Tunisie-Finances II : Pour un hub financier, il faut les bons ingrédients


finance-29112010-art.jpgQuel est le rôle des banques privées dans l’édification d’une place financière à
Tunis ?

Une place financière est une ville qui abrite une quantité importante
d’institutions financières, de banques, d’investisseurs institutionnels, marchés
boursiers, assureurs, bailleurs de fonds et capable de satisfaire une grande
partie des besoins de placement et de financement des acteurs économiques. Une
zone qui abrite également nombre de grandes entreprises. Tous les experts
s’accordent à dire que les choix structurels en matière d’organisation
financière ne sont pas sans conséquences sur le développement économique et sur
sa pérennité ainsi que sur la création de nouveaux métiers et de nouvelles
activités pour l’accompagnement du rythme accéléré d’attraction des
investissements, tant publics que privés. D’où la responsabilité des décideurs
et des pouvoirs publics en matière.

En Tunisie, les réformes articulées autour des axes de la diversification de
l’offre et de la restructuration du secteur restent insuffisants. Dans les
couloirs de certaines grande banques “out off record”, de hauts responsables
vous diront officieusement qu’il est encore tôt de parler de place financière à
Tunis, ils ne le diront pas à voix haute.

La récente promulgation du code de prestations des services financiers off shore
a la prétention de doter la place financière tunisienne de préalables pour la
hisser au rang d’un pôle financier régional. Le code vise à encourager les
investisseurs non-résidents, qui doivent, même avec la création du département
off shore de la Bourse des valeurs mobilières de Tunis (BVMT), s’assurer de la
dynamique du marché financier en interne…

Nous avons 21 banques avec l’entrée en jeu d’Ezzitouna Bank dont 10 accaparent
près de 90%, de l’actif bancaire.

L’ambition de la Tunisie est qu’en 2014, la part des services bancaires dans le
PIB atteigne les 5% contre 3% actuellement et qu’on arrive à dédier une agence
bancaire pour 7000 habitants et la réduction de la part des créances classées à
moins de 7% en 2014 contre 15% en 2008. Aujourd’hui, nous en sommes à la
création de 80 agences bancaires par an. Les banques privées y compris la
BIAT,
première banque privée du pays, n’arrivent pas, à ce jour, à mettre en place des
produits révolutionnaires ou une stratégie communicationnelle conquérante,
innovante et agressive. Le paysage bancaire privé en devient presque ennuyeux
tant ses produits s’alignent tous les uns sur les autres comme s’il s’agissait
d’accords de bon voisinage ou de “Mekhdha fil khater”. On se préserve les
susceptibilités les uns des autres alors que le marché a grand besoin d’être
boosté grâce à une compétitivité plus axée sur des prestations et des offres
différentes et attractives.

Le programme de l’Etat pour la constitution de plusieurs pôles bancaires est
louable mais il doit impérativement être suivi par des initiatives privées
allant dans le même sens. Car si les privés tunisiens ne s’accordent pas
confiance et n’ont pas confiance dans leur système, comment pourrons-nous dans
ce cas attirer les investisseurs, fonds ou entreprises étrangères de renom?

La diversification des produits financiers est une condition sine qua none pour
la réussite d’un pôle et un facteur important dans un marché où la réussite est
déterminée par la qualité et la diversité de l’offre et la demande. Mohamed
Rekik, directeur général de la Supervision bancaire à la
BCT avait exprimé
l’ambition légitime de la Tunisie à être une plateforme de services complets
pour des banques internationales, off shore régionales et internationales qui
interviennent au niveau de tout les marchés sans restriction aucune. Il a
déclaré à l’occasion “Nous voulons être un hub qui puisse offrir une panoplie de
services diversifiés. Les banques anglaises sont très présentes sur le marché
financier international, tout ce qui est back office à londrès est très couteux,
pour elles, s’installer en Tunisie à 2heures de vol avec des moyens
technologiques de premier ordre serait l’occasion d’attirer des investisseurs
avec une ouverture sur le marché local et une ouverture sur les marchés de la
région, la Lybie l’Algérie”. L’ambition est légitime, il faut y mettre les
moyens humains, réglementaires, technologiques et communicationnels.

Pour que la City of London soit devenue la troisième place financière
internationale, il a fallu, y regrouper quatre types d’établissements bancaires,
commerciales, privées de gestion de fortune, spécialisées dans les prêts
hypothécaires et les banques d’investissements. 55% des actifs du secteur
bancaire britannique sont détenus par des banques étrangères. Il a fallu
également y développer le secteur des assurances, pour devenir la troisième
place mondiale de l’assurance derrière les USA et le Japon. Londres est le
deuxième marché mondial de La gestion des Fonds et la première Bourse européenne
avec une capitalisation de près de 2 500 milliards d’ €. C’est aussi le plus
grand marché mondial de métal non ferreux et le plus grand marché mondial de
l’or et de l’argent. La place de Londres est, également, rappelons, le site qui
regroupe les plus grands journaux britanniques et où est véhiculé une
communication financière des plus consistantes au Monde.

Avec autant d’atouts, comment ne pas devenir l’une des premières places
financières mondiales ?

Et si avant de parler de hub financier, on commençait par le commencement ?
Infrastructures, tailles des banques, diversifications des services,
technologies avancées en services financiers et télécommunications,
communication transparente, niche ou positionnement et prestations innovatrices.
C’est le meilleur moyen d’arriver plus sûrement mais nous avons intérêt à y
aller plus rapidement car le « lentement » est un luxe dans un monde qui avance
à pas géants.