«Le quai d’Orsay conseille fortement aux voyageurs en Tunisie d’adopter la plus grande réserve et d’éviter de se mêler à toute forme de rassemblement». Vous l’avez compris, il s’agit d’un message adressé aux voyageurs d’affaires à destination de la Tunisie en cette période perturbée. Quant à la Bourse de Tunis, eh bien, pour les deux journées du lundi et du mardi, ses indices sont à la baisse, avec respectivement : -2,79% et -3,66%.
L’environnement d’affaires n’est pas au beau fixe alors que plus que jamais, nous avons besoin d’un climat de paix et de sérénité. Car faut-il encore le rappeler, le capital n’a pas de patrie. Sa patrie, c’est là où il peut fructifier, se développer et prospérer. Il est apatride. Un haut fonctionnaire rencontré par hasard a déclaré: «espérons que nous pourrons tenir le coup face à ces tourmentes sinon nous en aurons au moins pour deux ans avant de pouvoir nous relever de nouveau». Car il serait difficile dans pareille situation de créer de l’emploi et encore plus de ne pas mettre sur le marché de nouveaux demandeurs d’emplois à cause d’entreprises qui risqueraient de traverser des moments difficiles à cause de la conjoncture, pour ne citer que celle évoluant dans le secteur touristique.
Car si le problème cité fréquemment comme étant à l’origine de la crise que traverse la Tunisie, en l’occurrence le chômage, c’est pour le réduire, il faut qu’il y ait investissements. Tous les économistes s’accordent à le dire. Pour créer de l’emploi, il faut de la croissance, au moins 7 à 8% par an pour résorber la demande additionnelle de travail dans notre pays.
Un déficit d’investissement s’explique la plupart du temps par un contexte de sécurité juridique des investissements inadéquat, un manque de transparence, le non respect des lois, l’absence de l’égalité devant la loi, l’absence de la paix sociale et de sanctions des défaillances ainsi que la corruption dans toutes ses formes. Le système administratif et juridique du pays doit être aussi efficace que possible tout comme il faut qu’il y ait plus de clarté des droits fonciers au niveau des régions. Les investisseurs doivent pouvoir gérer leurs affaires avec des administrations réactives à leurs différents soucis et soumis à un niveau tolérable de procédures bureaucratiques.
Dans notre pays, 60% de l’investissement relèvent de la responsabilité du secteur privé. La question qui se pose à ce propos est de savoir quelle manière et quels seront les moyens mis à la disposition du secteur pour implanter de nouveaux projets sur tout le territoire national. Nous savons tous les avantages accordés aux investisseurs dont l’exemption des charges fiscales sur 10 ans ou maintenant la prise en charge par l’Etat des cotisations pour la même durée. Ces privilèges ne pourraient avoir l’impact escompté que si le climat d’affaires est sécurisant pour l’investisseur.
Pour que la création de l’emploi soit un acte sain et durable et non conjoncturel, il faut que les opérateurs privés aient foi en le système. L’acte d’investissement est un acte de confiance. Confiance dans l’avenir, confiance dans le marché et confiance dans l’Etat. En situation de crise économique, la Tunisie n’est pas à l’abri, l’investissement devient hasardeux et le capital frileux de nature hésitant.
Assurer la veille réglementaire et superviser la mise en conformité réglementaire sont importants. Tout comme le fait de mettre en place un organe de contrôle, d’imputabilité ou de responsabilité (accountability en anglais) efficient et lui donner le pouvoir d’exercer des prérogatives dont les plus importantes sont celles de sanctionner les corrompus et de questionner les administrations complices de faits condamnables.
Il est important également dans le cas présent et concernant notre pays de répartir les efforts entre les différents secteurs et de redéfinir les stratégies de développement en prenant en compte toutes les parties prenantes: pouvoirs publics, opérateurs privés, représentants de la société civile, experts, universitaires ainsi que toutes les composantes de la société tunisienne.