A partir du 23 courant et pour trois jours, Tunis sera la capitale de l’assurance-crédit à l’export pour les pays arabes et musulmans. En effet, le consortium des compagnies nationales de près de 30 pays tiendra son assemblée générale élective et de la présidence tournante qui reviendra à la Tunisie, représentée par la COTUNACE.
Pour trois ans donc, Habib Daldoul sera président de cette galaxie, qui détient la clé pour étendre l’aire marchande arabo-africaine et asiatique, sachant qu’Aman Union englobe des pays membres tel la Malaisie.
La diversification des axes marchands : un apport de croissance et un gage de résilience
Les pays arabes et africains -et le constat vaut pour une partie des pays asiatiques- sont trop dépendants de leurs marchés traditionnels pour leurs exportations. Ils ont besoin de se créer de nouvelles «droping zones» pour rebondir, commercialement. Cela est particulièrement pesant pour les pays du Maghreb, «otages» de leurs échanges à près de 80% de leur premier client, fournisseur et partenaire, l’Union européenne. Leurs marchés limitrophes, on dira «naturels», leur restent encore fermés ou inconnus, en tous cas, insuffisamment exploités.
Ce cloisonnement est préjudiciable car il réduit les volumes d’échanges intra maghrébins à peau de chagrin, soit à près de 5% du total de leur commerce extérieur.
L’extension de leur aire marchande devient, par conséquent, une nécessité de ce point de vue parce qu’elle pourrait leur procurer un appoint de croissance non négligeable. Outre que d’un point de vue logique, la situation devient de plus en plus inacceptable, car ces pays sont à un taux d’exposition extrêmement avancé avec l’Europe et encore cloisonnés entre eux. Des chiffrages, quoiqu’approximatifs mais sérieux, parlent de 1 à 2 points de croissance du PIB des pays du Maghreb dans l’hypothèse d’une libéralisation des échanges commerciaux entre les pays de la région.
Que l’on se rappelle qu’un point de croissance, pour un pays comme la Tunisie, représente 10.000 emplois nouveaux. Là, on se rend compte du gâchis. Ajouter que plus d’axes marchands, c’est fatalement un supplément de résilience, cette fameuse résistance aux chocs extérieurs, qui rend les économies moins vulnérables atténuant les tensions sur l’emploi qui peuvent survenir par temps difficiles.
Le challenge pour Aman Union
Nous considérons que le consortium arabo-islamique de l’assurance-crédit à l’export peut susciter des ambitions légitimes pour nos secteurs exportateurs. De ce fait, il peut faire naître une problématique collective laquelle inciterait les pays à se donner des stratégies volontaristes. Ne nous voilons pas la face, nos Etats ont jusque-là forcé les opportunités en créant des cadres propices pour doper le commerce extérieur. L’expérience tunisienne est assez éloquente de ce point de vue. Le programme PDE, promu par l’Etat en partenariat avec l’UE, a bien ouvert un nouveau champ d’opportunités dont nous avons perçu les dividendes au concret via Famex 1 et 2. Nous considérons qu’une concertation à cette large échelle de l’Aman Union ne peut être que porteuse.
Faire exploser les objectifs pour les échanges arabo-africains et asiatiques est un troisième poumon pour nos économies, et le parterre d’opportunités est tout aussi riche que varié. A l’évidence, l’Afrique recèle des potentialités remarquables. Il y a de la matière, dirons-nous, mais les mœurs commerciales africaines sont différentes de ce que nous connaissons, en matière d’exigence de qualité, de délais de livraison, de modes de paiement. Mais l’effort en ce cas est tout à fait à portée. Les mécanismes de couverture existent et les assureurs peuvent les implémenter. Cela vaut pour le risque commercial, lequel couvre le défaut de paiement de l’ordonnateur étranger ou le risque politique et financier du pays. Pareil pour le risque de non performance, qui indemnise le banquier de l’exportateur quand celui-ci, pour raison de non performance, n’arrive pas à satisfaire les commandes pour raisons diverses mais qui relèvent de sa responsabilité.
Bien entendu, l’échange d’expertise ne fera qu’avancer la cause de l’expansion du commerce extérieur. Pour autant l’horizon n’est pas entièrement dégagé.
L’impératif du renseignement commercial
Autant au plan technique les choses peuvent être adaptées, autant sur terrain persistera une grande inconnue. Tout l’édifice d’accompagnement, tant pour la couverture d’assurance que pour le financement bancaire, est dépendant d’une ressource essentielle, à savoir le renseignement commercial sur les acheteurs d’Afrique et d’Asie. Et, en la matière, c’est le black out total.
On est en friche. Faute d’informations commerciales sur les acheteurs, les assureurs sont dans l’incapacité de cerner le risque et par conséquent de fixer des paliers de couverture, c’est-à-dire d’indemnisation en cas de sinistre, entendez, non paiement. Pareil pour les banquiers lesquels à défaut de renseignement ignorent les recours en recouvrement et donc se déroberaient aux demandes de financement.
Aman Union affiche tout haut sa volonté de promouvoir une base de données. A l’évidence cette initiative, à terme aboutira à des résultats probants et concrets. Mais si l’on veut bouger les choses dans le futur proche, faut-il passer par les partenariats avec les officines de renseignement internationales, ce qu’ont hésité à faire les diverses compagnies nationales, séparément.
A présent qu’Aman Union possède la taille critique nécessaire pour et le bargaining power adéquat, les conditions de négociation deviennent plus clémentes et les choses pourraient aller plus vite. Il ne sert à rien de spéculer sur les résolutions du Congrès.
Vers quelle solution s’orientera l’AG d’Aman? Waite and see!