Le président algérien, Abdelaziz Bouteflika, a récemment signé (décembre 2010)
un décret portant nomination des membres de l’Organe central de lutte contre la
corruption en Algérie, dont la création a été décidée en février 2006, qui sera
dirigée par Brahim Bouzeboudjene, ancien chef de Cabinet de l’ancien Premier
ministre Ali Benflis.
Par cette création, l’Algérie comble ainsi une anomalie qui a été signalée dans
le rapport annuel de la Commission nationale consultative pour la protection et
la promotion des Droits de l’Homme, rendu public le 7 décembre 2010, fustige la
corruption dans ce pays et considère qu’«elle mine les fondements de l’Etat et
de la société et a pour corollaire la désagrégation du tissu social».
Ce rapport met à nu les cadres et les agents de l’Etat qui s’octroient des
droits au détriment de la législation contre espèces sonnantes et trébuchantes.
Il signale les manquements graves lors des opérations de privatisation,
s’interroge sur l’impunité des fautifs.
Le Maroc dispose, lui aussi, d’un organe de lutte contre la corruption, malgré
le classement peu flatteur de Transparency International en 2010. Dans le même
registre, il faut savoir que le gouvernement a également récemment créé un site
web dans lesquels il est désormais possible de dénoncer -anonymement- tout acte
de corruption.
L’Afrique, qui occupe le bas de ce classements et qui consacre jusqu’à 20% de
son PIB dans la corruption selon Transparency International 2010, fait des
efforts pour limiter ce fléau.
En effet, plusieurs pays africains disposent d’un quotidien d’information des
marchés publics. On peut citer le cas du Burkina Faso dont la Direction générale
des marchés publics publie quotidiennement les résultats provisoires des
dossiers lancés, en anticipation, par les ministères et autres institutions
publiques.
Cette publication est disponible via le web moyennant un abonnement annuel
www.dgmp.gov.bf où on trouve tous les plans de passation des marchés en ligne,
année par année.
Dans ce quotidien, vendu aussi dans les kiosques et accessible au large public,
on y trouve les résultats des dépouillements des appels d’offres publics, avec
la liste des soumissionnaires et leurs adresses, ainsi que leurs partenaires
locaux, les montants des offres hors taxes et TTC, les observations, comme les
motifs de rejet ou les manques possibles ou les non conformités, voire
l’entreprise choisie pour chaque projet.
L’administration justifie même les motifs de rejet des offres les moins disant,
comme la note technique insuffisante, offre non conforme, CNSS non valide,
délais d’exécution, ou prix en dessous de celui pratiqué sur le marché, ou bien
les travaux publics, bâtiments ou routes -où l’administraton arrive à calculer
un prix de revient minimal calculé à partir du prix de revient du béton et du
ciment.
Quid de la Tunisie?
Il existe une réglementation des marchés publics; il s’agit du décret
N°2002-3158 du 17 décembre 2002 publié dans le JORT N°103 du 20 décembre 2002 et
complété par le décret N°2007-1329 du 4 juin 2007 modifiant et complétant le
premier décret, et le décret N°2008-2471 du 5 juillet 2008 modifiant et
complétant le décret N°2002-3158 du 17 décembre 2002…
Cette législation –claire- a essayé de définir et réglementer les marchés
publics et les rendre crédibles avec un appel à la concurrence, en définissant
les procédures de passation des marchés publics. On peut retenir de cette
réglementation plusieurs règles de gouvernance dont:
– L’ouverture publique des offres financières où les candidats dont les offres
techniques ont été acceptées peuvent assister et doivent amener eux-mêmes leurs
offres financières dans des plis fermés; et la commission d’ouverture annonce à
haute et intelligible voix les noms des participants et annonce les détails de
leurs offres financières (Chapitre 2, articles 65 à 70 du décret N°2002-3158).
– Cette législation a institué auprès du Premier ministère un Comite Consultatif
de Règlement Amiable des Litiges qui a pour mission de rechercher les éléments
d’équité susceptibles d’être adoptés en vue d’une solution amiable des litiges
relatifs aux marchés publics (Chapitre 6).
– Un Observatoire des marchés publics avec un système d’information et un Comité
de Suivi et d’Enquête qui sont créés au sein de la Commission supérieure des
marchés publics auprès du Premier ministère, qui a instauré un système
d’information permettant la collecte, le traitement et l’analyse des données
relatives aux marchés publics. Par exemple, le montant total que chaque
entreprise gagne dans les marchés publics chaque année, ce qui permet d’éviter
la position dominante dans un secteur et une meilleure distribution des projets
sur le marché; ou le prix pondéré pour un produit donné ou une prestation, etc.
D’ailleurs, l’Observatoire des marchés publics établit chaque année un
recensement général des marchés publics et des recensements partiels concernant
un ensemble d’acheteurs publics ou une catégorie donnée des marchés.
Toutefois, aucune information n’est publiée, ou n’est accessible au public, ni
aux entreprises d’un secteur donné. Une certaine culture du secret et un silence
qui méritent d’être levés en mettant en ligne ces informations du moment que
l’administration n’a pas de reproche à se faire.
On espère que le changement sera opéré en 2011, avec la décision du chef de
l’Etat de mettre en ligne les marchés publics et de permettre une consultation
via le web, rompant ainsi avec l’ancienne méthode, ce qui signifie un pas de
plus vers la gouvernance totale.