ël dans les rues de Madrid le 15 décembre 2010 (Photo : Javier Soriano) |
[21/12/2010 14:26:20] MADRID (AFP) Moins de cadeaux, des tables moins riches et des rues moins illuminées: l’Espagne s’apprête à vivre un Noël de crise, mais rien ne pourrait l’empêcher de sacrifier au rituel du “Gordo”, la traditionnelle loterie de fin d’année qui porte les espoirs de tous.
Alberto Espinosa, un fonctionnaire de 38 ans, est venu acheter ses billets dans une boutique de la Puerta del Sol, au coeur de Madrid, à deux jours du grand tirage de mercredi.
Entre rêve et réalité, il veut toujours croire au gros lot, mais dépensera moins que l’an dernier: “C’est la tradition de Noël, tu as toujours un espoir même si tes chances sont faibles. Mais quand les temps sont durs, l’illusion n’est plus la même”.
Crise oblige, le salaire d’Alberto a fondu cette année, comme ceux de tous les fonctionnaires espagnols, amputés en moyenne de 5% sous l’effet des mesures gouvernementales d’austérité.
“Avant, tu jouais en rêvant de faire un grand voyage, d’acheter une belle voiture. Aujourd’hui, tu rêves de vivre sans te préoccuper de la fin du mois”, confie-t-il.
Manuel Rivero, un commerçant à la retraite de 67 ans, n’hésite pas lui à dépenser cent euros pour acheter cinq billets, à 20 euros pièce, un pour lui et deux pour chacun de ses fils qui se battent pour boucler les fins de mois et rembourser les emprunts.
ël dans les rues de Madrid le 15 décembre 2010 (Photo : Dominique Faget) |
“L’un de mes fils est au chômage, la femme de l’autre n’a pas de travail. C’est un espoir fou mais s’ils gagnaient, cela résoudrait bien des problèmes”, raconte-t-il, debout dans le froid dans une longue file d’attente devant Dona Manolita, une boutique de loterie de la Gran Via, une institution madrilène depuis son ouverture en 1931.
Dotée cette année de 2,32 milliards d’euros, El Gordo (Le Gros) est la loterie réputée la plus riche au monde, même si les prix individuellement ne sont pas les plus élevés.
La Loterie espagnole attend des ventes comparables à l’an dernier (2,7 milliards d’euros), en dépit du climat de crise qui, à l’heure des derniers achats, oblige chacun à faire ses comptes.
Celeste Consuegra, employée dans une maison de retraite, son mari au chômage depuis plus d’un an, a dû choisir: cette année, seuls les enfants auront des cadeaux.
“C’est plus important pour les enfants. Ils sont tout contents. Pour nous les adultes, c’est plus facile à comprendre”, raconte cette femme de 48 ans qui sort d’un grand magasin chargée d’un sac plein de jouets.
La Fédération des usagers-consommateurs indépendants (FUCI) prévoit des dépenses de Noël en baisse pour la troisième année consécutive: 674 euros par foyer contre 728 euros l’an dernier et 814 en 2008, l’année où la crise économique a fait plonger l’Espagne dans la récession.
à Madrid le 22 décembre 2009. (Photo : Pierre-Philippe Marcou) |
Cette baisse de la consommation de 24% sur trois ans “montre les ravages que provoque la crise chez de nombreuses familles qui doivent réduire encore leurs dépenses pendant les fêtes”, expliquait la présidente de la FUCI, Agustina Laguna.
Les dépenses en sorties, fêtes et restaurants sont en baisse de 9%, selon la fédération. Les fruits de mer seront eux aussi moins abondants sur les tables, l’Association nationale des grossistes en poisson prévoyant une chute des ventes de 15 à 20%.
“Ce sera un Noël recyclé”, commente Manuel de Timoteo, directeur du site de ventes d’occasion Doctortrade.com, qui s’attend à un bond des ventes d’occasion, avec 100 euros dépensés par personne, 150% de plus qu’en 2009.
Et dans les rues de Madrid, les lumières traditionnelles ont cédé la place aux LED, les ampoules à très basse consommation. Elles sont aussi moins nombreuses, 4,4 millions d’ampoules contre 7,5 millions l’an dernier.