L’Etat tranche un conflit EDF-Areva au Tricastin

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éaire de Tricastin à Bollene (Photo : Fred Dufour)

[24/11/2010 17:13:31] PARIS (AFP) En décidant de prolonger jusqu’à fin 2012 le fonctionnement de l’usine d’enrichissement d’uranium du Tricastin, l’Etat a tranché en faveur d’Areva un des multiples conflits qui opposent le groupe nucléaire français à son frère ennemi EDF.

“L’Etat, sous l’autorité du Premier ministre, vient de rendre son arbitrage (…) le site verra son activité prolongée jusqu’à la fin de l’année 2012”, a déclaré mercredi le ministre de l’Energie Eric Besson.

Qualifiant cette question de “pierre d’achoppement” entre Areva et EDF, il a estimé “normal que l’Etat actionnaire, à un moment où nous constatons une divergence d’analyse entre deux grandes entreprises qui relèvent du secteur public, dise: +voilà le cap+”.

Cinq cents emplois étaient menacés dans l’usine Georges-Besse 1, située sur le site de 650 ha du Tricastin (entre Drôme et Vaucluse).

Construite en 1979, cette usine exploitée par la société Eurodif (filiale d’Areva) est le fruit d’une coopération entre la France, la Belgique, l’Italie, l’Espagne et l’Iran (qui en est toujours actionnaire dormant).

Elle enrichit de l’uranium alimentant plus de 100 réacteurs nucléaires en France et à l’étranger mais doit être remplacée en 2012 par les nouvelles installations de Georges-Besse 2 qui emploient un procédé cinquante fois moins coûteux. A pleine capacité, l’usine actuelle consomme en effet autant d’électricité que l’ensemble de l’agglomération parisienne (soit la production de deux réacteurs nucléaires).

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à l’Elysée, le 17 novembre 2010 (Photo : Eric Feferberg)

Faute de contrat avec EDF pour la période 2011-2012, George-Besse 1 risquait de fermer ses portes prématurément dès la fin de l’année.

Le groupe d’électricité français, qui représente 60% de l’activité d’Eurodif, avait en effet décidé de diversifier son approvisionnement en uranium enrichi en se fournissant en Russie.

Auditionnée mercredi matin au Sénat, la présidente d’Areva, Anne Lauvergeon n’a pas semblé informée de l’arbitrage du gouvernement. “Sur Eurodif, nous avons un différend (avec EDF, ndlr) qui porte à la fois sur la fin de cette usine (…) et sur le prix” de l’uranium enrichi, a-t-elle déclaré, peu après l’annonce du ministre de l’Energie.

Interrogé par l’AFP, Areva n’a pas fait plus de commentaire.

EDF a pour sa part confirmé qu’un accord avait été trouvé permettant “de maintenir une activité sur le site de Georges-Besse 1 et de préparer sereinement le démarrage de Georges-Besse 2”.

“C’est une bonne nouvelle qui va permettre d’éviter un plan social”, a réagi Christophe Jean-Gérard, secrétaire de la section CFDT chez Eurodif.

“Ce n’est ni une victoire pour Areva, ni pour EDF mais c’est une bonne chose pour la filière et pour les salariés”, a abondé Marie-Claire Cailletaud, de la CGT-Energie.

Les conditions financières de l’accord n’ont pas été dévoilées. En l’absence de contrat, Areva évaluait ses pertes potentielles entre 300 et 500 millions d’euros, selon des sources internes.

L’Etat serait-il donc parvenu à imposer une armistice entre les frères ennemis du nucléaire? “Nous avons une relation forte avec EDF et nous avons beaucoup de choses à faire ensemble en France”, a assuré la patronne d’Areva mercredi, en soulignant que son groupe faisait 25% de son chiffre d’affaires avec EDF.

Six groupes de travail avaient été mis en place en septembre pour renforcer la coopération entre les deux groupes.

“On croit savoir que ces groupes de travail n’avancent pas: ça a été une opération de communication mais derrière il n’y a pas de fond”, regrette Mme Cailletaud, de la CGT.