En marge de la Semaine Mondiale de l’Entrepreneuriat, une manifestation dédiée à l’ensemble des associations socioprofessionnelles du pays, au monde universitaire, aux diplômés de l’enseignement supérieur et surtout aux jeunes agitateurs d’idées dans la vie active, organisée du 7 au 14 novembre 2010, à l’initiative du Centre des Jeunes Entrepreneurs (CJE) de l’Institut arabe des chefs d’entreprise, bon nombre d’observateurs ont retenu la pertinence et l’acuité de l’intervention de Cherif Zaouch, président de l’Institut tunisien de technologie appropriée pour un développement durable, qui a plaidé, à La Maison de l’Entreprise, pendant la 2ème journée du Forum Jeunes Entrepreneurs Tunisiens, pour l’émergence des entreprises vertes dans le pays, l’affirmation de l’écolo-citoyen, le refus de la croissance prédatrice, fille de la cupidité et des conflits d’intérêts de l’ère industrielle occidentale et la promotion d’un mode de développement capable, dit-il, de ré-encastrer l’économie dans la société, au lieu de la laisser conduire la société.
«Les pays du Sud doivent éviter la surproduction des produits manufacturés, s’opposer au virus de la surconsommation à l’occidentale, préserver leurs ressources naturelles et adopter un mode de développement fondé sur les technologies durables dans les domaines des énergies, de l’agriculture, de l’architecture, du bâtiment et de l’industrie», déclare M. Zaouch. Pour lui, les énergies renouvelables (éoliennes, solaires, bio-méthane, bio-masse, marais motrice…) sont une source d’autonomie pour les pays émergents par rapport au marché mondial des hydrocarbures, un facteur de rééquilibrage décisif dans les rapports de force entre les principales places marchandes de la planète, un retour salutaire vers un entrepreneuriat vert, identitaire, à fort contenu culturel et une opportunité stratégique de taille pour le Sud afin d’améliorer sa compétitivité, de rallier les normes internationales liées à l’environnement et d’opposer au Nord, de tout temps prédateur et énergétivore, un mode de croissance vert respectueux des traditions, de la vie et du temps, qui passe inexorablement…!
Les atouts écologiques de la Tunisie
Pour notre interlocuteur, le pays est en mesure de devenir le pôle des éco-industries du Sud de la Méditerranée, en faisant de la conversion écologique de l’économie nationale l’un des leviers de l’employabilité, de la croissance, des métiers de demain et de l’intégration du tissu industriel local dans la dynamique entrepreneuriale mondiale liée à la labellisation sociale et environnementale.
A cet égard, les techniques de construction en Tunisie, nécessitant depuis des décennies l’utilisation de matériaux (ciment, briques rouges, fer, bois…) dispendieux et outrageusement énergétivores, peuvent opérer un retour aux matières locales, à l’instar du «tuf» ou torba sobre, économe et disponible en grande quantité dans les différentes régions du pays.
D’ailleurs, les vieux murs (dit tabia), encore présents au sud (Djerba, Tozeur, Zarzis, oasis de Gabès notamment) et au sahel (Msaken et ses alentours), témoignent encore de la solidité de l’habitat, de la permanence des valeurs du voisinage, de la cohérence architecturale des ancêtres et du rôle utilitaire d’un type de construction, soucieux d’harmonie, d’intégration et d’équilibre.
Le plâtre aussi, dont la fabrication artisanale (avec une température à 300 degrés que l’on pourrait obtenir par des fours solaires) est totalement maîtrisée dans les villages andalous (Testour, Soliman…) depuis des lustres, est en abondance chez nous. C’est le liant privilégié pour les toitures traditionnelles (voûtes, coupoles…), susceptibles d’entretenir la fraîcheur en été et la chaleur en hiver.
Les briques cuites à 6 et 3 trous, à base d’argile, utilisées à des fins semi-industrielles à l’aide de grignon comme combustibles, continuent à faire partie des traditions des entrepreneurs du Cap Bon. Avis donc aux architectes et aux professionnels du bâtiment de tout le pays de se pencher et de méditer sur l’intelligence des anciens et de reprendre à leurs comptes les bonnes pratiques d’antan.
Il appartient aux jeunes entrepreneurs tunisiens, conclut le conférencier, d’éviter les pièges insidieux de la société de consommation, qui pousse à l’extrême le dogme du laisser-faire et d’entamer l’écologisation progressive de leur vision de l’entrepreneuriat.