Défense : la crise pousse les Européens à une coopération accrue

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és de coopération franco-britannique de défense (Photo : Lionel Bonaventure)

[02/11/2010 17:40:46] BRUXELLES (AFP) Le rapprochement militaire franco-britannique, scellé mardi, illustre une tendance générale des pays européens en temps de crise budgétaire à mutualiser des équipements coûteux, sans aller toutefois jusqu’à fusionner leurs armées, même si certains en rêvent.

La mise à disposition réciproque de matériels et de troupes par les deux principales puissances militaires de l’Union européenne est d’abord une conséquence du désarmement unilatéral à l’oeuvre sur le Vieux continent depuis la fin de la Guerre froide.

Ces 20 dernières années, les Etats européens ont très largement touché les dividendes de la paix, les dépenses militaires constituant une facile et populaire variable d’ajustement.

Même si Paris et Londres sont parmi les rares à respecter le seuil de 2% de leur PNB consacré à la défense qu’a fixé l’Otan à ses membres, -dont 21 appartiennent à l’UE-, les deux pays sont loin des 3,7% et 4,4% qu’ils consacraient à leur défense à la fin de la confrontation Est-Ouest.

Les efforts dans ce domaine d’autres grands Etats comme l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne sont encore plus faibles.

Face à la crise, la plupart des Européens ont décidé de nouvelles réductions budgétaires, avec des effets parfois spectaculaires: le Royaume-Uni va se retrouver sans porte-aéronefs pendant cinq ans et l’Allemagne va réduire de moitié les effectifs de ses soldats déployables à l’extérieur.

Le 24 septembre, le ministre français de la Défense Hervé Morin avait brandi le spectre d’une Europe réduite à n’être plus à terme qu’un “protectorat” sous “condominium sino-américain”.

Certains voudraient quand même aller encore plus loin.

Le président du Conseil italien Silvio Berlusconi a affirmé vendredi en marge d’un sommet européen que les Etats pourraient même diviser par deux leurs budgets Défense s’ils mettaient tout en commun.

Le sujet, a-t-il indiqué, sera à l’ordre du jour du prochain sommet de l’UE les 16 et 17 décembre, après avoir été débattu une semaine plus tôt par les ministres européens de la Défense.

Même si l’idée d’une armée européenne intégrée est un objectif bien connu de la diplomatie italienne, elle est cependant pour l’instant largement hors d’atteinte.

Il faudrait réviser le traité de Lisbonne, qui stipule que l’organisation chargée de la défense des Européens, c’est l’Otan.

Le très atlantiste ministre britannique de la Défense, Liam Fox, a été clair: l’accord franco-britannique est un moyen de réaliser des économies d’échelle, et non un pas de plus vers une armée européenne.

Plus modestement, a expliqué M. Morin, il faut “une analyse des capacités que nous voulons garder en toute souveraineté, de celles que nous voulons mutualiser et de celles qui pourraient être (utilisées) en interdépendance”, pour les pays qui n’en seraient pas dotés.

La création l’été dernier par la France, l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas d’une flottille commune d’avions de transport tactique, dotée à termes d’Airbus A400 M, reflète déjà une tendance de fond à la coopération.

Mais si les pays d’Europe semblent aujourd’hui conscients de la nécessité de coordonner leurs politiques de défense, y compris industrielles, c’est qu’il existe un autre enjeu: celui d’éviter une perte catastrophique de compétences technologiques et opérationnelles dues aux baisses de commandes et aux réductions de format.

“Cela peut être une chance”, selon Jean-Pierre Maulny, auteur d’un mémoire sur “l’UE et le défi de la réduction des budgets de défense”, publié par un club de réflexion parisien, l’IRIS.

On peut, assure-t-il, améliorer la “cohérence des outils de défense nationaux dans un cadre européen et ce sans que les Etats n’abdiquent leur souveraineté nationale”.