Au-delà de sa portée symbolique, de son empreinte, plus ou moins forte, selon le
contexte historique du déroulement de la compétition et des valeurs identitaires
liées aux matchs chocs entre les grandes nations footballistiques,
l’organisation du «Mondial» tous les quatre ans, en alternance avec les jeux
Olympiques d’été, constitue pour la
Fifa et le pays organisateur un enjeu
économique incontestable, une gigantesque plateforme de communication et une
occasion en or pour relancer la concurrence parmi les sponsors potentiels -les
équipementiers Nike, Adidas et Puma en tête pour affûter leurs crampons-,
généralement avides de rendez-vous sportifs qui confinent à la communion
planétaire.
On ne peut l’ignorer, d’une édition à l’autre, l’événement dope les caisses de
Joseph Blatter, qui a présenté devant son 60ème congrès, les 9 et 10 juin 2010,
à Johannesburg, la veille du démarrage de la Coupe du monde, un rapport
financier louant les performances commerciales de son organisation, dont la
trésorerie vient déjà d’empocher 2,7 milliards d’euros de recettes après avoir
garanti la présence de plus de 3 millions de spectateurs dans les stades de la
«nation arc-en-ciel». Au fait, rapporté à une base comptable annuelle, le
chiffre d’affaires de la Fifa n’a cessé de progresser, de 575 millions de
dollars en 2003 à 1,05 milliard de dollars en 2009.
Autant dire que le premier «Mondial» africain est tombé à pic. Les
multinationales souffraient encore. La mondialisation faisait la grimace. Le
délire spéculatif a plombé l’économie-monde. La reprise tardait. La croissance
est revue à la baisse dans les principales capitales européennes. Et là,
subitement, on tourne la page de la crise. Momentanément. Car les ventes
repartent grâce au parrainage des équipes en compétition. L’identification au
succès stimule les consommateurs. Dope le moral des citoyens. C’est l’heure de
l’émotion collective. Du retour au bercail de l’identité nationale. Le pays hôte
annonce 10 milliards d’euros d’impact économique. La galaxie business est à la
recherche d’un second souffle. Elle associe son image soit à un joueur vedette,
soit à l’une des équipes en lice.
Des recettes en crescendo
Selon les statistiques publiées à Zurich, lors du «Mondial» de 2006, en
Allemagne, la manifestation a fixé plus de 26 milliards de téléspectateurs en
audience cumulée à travers le monde (215 pays au total), généré 3,3 milliards de
dollars de revenus dans l’escarcelle de la Fifa, qui a dépensé, à cette
occasion, 1,2 milliard de dollars et attiré environ 2 millions de visiteurs dans
le cadre du tourisme de proximité, issu de la plus grande compétition du premier
sport de la planète.
L’Afrique du Sud, qui tirera profit de l’événement, nous dit-on, à long terme, a
d’ores et déjà réussi, avec l’édition 2010, à gagner un demi-point de croissance
de produit intérieur brut (PIB), tout en permettant à la Fédération
internationale de football d’engranger 1 milliard de dollars supplémentaires par
rapport à 2006, grâce notamment aux droits de rediffusion. Pour la première
fois, assurent des experts, la Fifa, grâce à ses fonds propres, a décidé la
rémunération des clubs qui mettent leurs joueurs à la disposition des
sélections, à hauteur de 40 millions de dollars.
D’ailleurs, de 2006 à 2010, le chiffre d’affaires de la Fédération
internationale de football a progressé de 60%, passant de 2 à 3,2 milliards de
dollars, soit 2 milliards pour les droits audiovisuels, et 1,2 milliard de
dollars pour le marketing, ce qui a permis, assurent les dirigeants de la Fifa,
d’augmenter de 61%, entre 2006 et 2010, les dotations aux équipes, qui sont
passées ainsi de 261 à 420 millions de dollars, soit 8 millions au minimum par
équipe et 30 millions pour le champion du monde, d’assurer la solidité
financière de l’institution et de lancer, sur une vaste échelle, une nouvelle
stratégie de relations publiques, fondée sur le renforcement des valeurs du
fair-play, la lutte contre les dérives nationalistes, le rapprochement entre les
peuples et la préservation de l’éthique sportive.