-gauche, au pouvoir) face à son rival Ichiro Ozawa, un influent vétéran de la politique nippone.

Renforcé par sa large victoire, M. Kan a ainsi donné des gages aux milieux d’affaires qui réclamaient cette action à cor et à cri depuis longtemps.

“Le plus important pour le Japon est de montrer aux spéculateurs du marché des changes que des mesures peuvent être prises pour contrecarrer la hausse du yen”, s’est réjoui le PDG de la Bourse de Tokyo, Atsushi Saito.

Le Premier ministre a également adressé un message aux proches de M. Ozawa, partisan d’une intervention rapide.

“M. Kan doit faire des compromis pour avoir le soutien des amis de M. Ozawa” et éviter une scission de son parti, souligne Richard Jerram, analyste à la société de recherche économique Macquarie.

Le Premier ministre a en outre voulu rassurer sur sa capacité d’initiative en donnant son feu vert à cette intervention unilatérale, réalisée sans le concours d’autres pays.

Se présentant résolument comme un homme d’action, M. Kan veut rendre crédible son objectif de “redonner la forme au pays” en privilégiant “l’emploi”, alors que le chômage dépasse 5%, un taux élevé au Japon.

“La politique que je propose vise la création d’un cercle économique vertueux, incluant une réforme fiscale d’ampleur pour assainir les finances”, a expliqué le Premier ministre.

Il prône notamment la discipline budgétaire pour maîtriser l’endettement colossal du pays, qui atteint 200% du produit intérieur brut, et souligne qu’abaisser la valeur du yen permettra de lutter contre la déflation, un phénomène de baisse des prix qui entrave la reprise.

En donnant la priorité à la lutte contre les difficultés économiques, M. Kan tend aussi une perche à l’opposition, majoritaire à la chambre haute du Parlement et dont la coopération lui sera nécessaire pour faire adopter les projets de loi.