Medvedev au Turkménistan, le marché européen du gaz en toile de fond

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ésident russe Dmitri Medvedev et son homologue turkmène Gurbanguly Berdymukhamedov, le 21 octobre 2010 à Turkmenbachi (Photo : Dmitry Astakhov)

[22/10/2010 12:40:01] TURKMENBACHI (AFP) Le président russe Dmitri Medvedev tenait vendredi au Turkménistan des pourparlers importants sur le gaz dont ce pays d’Asie centrale est riche et dont Moscou voudrait éviter la concurrence sur le marché européen.

Le chef de l’Etat turkmène a clairement exprimé ses désirs devant son homologue Dmitri Medvedev: il faut que la Russie achète plus de gaz à cette république ex-soviétique d’Asie centrale située sur les rives de la mer Caspienne, riche en hydrocarbures.

“Dans le domaine énergétique, la Russie est un partenaire ancien, et c’est pourquoi, sur la base des accords bilatéraux existants, nous sommes prêts à augmenter nos exportations de gaz vers la Fédération russe”, a-t-il déclaré, recevant M. Medvedev à Turkmenbachi (ouest).

Or, Moscou a drastiquement réduit ses achats de gaz turkmène en raison de la crise économique mondiale qui a provoqué une baisse de la demande européenne.

Si en 2008, le géant russe Gazprom achetait quelque 50 milliards de m3 à Achkhabad pour les réexporter vers l’Europe, seuls 7,9 milliards de m3 ont été importés en Russie depuis début 2010.

Un projet de gazoduc le long de la mer Caspienne sur lequel le Turkménistan, le Kazakhstan et la Russie se sont accordés en 2007, est resté au point mort.

Le géant gazier russe Gazprom n’a fait que confirmer vendredi des importations annuelles situées “entre 10 et 12 milliards de m3 du Turkménistan”. Ces volumes n’augmenteront que “si c’est possible”, a souligné le vice-Premier ministre russe Igor Setchine.

Quant au gazoduc russo-turkmeno-kazakh, il “n’est pas gelé, il s’agit juste d’une question de priorités”, a-t-il dit.

Les officiels turkmènes ont multiplié les déclarations ces derniers mois en faveur d’exportations directes vers l’Europe, si les Occidentaux construisaient l’infrastructure nécessaire contournant la Russie.

Les Européens cherchent à alimenter leur futur gazoduc Nabucco avec du gaz d’Asie centrale afin de réduire leur dépendance vis-à-vis de Moscou, dont le projet concurrent, South Stream, est pour l’heure plus avancé.

M. Setchine a enjoint vendredi le Turkménistan à ne pas rejoindre ce projet européen, soulignant qu’il n’y avait “pas de place (…) dans les années à venir” pour Nabucco, faute notamment de croissance suffisante de la demande.

Le désir des Européens d’accéder au gaz turkmène directement se heurte aussi à des problèmes juridiques et logistiques. En effet, la construction d’un gazoduc sous la Caspienne nécessite l’accord des cinq Etats riverains (Azerbaïdjan, Russie, Turkménistan, Kazakhstan, Iran) qui ne se sont jamais accordés sur le partage de cette vaste mer fermée et de ses richesses.

Une solution serait dès lors de liquéfier le gaz et de le transporter par tanker, ce que Moscou voudrait empêcher.

“Mais Gazprom n’a pas l’argent pour l’instant pour acheter de grands volumes de gaz turkmène. Dès lors Moscou doit compter sur les problèmes internes au projet Nabucco, qui au grand bonheur des gaziers russes sont nombreux”, notait le journal russe Kommersant jeudi.

En attendant, le Turkménistan regarde vers l’Est. Un gazoduc vers la Chine a ainsi été inauguré fin 2009. Il a permis de livrer depuis cette date six milliards de m3 de gaz, mais l’objectif est de porter ce volume à 40 milliards de m3 dès 2012.

Par ailleurs, Achkhabad travaille au projet d’un gazoduc transafghan, le TAPI (Turkménistan, Afghanistan, Pakistan, Inde), mais ce dernier n’a guère de chances de voir le jour avant que l’Afghanistan se stabilise.