La BCE refuse de se laisser gagner par la fébrilité et devrait maintenir son taux

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à Francfort (Photo : Daniel Roland)

[03/10/2010 13:23:58] FRANCFORT (Allemagne) (AFP) Alors que les marchés se sont fait des frayeurs à propos de l’Irlande et du Portugal, la Banque centrale européenne (BCE) refuse de se laisser gagner par la fébrilité et devrait prolonger jeudi son statu quo monétaire.

La BCE réunira à Francfort (ouest) son conseil des gouverneurs et, de l’avis de tous les économistes, devrait annoncer un maintien de son taux directeur au niveau historiquement bas de 1%.

“Surtout ne pas bouger”: tel pourrait être l’adage de l’institution européenne ces jours-ci, juge Michael Schubert, économiste chez Commerzbank.

Son président Jean-Claude Trichet a répété à plusieurs reprises ces dernières semaines qu’il ne “voyait pas se matérialiser un risque de déflation” dans les économies industrialisés, c’est-à-dire une spirale à la baisse des prix entraînant l’économie dans le marasme.

En d’autres termes, la BCE n’a aucune raison de modifier son taux directeur, et ce jusqu’à fin 2011, prédit M. Schubert.

Ce qui intéresse davantage les marchés, ce sont les mesures de soutien au secteur bancaire mises en place à Francfort, et surtout leur éventuel retrait.

Pour aider le secteur, la BCE a en particulier entrepris de prêter aux banques commerciales de l’argent au taux fixe de 1%, et dans des volumes illimités. Avant la crise, ces opérations étaient soumises à un processus d’enchères, privilégiant les banques prêtes à payer les taux les plus élevés, et leur montant était limité.

M. Trichet a déjà laissé entendre que la BCE n’ajouterait pas de nouvelles mesures à son arsenal, qui vise à fournir en abondance aux banques les liquidités nécessaires à leur activité, qu’elles n’arrivent pas toujours à faire circuler entre elles à cause du climat de défiance né de la crise.

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ésident de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, à Bruxelles le 30 septembre 2010

Pour le président de la BCE, pas question d’entraîner la zone euro dans une “décennie perdue” telle qu’en a connu le Japon dans les années 1990, empêtré dans une phase de déflation et de croissance molle malgré la multiplication des interventions de sa banque centrale.

Pour couper court aux attentes, les représentants de l’institution de Francfort adoptent même un ton volontairement optimiste.

La semaine dernière, l’un des gouverneurs de la BCE, le Slovène Marko Kranjec s’est même payé le luxe d’évoquer un “risque d’inflation” pour la zone euro, lié à la reprise économique.

Le chef économiste Jürgen Stark, n’a lui pas hésité à parler d’un “tournant” positif du crédit au secteur privé en août (+1,2%), bien que dans le détail, la forte croissance des prêts aux particuliers a masqué une baisse des prêts aux entreprises.

De fait, la plupart des économistes estiment que la BCE devrait commencer dès le début de l’année prochaine à retirer progressivement ses mesures exceptionnelles.

Car au-delà des sursauts de panique, par exemple concernant le secteur bancaire irlandais, la situation semble doucement se normaliser.

Les banques de la zone euro ont nettement moins emprunté à la BCE cette semaine, par rapport aux prêts sur 3, 6 et 12 mois de l’institution monétaire qui arrivaient à expiration jeudi, soit 225 milliards d’euros.

Les banques n’ont demandé que 133 milliards d’euros lors de deux opérations spéciales de la BCE pour relayer ces crédits arrivant à échéance.

“Cela suggère que les banques n’ont plus besoin d’autant d’assistance de la BCE que par le passé” selon une note de Citigroup.

Mais si le secteur bancaire “dans son ensemble” devient moins dépendant des aides de la BCE, celles-ci sont toujours “vitales” pour nombre d’instituts financiers de pays de la zone euro en difficulté, rappelle Jennifer McKeown de Capital Economics.

Ainsi les taux du marché interbancaire se sont nettement tendus vendredi, ce qui témoigne d’une confiance entre les banques encore fragile.