L’apprentissage des langues en Tunisie connaît, actuellement, une situation
paradoxale. D’un côté, il est à son niveau le plus bas en matière de qualité.
Les promus de l’enseignement (bacheliers et maîtrisards) se voient délivrer des
diplômes sans maîtriser pour autant ni l’acte d’écrire ni celui de lire.
De l’autre côté, une tendance des pays européens à présenter la meilleure offre
d’enseignement de leurs propres langues en Tunisie. Français, Espagnols,
Britanniques, Allemands et Italiens se bousculent pour courtiser le ministère de
l’éducation et les centres de formation.
Dans cette quête de maîtrise des langues et de conquête du marché, ce sont les
Britanniques et les Français qui ont fait les bonnes affaires. Surtout les
premiers, forts de l’universalité de la langue de Shakespeare…
En effet, British Council a conclu avec le ministère de l’Education un important
accord sur l’apprentissage de l’anglais dans les établissements scolaires. D’une
durée de dix ans, Le programme comporte trois parties: la promotion des supports
didactiques, la formation et l’évaluation.
Alistair Burt, sous-secrétaire britannique au Bureau des Affaires étrangères et
du Commonwealth, a qualifié cet accord de partenariat stratégique de long terme
pour mettre en évidence l’apprentissage et l’enseignement de l’anglais dans
toutes les écoles de la Tunisie.
Il s’agit de faire apprendre cette langue à 2 millions d’élèves et d’étudiants
et de perfectionner 9.500 enseignants d’anglais. Côté financement, c’est la
Tunisie qui en supportera une grande partie.
Pour la partie tunisienne, l’objectif recherché est d’aider les élèves Ã
maîtriser l’anglais parlé et écrit, à renforcer l’employabilité des diplômés du
supérieur et à leur ouvrir de plus larges perspectives aussi bien en Tunisie
qu’à l’étranger.
C’est dans cette perspective que s’inscrit également la décision d’enseigner
l’anglais à partir de la troisième année primaire, et ce à compter de la
prochaine rentrée scolaire (2011-2012).
Pour les seconds (Français), l’apprentissage de la langue française, qui se fait
dès la 3ème année de la scolarité obligatoire, se fera dès la 2ème année Ã
compter de la rentrée de septembre 2011.
Le français est en plus la langue d’enseignement des sciences, des techniques,
de l’économie et de la gestion à partir du lycée (10ème année de la scolarité).
L’enseignement supérieur recourt au seul français comme langue d’enseignement
dans les domaines scientifique, économique, technologique, médical et de
gestion. Dans les disciplines lettres et sciences humaines et sociales, le
français et l’arabe se côtoient avec une répartition différente d’un
établissement à l’autre en fonction du corps enseignant ou de la spécialité.
Par delà ces accords avec les Britanniques et les Français, les autorités
tunisiennes ont adopté, en 2010, une nouvelle «stratégie des langues».
Articulée autour de la création d’un Centre national des langues, celle-ci a
pour objectifs de «veiller à l’amélioration de la qualité des programmes et du
contenu de la formation des enseignants des langues, de les mettre à niveau et
de les doter de la capacité de tirer profit des laboratoires des langues» afin
de «de hisser notre système éducatif au niveau des standards internationaux».
L’ensemble de ces stratégies sont d’un grand enjeu pour le pays et le succès de
leur mise en œuvre l’est encore plus.
Est-il besoin de rappeler ici qu’en matière de maîtrise des langues l’«à – peu
prisme» n’a pas de droit de cité. Si c’est le cas, les générations handicapées
par une maîtrise approximative des langues seront simplement hors jeu et ne
peuvent accéder ni à la connaissance, ni au savoir-faire ni aux technologies.
D’où tout l’enjeu d’assurer un suivi rigoureux de ces stratégies. D’ailleurs, le
récent rapport de l’OCDE sur le niveau des
élèves de 15 ans devrait être un choc salutaire, à l’instar de ce
qu’il a été pour les Allemands, entre autres.