Les Etats-Unis s’attaquent aux commissions perçues sur les cartes de crédit

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à un distributeur, le 3 août 2010 à Fayetteville, en Caroline du Nord (Photo : Chris Hondros)

[04/10/2010 22:05:20] NEW YORK (AFP) L’administration américaine a poursuivi lundi les trois principaux organismes de cartes de crédit, American Express, Visa et Mastercard, dénonçant les commissions qu’ils imposent aux commerçants, totalisant selon elle 35 milliards de dollars par an, qui font grimper les prix.

Le ministère américain de la Justice (DoJ) a déposé une plainte dans un tribunal de New York pour dénoncer “les règles qu’American Express, MasterCard et Visa ont mises en place pour empêcher les commerçants d’offrir aux consommateurs des ristournes, primes et informations sur les coûts des cartes de paiement”.

“Rien qu’en 2009, ces trois groupes et leurs banques affiliées ont collecté plus de 35 milliards de dollars grâce à ces commissions”, a fait valoir le ministre de la Justice Eric Holder.

Le DoJ est d’ores et déjà parvenu à un accord à l’amiable pour mettre fin à ses poursuites contre Visa et Mastercard, qui doit encore être approuvé par un tribunal. Ces deux réseaux devront dorénavant “autoriser les commerçants à proposer à leurs clients plus de choix (de modes de paiement) et d’incitations à choisir la méthode la moins chère”.

Les compagnies aériennes pourraient ainsi proposer plus de points de voyages aux clients qui utilisent des cartes de crédit à bas coût.

A l’inverse, American Express, qui selon M. Holder maintient les tarifs de cartes “les plus élevés” et “les règles les plus restrictives du secteur pour les commerçants”, a refusé un accord à l’amiable, promettant de se défendre devant les tribunaux.

Son PDG Kenneth Chenault a affirmé dans un communiqué que “le remède partial proposé par le gouvernement mettrait plus de pouvoir entre les mains de Visa et MasterCard, les réseaux qui ont régulièrement relevé le prix des cartes et des transactions depuis dix ans, (…) et qui ont dix fois plus de cartes (en circulation) qu’American Express”.

“Notre modèle est fondé sur une offre de produits et services supérieurs pour les détenteurs de cartes et aux commerçants”, précise M. Chenault dans un mémo transmis aux employés du groupe et diffusé lundi.

Ce mémo justifie aussi les conditions imposées aux commerçants comme une manière de “protéger” les détenteurs de cartes Amex et de s’assurer qu’ils ne font pas l’objet de “discriminations” et ne sont pas “importunés en se voyant demander d’utiliser une autre carte”.

Ces mesures ont été adoptées “il y a 25 ans en réponse aux tentatives répétées de Visa et MasterCard, qui contrôlent 70% du marché des cartes de paiement, d’utiliser leur pouvoir pour nuire à la concurrence”, poursuit le mémo.

Lors d’une conférence d’analyste, les dirigeants d’Amex ont éludé des questions sur le coût potentiel de ces poursuites mais ont affirmé que cette bataille judiciaire “vaut la peine d’être menée”.

Cette perspective a toutefois plombé l’action d’Amex, qui a chuté de 6,53% à 39,05 dollars lundi, tandis que ses deux concurrents ont fini la séance quasiment inchangés grâce aux accords passés avec le DoJ: Visa a cédé 0,11% à 73,24 dollars et Mastercard 0,95% à 222,75 dollars.

“Si Amex perd le procès cela peut lui nuire car c’est une carte à fortes primes et services, et les clients paient plus cher pour cela”, a commenté Michael Won, analyste chez la firme de recherche Morningstar.

Si les commerçants sont autorisés à encourager leurs clients à utiliser une carte moins chère, cela pourrait donc “détourner les utilisateurs” d’Amex, ajoute-t-il.

Dans un communiqué, l’association américaine des banques (ABA) a souligné que “depuis des années, les commerces de détail affirment que réduire les frais de cartes de crédit se traduirait par des prix plus faibles pour les consommateurs”.

“Nous avons hâte de voir si leur nouveau pouvoir de fixation de prix va bénéficier aux consommateurs ou s’il servira uniquement à renforcer leurs bénéfices”, a-t-elle ajouté.