à Paris le 6 janvier 2011 (Photo : Miguel Medina) |
[08/01/2011 22:50:27] PARIS (AFP) “Le maillon faible est souvent l’homme plutôt que la machine” : étudiants et responsables de l’Ecole de guerre économique (EGE) ont déjà tiré quelques enseignements de l’affaire d’espionnage industriel qui secoue Renault, un cas d’école selon eux.
“L’économie est d’abord une affaire d’hommes et de femmes avec les vulnérabilités de chacun”, souligne Florent de Saint Victor, 23 ans.
Master d’histoire et de relations internationales en poche, le jeune homme à la mise soignée poursuit sa formation de futur spécialiste de l’intelligence économique dans cet établissement créé en 1997 et adossé à l’ESLSCA, une école de commerce privée.
Une centaine d’étudiants usent chaque année leurs fonds de culottes sur ces bancs un peu particuliers, où sont formés les futurs analystes, managers ou consultants de l’intelligence économique… et quelques futurs “espions” aussi, appelés à rejoindre les “services” (DGSE, DCRI, DRM…).
L’économie et l’espionnage feraient-ils bon ménage ? Les maîtres espions britanniques ont créé un acrostiche pour pointer les faiblesses humaines : “MISE” pour “Money (argent), Ideology, Sex, Ego”. Et cette “matrice”, observe Florent de Saint Victor, est toujours d’actualité dans le monde du renseignement et des affaires.
L’EGE, souligne-t-il cependant à l’unisson avec la direction, n’a pas vocation à alimenter les “services”.
Elle forme les futurs professionnels qui seront chargés de protéger ce qui se trame “dans le secret des alcôves économiques” ou bien, au contraire, chercheront à en savoir un peu plus sur leurs concurrents.
Son directeur, Christian Harbulot, voit lui aussi dans le cas de Renault un possible cas d’école.
économique à Paris le 6 janvier 2011 (Photo : Miguel Medina) |
“Symboliquement, Renault a perdu une bataille puisque son image est affectée mais l’entreprise peut encore marquer des points si elle prend conscience que le succès, aujourd’hui, repose au moins autant sur la manière de mener la guerre économique que sur le business, l’innovation ou la force de vente”, explique-t-il.
C’est à cela qu’il prépare ses étudiants, aux “techniques de veille qui permettent de tracer les acteurs d’un marché, de cartographier les réseaux ou de suivre les ruptures et les transferts de technologie” mais aussi aux “opérations d’influence” pour “exploiter les failles de l’adversaire” ou “imposer un modèle dominant”.
Dans cet univers complexe, la presse, l’internet, les forums et les réseaux sociaux offrent un puits sans fond d’informations. “Il n’est pas nécessaire de recourir à des méthodes illégales puisque 80 à 90% des informations utiles sont des informations ouvertes, accessibles à tous”, souligne un autre étudiant, Adrien Mondange.
“On peut aller loin avec certains outils et certaines méthodes qui nous sont enseignées dans les murs de cette école sans être des hackers”, confirme Armand Dutheil de la Rochère, 39 ans, un officier de l’armée de terre appelé à se reconvertir dans le renseignement.
Dans les couloirs de l’EGE, un étudiant confie sous couvert de l’anonymat qu’il entend rejoindre les services. “Traditionnellement, les services français travaillent plus pour la gloire du drapeau que pour la gloire de l’économie, contrairement aux Anglo-saxons”, regrette-t-il.