Les “Pinocchio” mettent leur nez dans le discours vert des entreprises

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Banderole des militants des Amis de la Terre, le 15 octobre 2005 (Photo : Georges Gobet)

[09/11/2010 13:45:01] PARIS (AFP) C’est le genre de récompenses dont les entreprises se passent volontiers: les “prix Pinocchio”, dévoilés mardi soir par Les Amis de la Terre, permettent à l’association de dénoncer, sur un ton décalé, certains discours “faussement développement durable”.

A qui le tour après Bolloré, Total, EDF ou Areva, les groupes français “distingués” lors des deux premières éditions? Les “Pinocchio” 2010, élus à partir des votes d’environ 6.000 internautes, devaient être remis par des comédiens au cours d’une cérémonie à Paris.

“Les prix Pinocchio récompensent le double discours d’entreprises françaises, avec parfois un décalage entre le discours de façade et les impacts de leurs activités, notamment dans les pays du sud”, souligne Aloys Ligault, chargé de campagne Responsabilité des entreprises aux Amis de la Terre.

Ils sont remis dans trois catégories distinctes: droits de l’Homme, environnement et “greenwashing” (ou écoblanchiment, lié à l’usage abusif d’arguments environnementaux dans la publicité et le marketing).

Les “Pinocchio” sont l’équivalent français d’autres “prix citron” de l’environnement, comme le “Public Eye Award” remis chaque année en Suisse en contrepoint du Forum économique mondial de Davos ou le “Worst Lobby Award” qui distingue de façon humoristique depuis 2005 à Bruxelles “les pratiques douteuses des groupes de pression dans le domaine du changement climatique et des réglementations financières”.

Lors du sommet de Copenhague fin 2009, le Climate Action Network (CAN), qui rassemble près de 500 ONG du monde entier, a assuré l’animation en remettant ses fameux “Fossiles du jour”, devenus l’un des rituels des rendez-vous climatiques, aux “pays qui font le plus d’efforts pour freiner l’avancée des négociations”.

Ces manifestations festives permettent aux associations de s’adonner à “une illustration médiatique d’un travail de recherches et de plaidoyer qui a lieu tout au long de l’année”, précise Aloys Ligault des Amis de la Terre.

Car si la forme se veut “décalée et humoristique”, le fond reste “sérieux”, l’objectif étant de dénoncer les impacts sociaux ou environnementaux de certaines activités, rappelle-t-il.

Pour déterminer les entreprises nominées aux “Pinocchio”, l’association s’appuie sur des informations fournies par son propre réseau international (70 organisations) et par d’autres collectifs (Peuples Solidaires et le Crid, le Centre de recherche et d’information pour le développement).

“C’est malheureusement assez facile de trouver des cas d’entorses. Il y a un décalage entre l’encadrement juridique des entreprises au nord et au sud, ce qui facilite une certaine déresponsabilisation”, selon l’association.

En matière de publicité, les entreprises progressent lentement: “On est plus dans le greenwashing à la papa, c’est-à-dire dans le mensonge éhonté. En revanche, la torsion de la vérité continue, on est dans des discours plus subtils”, estime Jacques-Olivier Barthes, porte-parole de l’Observatoire indépendant de la publicité (OIP), partenaire des Pinocchio.

Un spot du Crédit agricole sur les bienfaits du “greenbanking”, diffusé dans plusieurs pays mais pas en France, constitue à ses yeux la principale “sortie de route” de l’année. Ce qui fait de la “banque verte” le grand favori pour succéder à EDF au palmarès de la catégorie.