Tunisie : “La BTS est un projet socialement rentable en matière de création d’emplois…”, affirme M. Hafsaoui

hafsaoui2203.jpgDepuis sa création, en 1998, la Banque Tunisienne de Solidarité (BTS) est
devenue un acteur majeur de promotion de l’entreprenariat en Tunisie. Le concept
de solidarité qui a été à l’origine de sa création a pris un tournant plus
important ces dernières années, à savoir celui de la stimulation de l’initiative
privée auprès des jeunes tunisiens. Une tâche qui n’est pas aussi facile qu’on
le pense.

Selon M. Lamine Hafsaoui, son président-directeur général, la BTS est un
mécanisme qui s’avère désormais rentable. Après treize années d’existence, la
banque a réussi à concilier, enfin, entre sa vocation sociale et son statut
d’institution financière cherchant la rentabilité, ce qui n’était pas le cas au
début de sa création. Entretien.

Webmanagercenter : Peut-on dire que la BTS est devenue une banque rentable ?

Lamine Hafsaoui : Permettez-moi tout d’abord de préciser que la Banque
Tunisienne de Solidarité (BTS) est un mécanisme de développement dont les
objectifs primordiaux sont: la lutte contre le chômage par la création d’emploi
et l’autocréation d’emploi surtout pour les jeunes diplômés de l’enseignement
supérieur ou de la formation professionnelle, contribuer au développement de
l’investissement privé par la facilitation de l’accès aux crédits et contribuer
également à la politique de développement régional par l’accès des jeunes des
différentes régions au financement, ce qui permet de financer leurs projets.

Les fonds utilisés par la BTS sont des fonds publics. C’est la communauté
nationale qui se solidarise avec les jeunes. Elle leur permet d’accéder au
financement à des conditions favorables avec un taux d’intérêt faible, l’absence
de garantie et des procédures légères. Cela n’empêche que les interventions de
la BTS doivent être efficaces dans la mesure où le financement doit être ciblé
en visant les projets qui ont un minimum de rentabilité et de viabilité pour
éviter tout gaspillage des ressources nationales déjà limitées.

Nous avons réalisé notre premier bénéfice en 2008, soit 0,5 million de dinars
pour passer à 1 million de dinars en 2009 et on prévoit d’atteindre 2 millions
de dinars en 2010. Ceci prouve que ce mécanisme avant-gardiste, créé par le
président de la République en 1998, s’est avéré porteur puisqu’il a été adopté
par la population tunisienne et par la jeunesse.

Les résultats démontrent que c’est un projet socialement rentable surtout en
matière de création d’emplois dans les zones les plus reculées. Ceci montre
également qu’on peut faire du social tout en étant économiquement bénéficiaire
malgré les marges très limitées partagées par la BTS.

Les microprojets constituent une composante essentielle de l’activité de la BTS.
Qu’en est-il de leur évolution durant ces trois dernières années ?

Dans sa quête de réalisation des objectifs qui lui sont assignés, la BTS a
cherché à maximiser son efficacité par l’amélioration des différents indicateurs
d’activités. Ainsi, le nombre moyen des projets financés depuis trois ans est de
plus de 11 mille –et on compte atteindre les 12 mille en 2010. Le montant global
de ces crédits est de 763 millions de dinars au 31 octobre 2010, avec l’objectif
d’atteindre 115 millions de dinars à fin décembre 2010, contre 102 millions de
dinars en 2008 et en 2009.

Le nombre d’emplois créés devrait atteindre 208 mille. Je dois préciser que plus
de 3.354 diplômés de l’enseignement supérieur ont bénéficié de crédits de la BTS
en 2009, chiffre qui devrait s’élever à 4.100 à fin 2010. Pour cette même
catégorie, le montant des approbations devrait atteindre 57 millions de dinars
contre 50 millions de dinars en 2009.

Depuis la création de la BTS, 311 millions de dinars ont profité à plus 26 mille
diplômés de l’enseignement supérieur.

Par ailleurs, le taux de recouvrement est passé de 84% en 2008 à 85% en 2009, et
pourrait atteindre les 87% en 2010. En revanche, le taux de recouvrement global,
depuis la création de la BTS a atteint 69% en 2010 contre 51% en 2005. Cette
amélioration est justifiée par l’adoption d’une meilleure stratégie avec les
jeunes. En effet, nous avons adopté une démarche responsable envers nos clients.
Les jeunes sont devenus plus sensibilisés en remplissant leurs devoirs envers la
banque. Celle-ci a œuvré, de son côté, à l’amélioration des services. Un climat
de confiance s’est créé entre les deux parties.

On comprend mieux actuellement que la solidarité soit un concept viable. La
crédibilité des clients s’est améliorée et une relation de confiance s’est
créée.

Quelle est la stratégie de la banque dans la promotion du développement régional
ou ce qu’on appelle le système des microcrédits ?

Dans les régions, la BTS intervient à travers les associations de développement
qui sont des ONG appartenant à la société civile et sont liées à la BTS par des
conventions de partenariat. Nous avons, actuellement, au moins une association
de développement par délégation, soit 288 associations à travers toute la
République. Depuis 1999, date de création du système des microcrédits rattaché à
la BTS jusqu’au 30 octobre 2010, ces associations ont pu octroyer 480 mille
crédits avec un montant global de 430 millions de dinars et un taux de
recouvrement général s’élevant à 88% à la date du 30 septembre 2010. Nous
comptons le ramener à 90% à fin 2010 et le porter à 95% en 2011. Il est
également prévu que le montant global des microcrédits dépasse les 500 millions
de dinars au 31 décembre 2010.

Ces associations ont contribué au développement de l’économie locale dans chaque
délégation, à la consolidation du nombre d’emplois existant et à la création de
nouveaux emplois. Ce genre de financement a profité dans une large mesure à la
femme qui a bénéficié de prêts à hauteur de 45% et aussi à la petite agriculture
qui en a bénéficié à hauteur de 42%, sachant que la région de l’ouest a accaparé
à elle seule 52% des financements en matière de microcrédits. Les prêts sont
actuellement plafonnés à 5 mille dinars pour une période de remboursement de 36
mois.

Quels sont les chantiers auxquels s’attèle la BTS pour améliorer encore plus ses
services et sa rentabilité ?

Le système d’information reste le principal point faible de la BTS. Nous avons
choisi un fournisseur tunisien, lequel d’ailleurs prépare un global banking pour
certaines banques de la place. Depuis trois ans, on travaille à améliorer notre
système d’information. Il devrait entrer être mis en place en 2011. Ceci va se
répercuter sur la qualité de l’information, des services et sur la rentabilité
de la banque. Il nous permettra de transformer les cellules régionales de la BTS
en de véritables agences bancaires qui vont présenter une panoplie de produits
aux clients de la banque. Ceci en maintenant, évidemment, notre vocation qui est
la solidarité. L’accomplissement de ce projet aura un effet positif en nous
permettant d’offrir un accompagnement de bout en bout pour les jeunes
promoteurs.

D’ailleurs, c’est ce qu’on essaie de faire au sein de notre banque. La BTS
compte 270 employés avec un taux d’encadrement de 70%, en majorité des jeunes
cadres. Un choix dicté par l’importance de motiver les employés et de développer
la culture d’appartenance à la banque et l’adhésion à sa vocation particulière.
Les jeunes cadres peuvent communiquer plus facilement avec les jeunes
promoteurs, soit une communication positive permettant d’améliorer les services
de la banque et sa rentabilité à court et à long terme.