L’appel de Cantona à retirer son argent des banques fait des remous

photo_1291316263919-1-1.jpg
écembre 2009 à Paris (Photo : Martin Bureau)

[02/12/2010 19:00:38] PARIS (AFP) L’appel, inspiré par l’ancien footballeur Eric Cantona, à retirer le 7 décembre l’argent déposé dans les banques a pris une telle ampleur sur internet que le gouvernement et les dirigeants du secteur montent au créneau contre une initiative “tragi-comique” voire “insécuritaire”.

Postée sur le web le 6 octobre, la vidéo d’un entretien au quotidien Presse-Océan, dans laquelle l’ex-star de Manchester United prônait la “révolution” via une vague de retraits massifs dans les banques pour que “le système s’écroule”, a fait depuis lors boule de neige sur le web.

L’appel a été relayé dans plusieurs pays et plusieurs langues par un site ad hoc et une page du réseau social Facebook, qui fixent au 7 décembre la date fatidique. Jeudi soir, plus de 30.000 internautes français s’étaient inscrits pour l’événement.

“Ce serait comique si ce n’était tragique”, a déclaré jeudi le ministre du Budget et porte-parole du gouvernement, François Baroin, jugeant cet appel “pas sérieux”.

“C’est un immense footballeur, pas sûr qu’il faille le suivre dans toutes ses suggestions non plus”, avait lancé la veille la ministre de l’Economie, Christine Lagarde.

Le porte-parole du Nouveau parti anti-capitaliste (NPA) Olivier Besancenot a en revanche jugé le projet “séduisant”.

photo_1291316272075-1-1.jpg
énéral de BNP Paribas, Baudoin Prot, lors d’une conférence de presse à Paris le 19 février 2009 (Photo : Eric Piermont)

Longtemps silencieuse pour ne pas lui faire de publicité, la profession bancaire a aussi commencé à s’exprimer. “La recommandation de retirer les dépôts est totalement insécuritaire” tout en étant “complètement contraire à ce qui peut assurer le fonctionnement de l’économie”, a estimé jeudi le directeur général de BNP Paribas Baudouin Prot.

Le président de la Fédération bancaire française (FBF), François Pérol, ne croit pas que l’appel “traduise un malaise” des Français, dont 99% possèdent un compte bancaire, mais estime qu’il “ne rend service à personne”.

“Nous souhaitons que M. Cantona dise qu’il a dit ça par boutade”, a renchéri Reine-Claude Mader, présidente de l’association de consommateurs Consommation, Logement, Cadre de Vie (CLCV).

“Le 7 décembre, je serai à la banque”, a au contraire affirmé l’ex-footballeur mercredi sur le site du quotidien Libération.

Pour les deux fondateurs du site www.bankrun2010.com, Géraldine Feuillien et Yann Sarfati, ce mouvement doit permettre l’émergence de nouvelles banques qui, entre autres, “ne prêtent que les richesses qu’elles possèdent” et “où déposer notre argent tout en ayant la conscience tranquille”.

“Si ça ne se plante pas le 7, cela se plantera de toutes façons”, a déclaré à l’AFP jeudi Mme Feuillien, assurant que le but de l’opération “n’est pas de tout casser, mais de tout reconstruire”.

“Ce corps mourrant qu’est l’économie d’aujourd’hui, qu’on l’achève!”, a-t-elle lancé, tout en réfutant l’étiquette d’anarchiste.

photo_1291316390308-1-1.jpg
ésident de la Fédération bancaire française (FBF) François Pérol à Paris le 26 octobre 2010 (Photo : Eric Piermont)

A aucun moment l’argumentation du tandem ne repose sur l’état de santé des banques françaises. Or, c’est cette préoccupation qui a suscité les deux seuls exemples de retraits brusques et massifs durant la crise financière: ceux des banques Northern Rock au Royaume-Uni et IndyMac en Californie (Etats-Unis).

Le mouvement étant jusqu’ici virtuel, il est difficile d’en évaluer l’impact potentiel sur les banques. Pour M. Pérol, il ne constitue pas une menace pour les établissements français.

Néanmoins, le sujet est sensible. Tout effet de contagion peut être désastreux, car les fonds effectivement disponibles dans les agences n’ont pas de commune mesure avec les avoirs des clients.

Le Fonds de garantie des dépôts garantit les dépôts des épargnants jusqu’à 100.000 euros par déposant et par établissement en cas de défaillance d’une banque. Mais il ne disposait que de 1,6 milliard d’euros début 2010 alors que 270 milliards sont actuellement déposés sur les seuls comptes courants.