Internet : des articles à clés pour ferrer le public et la pub

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à Washington le 19 octobre 2010 (Photo : Nicholas Kamm)

[25/11/2010 08:19:15] PARIS (AFP) Pour attirer toujours plus de publicité ciblée, le nerf de la guerre sur la Toile, des sociétés repèrent les mots-clés les plus recherchés sur internet et produisent des milliers d’articles brodant sur ces thèmes plébiscités par les internautes.

“Pour définir les sujets, on regarde deux choses: +que recherchent les gens sur internet?+ et +où vont les investissements publicitaires?+”, explique Luca Ascani, fondateur et président de Populis, qui se présente comme le premier producteur européen de “contenus à la demande”.

Un algorithme développé par sa société permet d’analyser des millions de mots-clés afin d’en extraire ceux qui marchent sur internet.

Des listes d’intitulés d’articles sont alors établies. A partir de celles-ci, les quelque 1.000 rédacteurs freelance du groupe, qui édite 500 sites en Europe, écrivent leurs articles, qui contiennent les mots-clés imposés dans le titre, mais parfois également dans le corps du texte.

Bien avant le mois de novembre, les recherches sur “Noël” et “cadeaux” pullulent, mais Populis va plus loin en produisant des textes sur une pléthore de mots-clés prévus par son algorithme, avec par exemple des articles sur l’association “hôtel+New York+Greenwich village+Noël”.

“Un bon contenu reçoit beaucoup de trafic, est beaucoup partagé sur les réseaux sociaux et l’internaute y passe beaucoup de temps”, résume M. Ascani. Les sujets les plus populaires (finance personnelle, voyage et shopping) sont souvent intemporels.

Les rédacteurs sont payés au moins 5 euros par article, mais la rémunération augmente en fonction du trafic qu’il attire et des clics sur les publicités ciblées qui s’affichent autour. Celles-ci sont fournies par les régies de géants du web comme Google (AdSense) ou Yahoo.

Populis, fondé en Italie en 2004, produit aujourd’hui 20.000 articles par mois en italien, français, anglais, allemand, néerlandais, espagnol et portugais, qui ne sont relus qu’après leur mise en ligne.

Sur le même modèle, plusieurs entreprises appelées “fermes de contenus” prospèrent aujourd’hui aux Etats-Unis.

La plus importante, Demand Media, devrait bientôt être introduite en Bourse avec une valorisation de plus d’un milliard de dollars. AOL, mais aussi Yahoo!, qui s’est renforcé dans ce domaine en rachetant Associated Content en mai, se sont également lancés.

Certains ont même réussi à prendre pied dans l’univers des médias traditionnels: Demand Media produit ainsi les “conseils de voyage” du site du quotidien USA Today.

En Europe, Populis “voit une possibilité de croissance forte, il n’y a pas de concurrent donc on veut consolider le marché”, indique son fondateur, qui espère produire 100.000 articles par mois d’ici deux ans.

Fonctionnant sur un modèle légèrement différent, le groupe canadien Suite101 s’attaque depuis deux ans au Vieux continent, ouvrant des bureaux à Berlin, Madrid et Paris.

“Nos 1.500 auteurs choisissent eux-mêmes les sujets sur lesquels ils écrivent. Rien n’est imposé, mais ils sont rémunérés en fonction du nombre de clics sur les publicités entourant les articles”, explique son directeur France, Jérémy Reboul.

Ils reçoivent d’ailleurs des conseils du site pour améliorer le référencement de leurs textes et choisir les sujets les plus payants, qui souvent sont intemporels. Tarif moyen: 2,50 euros pour une page vue mille fois.

“C’est un peu comme les royalties. L’article est un capital sur lequel l’auteur touche des intérêts. A court terme ce n’est pas très rémunérateur, mais à long terme si”, affirme M. Reboul.