Le 7 novembre 2010, le président Ben Ali a annoncé dans un discours la mise aupoint d’un programme exécutif pour la convertibilité totale du dinar en deux étapes. «La première couvrant la période 2010-2012 et consistant à parachever la convertibilité courante et la libéralisation de certaines opérations de capital; la deuxième, s’étendant sur la période 2013-2014 devant concerner la libéralisation des opérations de capital restantes, avec la mise en place de règles pour certaines opérations, notamment celles en rapport avec les capitaux à court terme, et la refonte radicale du Code de change de manière à l’adapter à la convertibilité totale du dinar».
Cette décision et celle consistant à lancer des études en vue du rapprochement entre la Banque de l’Habitat et la Société Tunisienne des Banques (STB) afin de créer un mastodonte local de l’industrie bancaire, témoignent de la volonté affichée de faire de la Tunisie une place financière régionale. La promulgation en août 2009 du Code des Prestations financières destinées aux non-résidents, l’ouverture à la finance islamique et le lancement du nouveau projet de la construction d’un port financier off-shore sont d’autres éléments encourageants afin, d’une part, de continuer la mise à niveau du secteur bancaire tunisien et, d’autre part, d’attirer les capitaux et les institutions financières étrangères.
Un des éléments importants dans la législation de change est celui relatif à la réglementation concernant la couverture contre les risques. Le texte législatif de référence en la matière est la Circulaire aux Intermédiaires agréés n°2011-11 du 4 mai 2001 relative au Marché des changes et instruments de couverture des risques de change et de taux.
Cette circulaire, malgré un élargissement en 2007 (Circulairen°2007-27 du 18 décembre 2007) par l’adoption de la réglementation sur les options de change, souffre encore de plusieurs lacunes. Les premières touchent en général l’absence dans la loi tunisienne d’une législation spécifique aux contrats financiers (I). Les deuxièmes sont liées au manque de diversification des instruments financiers déjà autorisés (II) et les troisièmes sont en relation, avec la documentation de telles opérations avec tout le risque juridique que peut comporter une telle absence (III).
I- Lacunes générales liées à l’absence d’une législation sur les contrats financiers
La législation française définie à travers l’Article L.211-1 du Code monétaire et financier les instruments financiers en général. «I. Les instruments financiers sont les titres financiers et les contrats financiers. II. – Les titres financiers sont : 1. Les titres de capital émis par les sociétés par actions ; 2. Les titres de créance, à l’exclusion des effets de commerce et des bons de caisse ; 3. Les parts ou actions d’organismes de placement collectif. III. – Les contrats financiers, également dénommés “instruments financiers à terme”, sont les contrats à terme qui figurent sur une liste fixée par décret.
L’article D211-1 du même code définit les contrats financiers comme étant :
1. Les contrats d’option, contrats à terme fermes, contrats d’échange, accords de taux futurs et tous autres contrats à terme relatifs à des instruments financiers, des devises, des taux d’intérêt, des rendements, des indices financiers ou des mesures financières qui peuvent être réglés par une livraison physique ou en espèces;
2. Les contrats d’option, contrats à terme fermes, contrats d’échange, accords de taux futurs et tous autres contrats à terme relatifs à des marchandises qui doivent être réglés en espèces ou peuvent être réglés en espèces à la demande d’une des parties autrement qu’en cas de défaillance ou d’autre incident conduisant à la résiliation;
3. Les contrats d’option, contrats à terme fermes, contrats d’échange et tous autres contrats à terme relatif à des marchandises qui peuvent être réglés par livraison physique, à condition qu’ils soient négociés sur un marché réglementé ou un système multilatéral de négociation;
4. Les contrats d’options, contrats à terme fermes, contrats d’échange et tous autres contrats à terme relatifs à des marchandises qui peuvent être réglés par livraison physique, non mentionnés par ailleurs au 3, et non destinés à des fins commerciales, qui présentent les caractéristiques d’autres instruments financiers à terme, en tenant compte de ce que, notamment, ils sont compensés et réglés par l’intermédiaire d’une chambre de compensation reconnue ou font l’objet d’appels de couvertures périodiques;
5. Les contrats à terme servant au transfert du risque de crédit;
6. Les contrats financiers avec paiement d’un différentiel;
7. Les contrats d’options, contrats à terme fermes, contrats d’échanges, accords de taux futurs et tous autres contrats à terme relatifs à des variables climatiques, à des tarifs de fret, à des autorisations d’émissions ou à des taux d’inflation ou d’autres statistiques économiques officielles qui doivent être réglés en espèces ou peuvent être réglés en espèces à la demande d’une des parties autrement qu’en cas de défaillance ou d’autre incident amenant la résiliation;
8. Tout autre contrat à terme concernant des actifs, des droits, des obligations, des indices et des mesures, non mentionné par ailleurs aux 1 à 7 ci-dessus, qui présente les caractéristiques d’autres instruments financiers à terme, en tenant compte de ce que, notamment, il est négocié sur un marché réglementé ou un système multilatéral de négociation, est compensé et réglé par l’intermédiaire d’une chambre de compensation reconnue ou fait l’objet d’appels de couvertures périodiques.
Une telle définition, qui doit être législative, aussi complète et claire, peut être adaptée à la réalité tunisienne en supprimant quelques contrats financiers trop complexes et non encore adaptés tant à l’économie tunisienne qu’à l’expérience des praticiens tunisiens. Cette définition pourra mettre les bases d’une législation tunisienne sur les produits dérivés. L’argument principal étant de lier l’utilisation de ces produits à une réalité économique et financière évitant ainsi la tentation spéculative que peut donner l’utilisation de ces produits. L’utilisation de ces instruments doit servir à la couverture d’un risque réel et ainsi toujours annexée à l’existence d’un contrat commercial, industriel, financier ou de prestation de services. Plus de liberté peut être octroyée aux banques afin d’utiliser ces produits pour gérer les ressources financières dont elles disposent.