à Paris en 2010 (Photo : Miguel Medina) |
[15/12/2010 12:59:54] PARIS (AFP) Voyages, hôtels, équipements informatiques… toutes sortes de produits sont commentés et notés anonymement sur internet, et les médicaments n’échappent plus à la règle, à un moment où l’affaire du Mediator vient questionner le système français de pharmacovigilance.
Il y a deux ans, plusieurs sites s’étaient essayés à la notation des médecins français, des initiatives jugées malsaines à l’époque par le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM). Le buzz est aujourd’hui retombé. “Tout ça c’est tombé à l’eau”, commente auprès de l’AFP Jacques Lucas, chargé des systèmes d’information en santé au CNOM.
C’est maintenant au tour des médicaments, dont les pharmaciens ont en France le monopole de la distribution, d’être mis aux voix. Début novembre, a en effet été lancée la version française d’une plateforme européenne basée aux Pays-Bas où les internautes peuvent donner leur avis sur les médicaments.
Meamedica.fr, qui se revendique “indépendant”, permet de noter (de une à 5 étoiles) l'”efficacité” d’un médicament, ses “effets secondaires”, la “gravité des effets secondaires”, la “facilité d’emploi” et enfin la “satisfaction générale”.
L’internaute peut y poster ses commentaires personnels, sur l’efficacité du produit, par exemple : “médicament, chez moi, d’une remarquable efficacité”, “fabuleuse molécule”, “efficacité nulle”, “aucun effet positif”… Mais aussi sur les effets secondaires : “médicament très dangereux”, “énormes effets secondaires: nausées, vomissements et troubles de la vision”, “effets indésirables considérables. Je retourne à la naturopathie…”, “aucun effet secondaire”, “quelques effets secondaires comme mal de ventre mais bénins”…
Les professionnels du secteur ne s’avouent pas franchement hostiles à cette initiative, mais font preuve à tout le moins de scepticisme quant à son intérêt, martelant que “le médicament n’est pas un produit comme les autres”.
“Le ressenti d’une personne par rapport à +son+ médicament est très personnel et donc pas systématiquement transposable”, souligne Xavier Desmas pour le Conseil de l’Ordre des pharmaciens.
écran du site Meamedica réalisée le 15 décembre 2010 à Paris |
“C’est une bonne chose que le patient puisse se sentir concerné par son traitement, mais à condition que les informations qu’il remonte puissent être exploitables”, estime pour sa part Hervé Gisserot, président de la Commission communication des Entreprises du médicament (Leem, industrie).
M. Gisserot reconnaît que “le citoyen a un doute lorsque le débat est accaparé par les experts”. Mais il souligne aussi que “l’expression sur internet aujourd’hui n’est probablement pas encore une expression totalement représentative”.
“Il faut prendre un recul suffisant pour se demander si les propos ont réellement été tenus par un patient lambda et s’ils sont pertinents. C’est vrai pour tous les forums”, renchérit M. Desmas.
La société néerlandaise créatrice du site Meamedica.fr, Insight Pharma Services, précise que chaque avis “est contrôlé par un pharmacien” avant d’être mis en ligne.
“Demandez toujours conseil à votre médecin traitant ou votre pharmacien”, recommande également le site sur sa page d’accueil.
De son côté l?Agence française de sécurité sanitaire (Afssaps) se prépare à faire participer directement les patients au système de pharmacovigilance.
Plusieurs expériences pilotes de signalement direct des effets indésirables par les patients ont déjà été réalisées, notamment lors de la vaccination contre la grippe H1N1 l’hiver dernier. Le public avait alors été invité à signaler d’éventuels effets secondaires des vaccins via le site de l’Afssaps, mais à l’intention des autorités sanitaires, et non des internautes.