L’instauration d’une “taxe Google” inquiète les acteurs du numérique

photo_1290600714065-1-1.jpg
ège de Google à Dublin le 19 novembre 2010 (Photo : Peter Muhly)

[24/11/2010 12:13:10] PARIS (AFP) Le petit monde des nouvelles technologies s’insurge contre la “taxe Google”, un prélèvement sur l’achat d’espaces de publicité en ligne voté au Sénat dont les principaux acteurs de l’économie numérique craignent de pâtir.

Adopté mardi malgré les “réserves” du gouvernement, le dispositif est le fruit d’un amendement au budget 2011 présenté par le rapporteur général UMP de la commission des Finances, Philippe Marini. Il pourrait s’appliquer dès le 1er janvier 2011, s’il est confirmé le mois prochain par les députés.

“L’objectif des pouvoirs publics est clairement de taxer Google et les gros acteurs qui arrivent à échapper au système (fiscal) français”, explique Marie Delamarche, directrice déléguée du Syndicat des régies internet (SRI), qui représente les principales régies publicitaires françaises.

Mais, dénonce-t-elle, “l’amendement Marini va taxer indifféremment tous les acteurs puisqu’il taxe les acheteurs de publicité en ligne” et pas les revenus publicitaires, avec pour conséquence de “mettre en péril de petits acteurs français”.

Devant le Sénat, M. Marini a défendu “la taxation des annonceurs” comme “la seule solution, compte tenu de la localisation hors de France des principaux vendeurs d’espace publicitaire en ligne, tels que Google”, pour “faire prévaloir l’équité entre les différents supports de publicité”.

“La publicité à la télévision comme dans la presse papier est soumise à taxation. Le statu quo entraînerait une distorsion de concurrence”, a-t-il justifié.

En implantant leurs sièges dans des pays à fiscalité réduite comme l’Irlande, Google et d’autres géants de l’internet échappent à toute imposition dans les autres pays, où ils engrangent la majeure partie de leurs revenus publicitaires.

L’amendement Marini se trompe de cible, rétorque Guillaume Buffet, co-président de l’association Renaissance Numérique, qui réunit chercheurs et chefs d?entreprises de high-tech: “Ce n’est pas aux acteurs du numérique de trouver un moyen d’harmoniser la fiscalité européenne”.

Stigmatisant une “méconnaissance totale du secteur et de l’importance qu’il a dans le futur développement de la France”, M. Buffet trouve “désespérant” de “faire payer les pots cassés aux acteurs qui sont en France”.

“On pourrait croire que 1%, ce n’est pas grave, mais ça l’est sur un métier qui génère des marges extrêmement faibles”, poursuit-il.

Cet amendement “va dans le mauvais sens”, renchérit Roland Tripard, président du directoire de SeLoger.com, s’étonnant qu'”au lieu d’aider le secteur à se développer, on l’assomme avec des taxes”.

Avant même le vote du Sénat, l?Association des services internet communautaires (Asic) avait mis en garde contre une mesure risquant de mettre en péril l?activité de “nombreux acteurs et de l?économie numérique, qui sont en pleine croissance et qui ont besoin, pour se développer et atteindre l?équilibre, de visibilité et de stabilité sur le plan de la fiscalité”.

Cette taxe de 1% sur l’achat de publicité en ligne concernera les transactions électroniques entre entreprises dites de business to business (B2B), et sera acquittée dans les mêmes conditions que la TVA. Son produit est estimé entre 10 et 20 millions d’euros.

Devant la levée de boucliers qu’il a suscitée, M. Marini a en revanche retiré un deuxième amendement dans lequel il proposait de taxer de 0,5 % le commerce électronique, et qui aurait rapporté plusieurs centaines de millions d’euros par an au fisc.