L’Amérique, encore une «Terra Incognita» pour les Tunisiens ?
C’est ce qu’on est en droit de se demander lorsqu’on voit la faiblesse des échanges commerciaux, malgré un système de préférences généralisé qui inciterait en théorie à plus d’audace et d’engagement côté exportateurs tunisiens.
De plus, les voies du commerce et les protocoles d’accord existent depuis longtemps… le premier traité d’amitié et de commerce entre les USA et la Tunisie date de 1799 !
Le Tunisien consomme américain plus qu’on ne croit
Avec des échanges qui plafonnent à 1.000 MDT, nous avons l’impression que le Tunisien consomme très peu américain. Et réciproquement.
Ce n’est pas tout à fait vrai, en tous cas pour le Tunisien, qui consomme américain beaucoup plus qu’on ne le voit…
En effet, l’observation des flux commerciaux entre les USA et la Tunisie montre que très peu de chaînes d’approvisionnement (Supply Chains) sont actionnées entre la Tunisie et les Etats-Unis. Logistiquement parlant, la Tunisie est, en effet, plutôt reliée à l’Europe. Cela ne veut pas dire que les produits et services importés par la Tunisie d’Europe, voire d’Asie, ne comportent pas d’intrants, matériels ou immatériels, américains. C’est en mesurant les échanges en valeur ajoutée, et non pas en chiffres apparents des transactions, qu’on découvrira la part véritable du made in USA en Tunisie.
Prenons en considération le fait que les Etats-unis sont un des premiers producteurs de connaissances dans le monde, et que ces connaissances constituent le premier socle de toute industrie, et nous aboutirons à la conclusion que les USA sont présents dans la quasi-totalité des chaînes de valeurs internationales.
La stratégie de proximité ne fonctionne pas avec les USA
La Tunisie dépend encore, et pour beaucoup, de ses partenaires de proximité. Ceci constitue un avantage, notamment au niveau temps de cycle et coûts des transactions, mais aussi un inconvénient à cause de l’interdépendance économique et les risques de réaction en chaîne en cas de crise régionale.
La diversification des partenaires ne veut pas dire appliquer la même stratégie à des marchés cibles variées. La Tunisie doit trouver une nouvelle voie pour investir les chaînes de valeurs internationales, et intégrer l’économie mondiale avec une stratégie logistique renouvelée.
Le vrai défi pour la Tunisie est de renouer avec une tradition phénicienne d’internationalisation, en ouvrant des «comptoirs» dans les marchés cibles. La conquête d’un marché difficile, mais «friendly» comme celui des USA, constitue un vrai Business case et un excellent exercice d’internationalisation pour nos entreprises.
Cinq leviers côté tunisien
1) L’intégration régionale et les possibilités d’accès aux marchés régionaux via la Tunisie
2) La libéralisation des services, et leur corollaire la knowledge based économy
3) Le déploiement de chaînes logistiques de classe mondiale
4) L’adoption des normes et standards internationaux.
5) L’accompagnement des entreprises tunisiennes dans leur implantation aux USA.
Cinq leviers côté américain
1) Les programmes d’échange au niveau Education et Culture
2) La mutualisation des efforts au niveau recherche scientifique
3) Le ciblage des IDE américains pour l’implantation de bases avancées voire Headquarters régionaux en Tunisie. Déjà, plusieurs entreprises américaines ayant investi en Tunisie profitent des exemptions fiscales que l’Etat tunisien offre ainsi que de la main-d’oeuvre locale compétente.
4) La coopération sur des projets eBusiness
5) l’accès au marché et au financement US.
Durant ce déjeuner-débat de la TACC prévu le jeudi 07 octobre 2010 sur les perspectives de développement des échanges commerciaux entre les USA et la Tunisie, et qui réunira des officiels tunisiens et américains, ainsi que des décideurs et représentants des secteurs public et privé, nous essayerons de mieux comprendre les facteurs et leviers de développement et de diversification des échanges entre la Tunisie et les USA. Nous tâcherons aussi d’identifier les barrières et les moyens de les lever, tout en appréhendant la stratégie de développement du commerce extérieur, qui ne peut se faire sans modernisation et restructuration du commerce intérieur. Autant de points qui mériteraient des éclaircissements et des suggestions des différentes parties.