Ni bière, ni tabac? Polémique en Allemagne sur l’aide sociale

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ère, le 18 septembre 2010 à l’Oktoberfest de Munich (Photo : Christof Stache)

[28/09/2010 13:49:58] BERLIN (AFP) Cinq euros de plus par mois, boire de l’eau plutôt que de la bière, et arrêter de fumer: la refonte a minima de l’aide sociale décidée par le gouvernement d’Angela Merkel suscite l’indignation de la gauche allemande, sans satisfaire les milieux économiques.

“Qui prêche la froideur sociale doit s’attendre à des réponses brûlantes”, a mis en garde le patron de la plus importante confédération syndicale allemande, DGB, Michael Sommer, dans un entretien mardi au journal régional Passauer Neue Presse.

“La stigmatisation des chômeurs (…) est devenue officiellement un principe de gouvernement”, a-t-il lancé.

En annonçant dimanche les changements apportés au dispositif Hartz IV, le nom donné au revenu social minimum que touchent 6,5 millions d’Allemands, en particulier les chômeurs de longue durée, la ministre de l’emploi Ursula von der Leyen se plie aux exigences de la Cour constitutionnelle.

Celle-ci a sommé le gouvernement conservateur/libéral de revoir le calcul de cette aide, issue en 2005 des réformes du chancelier social-démocrate ((SPD) Gerhard Schröder, qui ont considérablement durci le système d’indemnisation des chômeurs.

L’aide est calculée à partir d’un panier de produits dits “de première nécessité”, dont la composition se base sur le suivi des dépenses de consommation de plusieurs milliers de ménages aux revenus modestes.

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Une femme fume une cigarette (Photo : Nicolas Asfouri)

Dans son nouveau calcul, Berlin a décidé de supprimer de ce panier l’alcool et le tabac des dépenses domestiques, tout comme la nourriture pour animaux, les outils de jardinage ou l’achat de fleurs, mais d’inclure de nouveaux frais comme l’accès à internet.

Résultat: l’allocation par adulte doit grimper à 364 euros par mois, contre 359 euros jusqu’ici, hors aides au logement et au chauffage.

Cette augmentation a minima, qui contraste avec la vigueur économique allemande, a suscité l’indignation du SPD, des Verts ou de l’extrême gauche (Die Linke).

“Il ne s’agit pas d’alcool et de cigarettes, comme veut le faire croire la chancelière, mais de savoir si une mère peut acheter une deuxième paire de chaussures à son enfant”, a dénoncé le chef de file du SPD Sigmar Gabriel.

“Le but n’est pas de rendre le chômage de longue durée agréable, mais de faire en sorte que les gens retrouvent le chemin du marché du travail”, s’est défendue la chancelière Angela Merkel mardi.

Mais le gouvernement risque de rater cet objectif, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

L’Organisation juge que l’Allemagne est confrontée à “un risque très élevé” de paupérisation, et que la solution ne réside pas dans une augmentation des aides, au contraire.

Les bénéficiaires “ne sont pas suffisamment incités à trouver un travail leur permettant de vivre”, a déclaré Herwig Immervoll, expert de l’OCDE, au quotidien Frankfurter Rundschau.

Droite et gauche s’entendent pour dénoncer l’explosion du secteur des très bas salaires, dont le montant dépasse à peine l’aide sociale.

“Le vrai scandale, c’est combien gagnent certaines personnes travaillant à plein temps: femmes de ménage, coiffeuses, agents de sécurité…”, énumère le Financial Times Deutschland, proche des milieux d’affaires.

“Des millions de gens travaillent aujourd’hui dans les services pour à peine plus de 900 euros par mois et ne comprennent pas, à juste titre, pourquoi ils n’ont que 100 à 200 euros de plus que d’autres qui restent chez eux”, si l’on compte les aides au logement, dénonce, à l’autre bout de l’échiquier politique, le quotidien de gauche TAZ.

Les solutions proposées sont radicalement différentes: l’ensemble de la gauche milite pour l’instauration d’un salaire minimum unique, tandis que le FTD réclame plutôt une diminution des charges sociales.