Dans cette deuxième partie, nous parlerons de “L’important rôle de la formation
continue et du rapprochement du monde universitaire et professionnel“, et de “La
meilleure conception des métiers de la banque à travers le développement d’une
branche dédiée à la banque de financement et d’investissement“.
3- L’important rôle de la formation continue et du rapprochement du monde
universitaire et professionnel
L’émergence de la place de Tunis ne peut se faire qu’à travers la présence d’un
capital humain qualifié et formé en continue. La qualité de la formation
tunisienne est indiscutable et reconnue. Le nombre de tunisiens et tunisiennes
qui font le bonheur des banques et institutions financières internationales ne
cesse d’augmenter. Les cadres tunisiens des banques locales ont démontré à
plusieurs reprises leur capacité et leurs qualités.
Mais il est évident aussi que sans une formation continue de qualité et proche
de la pratique, les banques tunisiennes ne peuvent affronter les prochaines
échéances avec beaucoup de sérénité. Ceci passe bien évidemment par la présence
de centres de formation de qualité et d’intervenants négligeant un peu la
théorie pour s’immiscer dans la pratique bancaire. La présence d’intervenants
praticiens est d’ailleurs à encourager.
En outre, l’université tunisienne spécialisée dans le monde bancaire et
financier (gestion, finance, management, informatique, droit, etc.) ne peut
rester éloignée du monde professionnel. Nombreux sont les Curriculum Vitae
d’étudiants et diplômés tunisiens vierges de toute expérience professionnelle en
terme de stages. Les plus chanceux cumulent deux, trois ou 4 mois de stage dans
des institutions financières à l’heure de décrocher un Master en finance ou en
droit financier. Leurs collègues en Europe cumulent déjà des stages dès la
première année à l’Université. Le rapprochement du monde universitaire et
professionnel est une priorité et une urgence. Les Masters professionnels
dédiées à la finance et à la banque et les initiatives communes entre
institutions financières et universités doivent être encouragées (journées
portes ouvertes, prix pour la recherche). Si la place de Tunis veut jouer un
rôle régionalement, il faut arrêter avec l’habitude d’avoir un étudiant tunisien
décrocher son Master en finance ou en droit des affaires à l’âge de 25 ans, sans
pour autant avoir été immergé dans le monde professionnel même pour une journée.
4- La meilleure conception des métiers de la banque à travers le développement
d’une branche dédiée à la banque de financement et d’investissement
La création d’une structure dédiée à la banque de financement et
d’investissement est l’un des piliers pour l’émergence de la place financière de
Tunis. Ces entités développent une activité à forte valeur ajoutée et peuvent
jouer un rôle déterminant et stratégique dans le financement des entreprises et
la croissance de l’économie tunisienne. Leur développement doit représenter un
enjeu majeur pour la compétitivité de la place financière de Tunis. Les banques
tunisiennes ne peuvent évoluer s’il n’y a pas une vraie spécialisation des
différents métiers de la banque.
Cette activité d’investissement et de financement favorise en effet la diffusion
des innovations en termes de financement de marché, le financement des
entreprises de croissance et des PME grâce aux techniques d’ingénierie
financière et la mobilisation des investisseurs institutionnels internationaux.
Les activités de la Banque de Financement et d’Investissement regroupent trois
grands types d’activité: (i) le financement des grandes entreprises (ii) la
banque d’investissement et (iii) la banque de marché. Le développement des BFI
en Tunisie passerait certainement par une réévaluation et remise en cause du
rôle des intermédiaires en bourse et le retour de leurs activités à ces pôles
«Banque de Financement et d’Investissement» (BFI).
La BFI sera ainsi organisée en 5 grands services:
– Le Front Office composé essentiellement de la Salle des Marchés avec le
support des analystes financiers.
– Le Middle Office a un rôle de gestion du risque et de validation du résultat
du Front Office. Il est en charge de vérifier que des positions à risque,
dangereuses pour la banque ne sont pas prises par le Front et ce en effectuant
des contrôles sur toutes les opérations afin de vérifier les montants engagés,
les contreparties avec lesquelles les opérations sont effectuées et la correcte
couverture des opérations financières. Depuis Bâles II et les autres
réglementations, le rôle du Middle Office est appelé à augmenter de jour en
jour.
– Le Back Office est le bout de la chaîne. Il a le rôle de s’assurer des flux
entrant et sortant.
– Le contrôle interne est chargé de vérifier si les méthodes de travail dictées
par la banque sont correctement appliquées dans tous les services. La notion de
«Best practices – meilleures pratiques» est le cœur même du contrôle interne.
– Les fonctions «support»: (i) un service nouvelles technologies dédié aux
opérations de la BFI. La qualité de formation des tunisiens en nouvelles
technologies est indiscutable. Beaucoup de tunisiens étalent tous leurs talents
dans des firmes internationales et beaucoup d’autres en Tunisie. La mise en
place des outils informatiques nécessaires (de gestion, de reporting, d’étude de
risque, etc.) ne peut qu’apporter plus d’efficience et de sécurité à la place de
Tunis. La deuxième fonction support n’est autre que (ii) le service juridique
dédié à la banque de financement et d’investissement. Il est évident que les
juristes de nos banques souffrent aujourd’hui d’un énorme handicap de formation
sur les opérations financières. Cantonnés souvent dans des tâches de gestion des
problématiques de la banque de détails, ces juristes ne se trouvent jamais
formés et impliqués dans les opérations financières. Commencer par former et
puis dédier un ou deux juristes par banque à la salle des marchés et pour être
le correspondant direct des banques internationales peut être une étape
déterminante aussi dans la mise en place de tout l’édifice.