Tunisie : Liberté… tout simplement

liberte-15012011-art.jpg«Liberté, ordre justice» sont notre devise nationale. A la lumière des récents
événements qui secouent la Tunisie, il est important de passer par un bilan et
un «mea culpa» pour affronter demain et conserver les innombrables acquis du
pays. La justesse de nos choix fondamentaux ne fait pas de doute. Ils
constituent notre force et vigueur. Répondre aux nombreuses interrogations qui
se posent et s’imposent est crucial dans une conjoncture où des mouvements de
contestations, de révoltes et de famines secouent le monde entier, dessinant
l’avenir.

Parmi ces questions, celles se rapportant aux jeunes et aux moins jeunes,
également. Elles interpellent les manifestants, les observateurs, les
silencieux, les passifs, les modérés, les enthousiastes, les engagés, les
gouvernés et les gouvernants. Qui sont ces Tunisiens que l’on n’a pas su voir ou
entendre? Comment pourrions-nous prospérer et offrir au monde la meilleure image
du modèle tunisien? Quel avenir sommes-nous encore capables de construire
ensemble?

Douter du modèle tunisien bâti sur l’éducation, la santé pour tous et la laïcité
deviendrait dangereux. Il n’est pas permis de remettre en question ces précieux
acquis. La Tunisie est ouverte, résolument tournée vers l’avenir. Outillée pour
affronter la modernité, ce sont ses jeunes qui en représentent la principale
richesse. Les condamner, sous prétexte de négation, alors qu’ils affrontent une
conjoncture socioéconomique ardue, est autodestructeur. Rompre toute forme de
dialogue reviendrait à pousser le pays à se réfugier dans le radicalisme, qui
n’est que l’autre version d’un même péril.

La Tunisie est un pays d’inattendus, tant la véritable nature du Tunisien est
devenue difficile à cerner. Pacifiste, belliqueux, docile, rebelle,
individualiste ou communautariste? Qui de nous s’attendait à ce que l’acte
désespéré d’un jeune homme dégénère en cette suite de manifestations dans
différentes régions du pays? Qui s’attendait, il y a quelques mois encore, à ce
qui vient de se passer? Personne n’ose une réponse négative. Pourtant, nous le
faisons.

Par ce qui s’est passé à Gafsa, à Ben Guerden, à Sidi Bouzid…Par la violence qui
s’amplifie, le chômage qui explose, les médias qui se taisent, la corruption qui
se décentralise, les valeurs qui disparaissent, le trouble devenu malaise se
transforme en révolte. Les signes avant-coureurs étaient là. Le pays a commencé
par murmurer. Aujourd’hui, il hurle la pauvreté, la corruption, la pauvreté, le
non respect des lois…

Il n’est de pire aveugle que celui qui ne veut voir et de pire sourd que celui
qui ne veut entendre. Aujourd’hui, nous devons prêter une oreille attentive à
toutes ces voix qui s’élèvent pour mesurer la teneur des contestations. Elles
réclament moins de discrimination, plus de justice sociale, travail et égalité,
justice, développement,…

Ces revendications ne sont plus une surprise pour personne. Construire des
alternatives en répondant autrement aux défis d’un pays où les chances sont à
deux vitesses devient inéluctable. Toutes les forces vives du pays doivent
s’engager à mettre tout en œuvre pour répondre aux requêtes d’une population
instruite, éduquée, civilisée et responsable. L’avenir est notre responsabilité
et notre droit à tous.

La Tunisie, n’est pas scindée en riches et pauvres, travailleurs et chômeurs,
jeunes et vieux, politisés et apolitiques, pratiquants et non pratiquants ou
sceptiques… Le pays est formé d’une population unie, de forces vives, qui a le
sentiment qu’une partie de son avenir est hypothéquée, de citoyens refusant
toutes formes de manipulations, d’associations impliquées dans la société
civile, de stratégies d’Etat bâtisseur… Un peuple qui, face aux épreuves, se
révèle progressiste et mature. La Tunisie que l’on chéri ne peut reprendre d’une
main ce qu’elle a donné de l’autre. Il n’y a pas plus Tunisien qu’un autre. Le
nationalisme, le patriotisme et la citoyenneté ne sont pas mesurables,
monnayables ou convertissables.

La colère gronde. Mais justement, comprendre sa nature et ses raisons représente
une part de l’équation et des réponses. C’est dans une Tunisie plurielle que
nous devons envisager l’avenir. Le retour sur investissement dans l’éducation,
la santé et l’égalité sont des éléments centraux du modèle social tunisien qui
est actuellement en péril. Des institutions et une Constitution qu’on respecte
sont au cœur de notre survie. «Liberté, ordre et justice» en sont les plus
importants garants. Il est temps de remettre les pendules à l’heure.