ésentation du budget, le 30 septembre 2010 (Photo : Dominique Faget) |
[24/11/2010 13:46:32] MADRID (AFP) Sa situation financière inquiète, faisant chuter sa Bourse et bondir ses taux obligataires, mais l’Espagne, quatrième économie de la zone euro, est pour de nombreux experts “trop grosse pour tomber” et, surtout, coûterait trop cher à sauver.
Pour venir au secours de la Grèce, il a fallu débourser 110 milliards d’euros. Pour l’Irlande, le plan de soutien coûtera 80 à 90 milliards.
Le cas espagnol est d’une autre dimension: “cela coûterait jusqu’à 500 milliards d’euros”, a estimé cette semaine Cornelia Meyer, PDG de la société de conseil MRL Corporation, sur la chaîne américaine CNBC.
“Juste après l’Irlande nous avons le Portugal et puis l’Espagne, et l’Espagne sera le gros poisson”, a-t-elle jugé.
Et si la bourse portugaise souffre moins ces jours-ci que son homologue madrilène, c’est que “les marchés ont intégré que le Portugal va sûrement devoir demander une aide, du coup ils regardent le prochain dans la file”, note Fernando Hernandez, responsable de gestion à la banque Inversis.
Un panneau “A vendre” sur une maison de Madrid, le 28 octobre 2010 (Photo : Dominique Faget) |
Si le Portugal doit être soutenu, “ce n’est pas grave car il est plus petit”. “L’Espagne, c’est une autre histoire: ce sont de nombreux milliards d’euros qu’il faudra mettre sur la table”.
Même s’il confie n’avoir “pas fait d’estimation” à ce sujet, l’analyste Jesus Navarro, spécialiste chez Natixis de l’Europe du Sud, considère que le chiffre de 500 milliards est dans un “ordre de grandeur qui ne paraît pas surprenant”.
“Cela voudrait dire qu’on consacrerait entièrement le FSEF (Fonds européen de stabilisation financière, ndlr) à l’Espagne, alors qu’on va déjà en prélever près de 100 milliards pour l’Irlande”, s’inquiète-t-il.
“Comme l’Espagne est environ quatre fois plus grosse en PIB que l’Irlande, c’est un chiffre qui a du sens”, confirme M. Hernandez.
“Après la crise de la dette irlandaise, l’Espagne est devenue une question centrale parce que les investisseurs craignent que, si son endettement devient trop important pour qu’elle en vienne à bout elle-même, il puisse être trop lourd” pour un sauvetage de l’Union européenne et du FMI, estime Kathleen Brooks, directrice de recherches à Forex.com à Londres.
Même pessimisme chez les analystes de Saxo Bank: “nous prévoyons que l’Espagne demande de l’aide en 2011, mais le fonds (européen, ndlr) n’a pas la magnitude requise pour l’aider, donc l’Espagne devra signer des accords de prêts bilatéraux avec l’Allemagne ou la France”.
“L’Espagne, c’est 12% de l’économie de la zone euro, tandis que la somme de l’Irlande, du Portugal et de la Grèce, cela fait 6%”, souligne justement Rafael Pampillon, économiste à l’IE Business School de Madrid.
“L’Espagne a une taille qui ne lui permet pas de tomber et la financer, c’est très compliqué”, insiste-t-il.
“Oui, il y a le +too big to fail+, mais on avait dit ça aussi à l’époque de Lehman Brothers, et puis Lehman Brothers est tombé”, note Jesus Navarro.
Mais “dans le fond, je pense quand même que c’est un pays d’une autre envergure que la Grèce, le Portugal et l’Irlande, qui ne tombera pas comme ça car il a encore des marges de manoeuvre en termes d’économies ou de hausses d’impôt”, ajoute-t-il, soulignant aussi sa dette, “largement en-dessous de celles de ces pays”.
Si cela arrivait, “ce serait un gros choc pour la zone euro, mais je ne pense pas qu’on puisse en arriver là, personne n’a intérêt à ce cataclysme”.
Pour M. Hernandez, “si l’Espagne devait demander une aide autour des 450 milliards d’euros, l’euro souffrirait et il y aurait la possibilité d’une séparation” au sein de la zone euro, même si ce scénario d’un sauvetage a une “probabilité extrêmement faible”.