Irlande : la banque Anglo Irish sauvée au prix d’un déficit astronomique

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ège de l’Anglo Irish Bank à Dublin le 25 février 2009 (Photo : Peter Muhly)

[30/09/2010 17:05:54] DUBLIN (AFP) Le gouvernement irlandais a présenté jeudi la facture finale du sauvetage de la banque Anglo Irish, d’un montant astronomique, qui va faire enfler le déficit public à 32% du PIB cette année, mais Dublin espère que cette opération-vérité va enfin calmer les marchés.

Le déficit irlandais, qui était prévu jusqu’ici à 11,6% du Produit intérieur brut (PIB) en 2010, va finalement bondir de 20 points supplémentaires, et la dette publique, qui s’élevait à 64% fin 2009, devrait frôler 100% du PIB, a annoncé le ministre des finances Brian Lenihan.

Ce déficit historique, le plus élevé jamais essuyé par un pays de la zone euro, est lié aux nouvelles aides que Dublin va devoir fournir à son secteur bancaire naufragé, qui croule sous les pertes en raison de créances pourries accumulées avant la crise financière, au temps où les banques irlandaises finançaient des chantiers immobiliers à tout-va.

“Le peuple irlandais a le droit d’être en colère contre les banquiers qui ont prêté sans relâche sur une période de temps considérable”, a assuré M. Lenihan. “Les chiffres sont horribles, mais nous pourrons les gérer sur une période de 10 ans”, a-t-il néanmoins ajouté.

Le coût du sauvetage de la banque Anglo Irish, qui avait dû être nationalisée en catastrophe début 2009, a été à lui seul relevé de 25 à 29,3 milliards d’euros, voire jusqu’à 34,3 milliards dans le pire des cas.

Cela reste toutefois largement en deçà des 40 milliards évoqués par les plus pessimistes, et les annonces de Dublin semblent avoir eu l’effet escompté sur les marchés financiers. Le taux des obligations irlandaises à 10 ans s’est nettement détendu jeudi, tandis que la Bourse de Dublin a gagné 0,61%.

L’Etat irlandais devra également verser une rallonge de 2,7 milliards d’euros à la banque mutualiste elle aussi nationalisée INBS, et aidera à se recapitaliser le groupe Allied Irish Banks (AIB), qui doit récolter en tout 10,4 milliards d’euros avant la fin de l’année.

Paradoxalement, l’Irlande espère que ces annonces fracassantes aideront à calmer durablement les inquiétudes sur sa solvabilité à long terme, et les craintes récurrentes d’un appel à l’aide de l’Union européenne ou du FMI.

Un des responsables de l’opposition, Michael Noonan, a estimé que l’Anglo Irish “était trop grosse pour être sauvée” et n’aurait donc jamais dû l’être. Mais Lenihan a plaidé que la laisser faire faillite aurait eu des conséquences encore plus désastreuses pour le pays.

Le ministre a estimé que l’opération-vérité de ce jeudi mettait un point final au “problème” du secteur bancaire irlandais.

Il a par ailleurs maintenu l’engagement de l’Irlande à ramener son déficit en-dessous de 3% du PIB en 2014 et promis de présenter début novembre un plan détaillé pour remplir cet objectif, qui risque de mêler hausses d’impôts, nouvelles coupes dans les services sociaux et privatisations.

Enfin, il a évoqué des économies supérieures aux 3 milliards jusqu’ici prévus pour le budget 2011, qu’il présentera cet automne et constituera le quatrième plan d’austérité adopté par Dublin en deux ans.

Bruxelles a adressé un satisfecit immédiat à l’Irlande, saluant la “clarté” de ses annonces.

Jean-Claude Juncker, chef de file des ministres des Finances de la zone euro, s’est dit “parfaitement confiant dans la capacité des autorités irlandaises à résoudre” leurs problèmes, sans recourir au fonds de sauvetage européen, auquel seule la Grèce a pour l’instant fait appel.

“Même si des décisions difficiles devront être prises au niveau budgétaire, le coût de la crise bancaire, après une longue attente, est désormais connu”, a estimé pour sa part Oliver Gilvarry, analyste de la maison de courtage Dolmen Stockbrokers.