La loi de finances vient d’être promulguée par le chef de l’Etat. L’objectif macroéconomique est d’instaurer un environnement d’affaires incitatif à l’investissement et à l’exportation, d’impulser l’emploi, d’améliorer le rendement fiscal et d’encadrer les catégories à besoins spécifiques.
Au plan microéconomique, la nouvelle loi de finances comporte des dispositions tendant à réduire les charges fiscales sur l’entreprise, à améliorer les normes de gestion des banques et à concilier le contribuable avec le fisc. La priorité sera accordée au règlement à l’amiable des différends à caractère fiscal et à créer la fonction du «médiateur fiscal». En voici les nouveautés
Incitations en faveur des sociétés off shore
Il s’agit de reconduire les avantages fiscaux accordés aux exportations directes, à l’exception des produits ne présentant pas de valeur ajoutée (substances utiles, sable, marbre…).
Les avantages fiscaux, institués en faveur de l’exportation dite indirecte, notamment les ventes de produits industriels et agricoles locaux aux entreprises totalement exportatrices, seront maintenus. Une seule condition est exigée: ces produits doivent figurer dans la composition du produit exporté.
Ces avantages seront également maintenus au profit des opérations de sous-traitance dans les secteurs de l’industrie, des services, de l’agriculture en faveur des sociétés totalement exportatrices opérant dans le même secteur.
Le maintien de ces mêmes avantages profite aussi aux services fournis par les prestataires logistiques entretenant des affaires avec les entreprises totalement exportatrices.
Le maintien concerne, également, les travaux de recherche réalisés par les institutions de recherche et développement traitant totalement avec les entreprises totalement exportatrices et les services rendus à ces dernières lorsque ces mêmes services constituent une composante du processus de fabrication du produit exporté.
S’agissant des obligations fiscales des entreprises totalement exportatrices, la loi de finances leur donne le choix entre la soumission à un taux d’impôt de 10% au titre des bénéfices générés par l’exportation ou l’assujettissent à un impôt de 1% prélevé sur le chiffre d’affaires annuel provenant de l’exportation.
Par ailleurs, la période de l’abattement total des revenus et bénéfices a été prolongée au 31 décembre 2011.
Les sociétés qui ne sont pas éligibles à l’abattement total après l’expiration de 10 ans peuvent continuer à en profiter après décembre 2011, jusqu’à l’expiration de la décennie légale.
Cette disposition de prolongation est étendue aux bénéfices réalisés par les prestataires de services financiers non résidents opérant au titre des transactions effectuées avec des non résidents et des prestataires de services sanitaires à des étrangers.
Bourse
La loi de finances 2011 institue l’imposition des plus-values de cession d’actions.Pour ceux qui l’ignorent, les bénéfices réalisés en Bourse (et ils seraient très importants) sont considérés, jusqu’ici, comme une composante des revenus annuels déclarés. Perçus en tant que tels, ils ne sont pas tout simplement imposables. Mieux, l’identité des boursicoteurs est confidentielle. Seuls les intermédiaires en Bourse en sont au courant.
Incitations à l’investissement dans les secteurs porteurs
La loi de finances 2011 comporte des dispositions visant à encourager l’investissement dans les créneaux porteurs à fort taux d’intégration.
Il s’agit de prolonger la période de bénéfice de l’augmentation exceptionnelle de 5 à 20% de la prime d’investissement, instituée à cette fin au 31 décembre 2011, et ce en prévision de la révision du régime des incitations.
Au chapitre de l’amélioration de la compétitivité de l’industrie locale des équipements utilisés dans la maîtrise de l’énergie et de l’accroissement de leur taux d’intégration, la loi de finances exonère les intrants de cette industrie des droits de douane.
Cette disposition s’applique, également, aux équipements et pièces de rechange utilisés dans la maintenance et la réparation aéronautique. Elle bénéficiera sur un pied d’égalité aux transporteurs aériens et aux maintenanciers aéronautiques.
Toujours à propos de compétitivité, les interventions du Fonds de développement de la compétitivité industrielle (FODECI) seront élargies. Celles-ci toucheront, dorénavant, les opérations de mise à niveau des entreprises artisanales.
Les services bénéficiaires des interventions du FODECI seront assujettis à l’impôt professionnel prélevé au profit du FODECI.
Les ressources du Fonds de développement de la compétitivité touristique (FODOCT) seront renforcées. Objectif: consolider ses interventions, notamment dans les domaines de la publicité et de la promotion de la destination Tunisie. Dans cette optique, une taxe sera prélevée sur tout séjour dans un hôtel de toute personne âgée de plus de 12 ans. Le montant de cette taxe sera fixé par arrêté.
Concernant l’allégement du coût de constitution des sociétés de participation et l’augmentation de leur capital, la loi de finances 2011 propose une baisse des droits d’enregistrement des contrats et des documents relatifs aux procès verbaux de l’assemblée générale constitutive de 15 dinars à un dinar par page.
Amélioration du rendement fiscal
La loi propose un réexamen du régime fiscal forfaitaire aux fins d’en dispenser certaines activités, de réviser les conditions d’éligibilité à ses interventions et de préserver la dimension sociale de ce régime.
Elle propose d’augmenter le montant de la cotisation à ce régime de 30 mille dinars à 50 mille dinars pour les services et à 100 mille dinars pour les autres secteurs.
L’impôt forfaitaire est fixé selon la nature de l’activité exercée et sur la base d’un taux du chiffre d’affaires annuel. Le montant plancher de l’impôt forfaitaire est fixé à 50 dinars pour les entreprises implantées en dehors du périmètre communal et à 100 dinars pour les autres entreprises.
L’impôt forfaitaire fixé ainsi est exonéré de l’impôt sur le revenu et de la TVA. Il comporte toutefois une taxe sur les entreprises à vocation industrielle, commerciale ou professionnelle avec la création d’une avance au titre de l’impôt sur le revenu de 1% prélevée sur les achats de produits non assujettis au régime réel auprès des grossistes à l’exception des produits soumis au régime des prix des produits encadrés.
La loi de finances 2011 propose l’augmentation de la cotisation au régime forfaitaire réel de 100 mille à 150 mille dinars pour les services et à 300 mille dinars pour les autres secteurs.
Création de la fonction du médiateur fiscal
Le taux de déduction sur le revenu sera unifié pour tous les montants dépassant les 1.000 dinars.
Du nouveau pour les gérants majoritaires des SARL (Sociétés à Responsabilité Limitée). Leurs rémunérations et indemnités sont désormais déductibles. Elles seront déduites de l’assiette imposable des sociétés qu’ils gèrent et seront soumises à la retenue à la source, à la TFP et à l’impôt sur le revenu au niveau du gérant.
Jusque-là, ces dépenses n’étaient pas considérées comme des charges pour l’entreprise et devaient être réintégrées pour le calcul de la base imposable à l’impôt sur les sociétés (IS), alors qu’en même temps ces revenus étaient soumis à l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières au niveau de la déclaration du gérant.
Les droits de douane continueront à baisser selon le calendrier de démantèlement prévu, à cet effet, par l’Accord d’association Tunisie-Union européenne.
La loi de finances 2011 accorde un intérêt particulier à l’arbitrage et aux règlements à l’amiable. Dans cette optique, «la fonction de médiateur fiscal» a sera créée. Parallèlement, des commissions nationales et régionales seront mises en place pour examiner certains cas de redressement fiscal. Ces commissions seront composées de commissaires aux comptes et de conseillers juridiques.
Social: renforcement des mécanismes de l’emploi
Au plan social, la loi de finances 2011 prévoit des incitations fiscales et financières en faveur des promoteurs de centres d’assistance et d’encadrement des handicapés.
Dans cette optique, ils bénéficieront de terrains constructibles cédés au terrain symbolique et de la prise en charge par l’Etat des transferts sociaux et salaires des cadres.
Ces mêmes avantages sont reconduits pour les investisseurs dans des espaces de loisirs pour enfants et jeunes.
La nouvelle loi de finances prévoit des dispositions tendant à renforcer les mécanismes de promotion de l’emploi. Dans cette perspective, les primes instituées dans le cadre des interventions du Fonds de promotion de l’emploi (21 21), tout autant que celles accordées par les entreprises à la même fin seront exonérées de l’impôt sur le revenu et de la taxe sur la formation professionnelle.
De même, le régime fiscal préférentiel sur les bénéfices générés par l’exploitation sera étendu aux primes accordées aux entreprises dans le cadre des interventions du Fonds 21-21, à l’instar des primes accordées à la mise à niveau, à l’investissement et à l’exportation.