L’OMC avertit le G20 des risques protectionnistes des turbulences monétaires

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écran annonçant la tenue du G20 à Séoul, le 4 novembre 2010 (Photo : Jung Yeon-Je)

[04/11/2010 17:16:52] GENEVE (AFP) L’Organisation mondiale du commerce a mis en garde jeudi les pays du G20 contre les “turbulences” récentes observées sur les marchés des changes qui alimentent des pressions déjà grandissantes de protectionnisme, faisant peser de lourds nuages sur la reprise mondiale.

Dans son quatrième rapport sur les politiques commerciales des vingt économies les plus riches de la planète, l’OMC reconnaît que ces dernières ont globalement “continué à résister aux pressions protectionnistes” entre mi-mai et mi-octobre.

Mais les tentations se multiplient chaque jour dangereusement, relève l’organisation qui voit “des signes d’intensifications des pressions protectionnistes” provoquées par un chômage élevé persistant, des déséquilibres macro-économiques et, fait nouveau, “des tensions sur les changes”.

“Les turbulences sur les marchés des changes” génèrent même, selon l’OMC, “les risques les plus élevés pour l’économie mondiale”.

“La stabilité du système commercial sera sérieusement menacée si les mouvements de monnaies se transforment en ce que certains perçoivent comme une poursuite d’avantages comparatifs créés par les changes”, insiste-t-elle dans une lettre au G20 publiée également jeudi avec l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced).

La menace est prise d’autant plus au sérieux que l’économiste en chef du Fonds monétaire international (FMI), Olivier Blanchard, vient de revoir à la baisse ses prévisions de croissance, tablant pour 2010 et 2011 sur 3 à 4%, contre 4,8% en 2010 et 4,2% l’an prochain encore prévus le mois dernier.

Dans ce contexte de reprise difficile, nombre de pays s’accusent mutuellement de jouer sur leur monnaie pour favoriser leurs exportations ou protéger leur marché intérieur. Le sujet est même devenu brûlant et devrait être au coeur du prochain sommet du G20 les 10 et 11 novembre.

Le président brésilien sortant, Luiz Inacio Lula da Silva, dont le pays souffre de la forte appréciation de sa monnaie, le real, a d’ores et déjà prévenu mercredi qu’il allait se “battre” lors de cette rencontre contre la “guerre des monnaies” entre la Chine et les Etats-Unis.

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énéral de l’OMC Pascal Lamy, le 2 septembre 2010 à Jouy-en-Josas (Photo : Eric Piermont)

Les pays de l’Union européenne ont pour leur part déjà adopté un texte vendredi, exhortant les grands pays de la planète à “éviter” une bataille des changes ainsi que “toutes les formes de protectionnisme”.

Pour l’OMC, la Cnuced et l’OCDE, une “vigilance accrue” est nécessaire sur cette menace, augmentée par une “accumulation constante de mesures qui retreignent ou créent des distorsions pour le commerce et les investissements”.

Elles tirent également la sonnette d’alarme sur les plans de sauvetage mis en oeuvre au plus fort de la crise et qui pèsent désormais lourdement sur la concurrence mondiale.

Ainsi, selon elles, seulement 15% des mesures d’urgence introduites ont été supprimées par les gouvernements.

Elles enjoignent en conséquence les membres du G20 à accélérer le retrait de ces plans, ayant atteint, selon elles, 2.000 milliards de dollars au 15 octobre.

Cette question délicate devrait être également soulevée lors du prochain G20, après la décision mercredi de la Réserve fédérale américaine (Fed) d’injecter 600 milliards de dollars dans l’économie.

Une mesure qui n’a pas manqué d’inquiéter les concurrents des Etats-Unis, dont l’Allemagne.

Pour Frank Schäffer, un responsable pour les questions financières du parti libéral allemand (FDP), “émettre à nouveau de la monnaie ex nihilo va faire l’effet d’un tsunami sur l’économie mondiale”.

“Je redoute que (cela) ne conduise à un nouveau cycle de protectionnisme”, s’est-il alarmé.