L’économie mondiale mal armée face à une éventuelle chute du dollar

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Des billets de 100 dollars (Photo : Adek Berry)

[26/10/2010 20:00:19] WASHINGTON (AFP) L’économie mondiale serait mal armée si la confiance dans le dollar continuait à s’éroder et si le cours de la monnaie du commerce international et des réserves officielles venait à chuter lourdement, ce qui commence à susciter l’inquiétude aux Etats-Unis.

Si on prolonge sa courbe depuis la mi-septembre, mesurée par l’indice de sa valeur par rapport aux monnaies de ses grands partenaires commerciaux, le billet vert paraît orienté vers son plus bas niveau depuis 1995, car selon les données hebdomadaires du Chicago Mercantile Exchange, les acteurs du marché à terme parient très majoritairement sur sa baisse.

En 1995, Washington avait décidé de mettre fin à la dépréciation de sa monnaie. Son secrétaire au Trésor, Robert Rubin, affirmait haut et fort qu’il était en faveur d'”un dollar fort”.

Si l’actuel secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, dit faire partie de ceux qui ont inventé la formule, il est de moins en moins pris au sérieux. Ce que les investisseurs voient, c’est sa banque centrale qui s’apprête à injecter des centaines de milliards de dollars dans le système financier.

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à Gyeongju, en Corée du Sud (Photo : Kim Jae-Hwan)

“Le dollar est voué à glisser encore”, pariait lundi le Wall Street Journal, selon lequel “les responsables de la Fed veulent faire monter l’inflation un peu plus haut”.

Le quotidien des affaires a vivement critiqué la politique qui consiste à demander l’appréciation des monnaies des pays émergents et à inonder le monde de la sienne. “La dévaluation du dollar n’est pas une stratégie mondiale de croissance”.

La baisse du dollar entraîne en effet une cascade de complications en dehors du pays.

Le dollar reste la clé de voûte du système monétaire international. Il est vendu ou acheté au cours de 85% des 4.000 milliards de dollars de transactions quotidiennes sur le marché des changes. Il sert dans la facturation de la majorité du commerce international, en dehors des échanges internes à la zone euro. Il est la monnaie de 62% des réserves en devises étrangères des Etats.

Selon la Réserve fédérale, 580 milliards de dollars en pièces et billets circulaient en dehors des Etats-Unis en 2009.

Toute baisse brutale affecte la confiance d’un nombre incalculable d’acteurs économiques et financiers. Généralement, elle fait grimper le cours de l’or, qui passe pour la meilleure protection contre l’inflation.

“La politique monétaire américaine est menée dans l’intérêt de l’économie américaine, c’est normal. Quelles en sont les conséquences sur le reste du monde? Beaucoup disent que cela pose problème”, relevait samedi le directeur général du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn.

Paul Volcker, l’ancien président de la Fed qui contribua à la puissance du billet vert en terrassant l’inflation américaine en 1982, appelait début octobre à “maintenir une certaine confiance dans le dollar”. “Sinon, rien de tout cela ne fonctionnera”, ajoutait-il en référence à la politique économique et monétaire américaine.

La semaine dernière, le gouverneur de la Banque d’Angleterre, Mervyn King, disait craindre que les désordres actuels sur les changes ne dégénèrent: Sans coopération, “ce n’est qu’une question de temps avant qu’un ou plusieurs pays n’ait recours au protectionnisme”, comme dans les années 1930.

En 1931, la décision de son institution de dévaluer de plus de 20% la livre, monnaie du commerce international de l’époque, avait eu un effet désastreux sur l’économie mondiale.

Mais les cambistes d’aujourd’hui ne parient pas sur une telle issue. “Il nous semble que les marchés sont sur le point de demander aux Etats-Unis de mettre leurs actes en conformité avec leurs paroles”, indiquait lundi Neil Mellor, analyste à Bank of New York Mellon, en référence aux assurances de Tim Geithner sur le dollar fort.